On l’appelle désormais l’affaire du soutien-gorge au lycée Bamana. Le 29 sep-tembre, une lycéenne mineure crée le buzz sur les réseaux sociaux en affirmant qu’un membre de l’équipe pédagogique a touché sa poitrine avec un talkie-walkie. Depuis, l’affaire ne cesse de prendre de l’ampleur et le rectorat de Mayotte mène son enquête.
“Vos surveillants ou je ne sais pas quoi pédophiles à Bamana, il faut les virer. À quelle heure tu touches mes tétons avec ton talkie-walkie ?” Les mots sont forts mais lorsque Marie* publie ces propos sur son compte Twitter, elle ne pense pas qu’ils auraient un tel impact sur sa vie. Les faits remontent au mardi 29 septembre. Selon ses amis proches, la jeune fille porte un haut orange sans soutien-gorge. Le secrétaire du proviseur l’appelle alors et lui fait remarquer que sa tenue laissait deviner sa poitrine, et qu’elle doit porter un soutien-gorge. Toujours selon les amis de la principale concernée qui n’a pas souhaité s’exprimer directement, ce dernier accompagne ses paroles avec un geste qui sera fati-dique. “Il aurait touché ses seins avec le bout de son talkie-walkie”, affirment les lycéens. Ce geste révolte Marie qui dans un premier temps dénonce sur son compte Twitter. La nouvelle se répand rapidement et arrive aux oreilles du proviseur du lycée Younoussa Ba-mana qui la convoque. Suite à cette rencontre, Marie supprime ses tweets. “Le proviseur lui a peut-être demandé de supprimer sa publication parce qu’elle était insultante. Elle lais-sait entendre qu’il y a des pédophiles à Bamana”, affirme Gilles Halboult, le recteur.
De leur côté, les proches de la lycéenne dénoncent “une pression de la part de l’adminis-tration du lycée” sans citer de noms. “Elle se retrouve à pleurer seule chez elle. Elle a peur et c’est pour cela qu’elle ne veut plus réagir. Elle veut même changer de lycée”, expliquent ses amis. Ces derniers ne comprennent pas pourquoi le secrétaire en question a fait cette remarque puisque selon eux, la tenue de leur camarade n’était pas déplacée. “Elle se se-rait rendue au lycée avec une tenue présentée comme osée”, rétorque Gilles Halboult. L’affaire va désormais au-delà du non-port du soutien-gorge puisque les amis proches de la lycéenne parlent d’attouchement sexuel. Des accusations que réfute le rectorat. “Les propos et la méthode utilisée pour pointer la tenue étaient peut-être maladroits et ont pu choquer la jeune fille, mais dans les faits qu’on nous a transmis, il n’y a pas eu d’agression ni de volonté d’attouchement sexuel.” Marie n’a pour le moment pas porté plainte, mais une enquête interne est ouverte pour démêler le vrai du faux.
Un soutien tâché par des commentaires blessants
Depuis ces événements, les élèves du lycée Younoussa Bamana ont lancé une pétition pour soutenir leur camarade. Ils ont décidé de s’habiller en noir et blanc ce mardi 6 oc-tobre, et les filles avaient annoncé qu’elles ne porteraient pas de soutien-gorge. Le mou-vement a plutôt été bien suivi par les filles qui profitent de cette polémique pour s’affirmer. “Nous ne sommes pas obligées de mettre de sous-vêtement si on n’a pas envie. Ce n’est pas une obligation. On peut s’habiller comme on veut”, clame Farna, une lycéenne. “Même si elle n’avait pas mis de soutien-gorge, la personne en question n’avait pas le droit de la toucher”, ajoute son amie, Karima. Le recteur également montre son soutien. “On vit dans une société où tout le monde se préoccupe de ce que les filles doivent porter et ne pas porter. On doit arrêter de se focaliser sur ça parce que de l’autre côté ça en-traine des réactions extrêmes avec certaines qui se voilent beaucoup et d’autres qui se dévoilent beaucoup. On doit laisser les filles tranquilles.” Les propos sur les réseaux so-ciaux sont moins cléments envers la jeune fille. Les internautes prennent la défense de l’homme qui aurait pointé son talkie-walkie sur la poitrine de Marie et dénoncent les tenues vestimentaires parfois “légères” que peuvent porter les adolescentes au lycée. “On ne comprend pas que certaines personnes soutiennent cela. Les gens sur les réseaux so-ciaux ne sont pas informés et se mettent du côté de la personne accusée”, regrettent les amis de Marie. Gilles Halboult, lui, souhaite que les jeunes tirent une leçon de cette his-toire et apprennent à utiliser les réseaux sociaux avec prudence. Il évoque une sensibilisa-tion plus soutenue venant de l’Éducation nationale.
*Le prénom a été modifié pour préserver l’anonymat de la mineure
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