Les élèves, victimes collatérales de la grève générale

Pour cette deuxième semaine de rentrée scolaire, les quelque 94 000 élèves de Mayotte (selon les chiffres de 2016) pâtissent toujours des barrages routiers et du climat de grève générale qui hypothèque de plus en plus leur scolarité.

 » Bouche-trou », « garderie »… Certains professeurs des établissements du second degré de Mayotte goûtent peu les conséquences de la grève générale – des élèves en grande majorité absents – ainsi que les mesures prises par le vice-rectorat pour pallier ce problème. En effet, depuis la rentrée des classes du 12 mars, un « fonctionnement par établissement de proximité », non contraignant, a été mis en place, consistant à demander aux enseignants et aux élèves de rallier l’établissement scolaire le plus proche de leur domicile, indépendamment de leur affectation. Un non-sens pédagogique et un dispositif compliqué pour des questions d’assurance pour les syndicats, notamment la CGT Educ’action. « Pour moi, assurer une mission de service public, ce n’est pas faire de la garderie », avait déclaré mercredi dernier le vice-recteur Nathalie Costantini en réaction aux critiques. Elle se félicite que cela permette aux élèves de ne « pas être pris à partie » par les manifestants et aux enseignants « de dispenser des cours et de s’attarder sur des points importants avec les élèves durant ces séquences ».

Pour la plupart des professeurs interrogés, la situation est toutefois « catastrophique » d’un point de vue pédagogique, comme pour cet enseignant de Sada : « Je ne vois pas comment cette année scolaire pourrait être rattrapée, surtout pour les classes à examens », se désole-t-il, comptabilisant en moyenne 200 élèves présents sur les 1 200 scolarisés dans ce collège de l’ouest de l’île. En outre, rapporte ce pédagogue, les parents refusent d’envoyer leurs enfants en cours et certains de ses collègues ne prennent plus la peine de se déplacer.

« Tous les établissements du secondaire sont ouverts, mais ne fonctionnement pas comme à l’ordinaire », reconnaît-on du côté du vice-rectorat. « Depuis une semaine, les taux de présence sont variables, nous avons eu un nombre important de personnels en poste. Aujourd’hui, les pourcentages sont en baisse au vu des difficultés d’accès et de la pénurie d’essence qui commencent à les impacter. La prise en charge d’un petit nombre d’élèves permet de continuer à assurer un accompagnement, les jeunes ne doivent pas être pénalisés », indique-t-on du côté du vice-rectorat.

Dans le détail, 83% des enseignants du second degré étaient présents lundi 12 mars, contre seulement 56% vendredi 16 mars. Côté élèves, la tendance est nettement moins bonne, avec 4% de présence lundi 12 mars dans les collèges ; un chiffre qui a atteint 14% vendredi 16 mars. Au lycée, c’est à peine mieux : 7% de présence lundi 12 mars, contre 12% vendredi 16 mars. « Nous avons conclu un partenariat avec le CNED (Centre national d’enseignement à distance) […] pour que tous les élèves des classes de première et terminale aient la possibilité de recourir à des cours en ligne en mathématiques, français, philosophie et histoire-géographie », a fait savoir dimanche, par courrier, le vice-recteur aux personnels des établissements scolaires. « Si le travail en distanciel ne remplacera jamais votre action, son utilisation circonstanciée est de nature à aider tous les élèves du territoire ».

Premier degré : absence quasiment générale des élèves

Seulement 108 élèves se sont rendus lundi 12 mars en classe, pour la rentrée scolaire, dans le premier degré. Ils n’étaient guère plus nombreux vendredi 16 mars (216 élèves à travers l’île). Le vice-rectorat ne communique aucun pourcentage et pour cause… Avec environ 52 000 élèves inscrits dans le premier degré (chiffres de 2016-2017), le taux de présence des élèves avoisine les 0%. Pour rappel, lundi 12 mars, la ministre des Outremer, Annick Girardin, avait annoncé que « 2 000 professeurs étaient présents pour 2 500 élèves » le jour de la rentrée, mélangeant les données des premier et second degrés. « J’ai bien conscience que ce n’est pas satisfaisant », avait poursuivi la ministre, sans s’attarder sur ces chiffres stupéfiants dans le premier degré. Des chiffres à mettre en relief avec la consigne donnée par les organisateurs de la grève générale de ne pas envoyer les enfants à l’école. Du côté du vice-rectorat, on met en exergue que, depuis la rentrée, « dans le 1er degré, les enseignants ont subi des pressions et ont été mis en difficulté (écoles cadenassées). »

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