Le protocole sanitaire dans les écoles mahoraises, les réalités du terrain

Depuis lundi, tous les enfants, âgés de 6 ans ou plus, de l’île et partout ailleurs sur le territoire national – doivent obligatoirement porter le masque dans les établissements scolaires. Une nouvelle mesure qui s’ajoute au protocole sanitaire déjà très strict. Pour faire en sorte que l’ensemble du dispositif soit respecté à la lettre au sein de l’école de Passamaïnty Village, la directrice Rose-Marie Bloquet, veille au grain. Immersion.

Jeudi, 7h20. Comme chaque matin, Rose-Marie Bloquet, arrivée une heure plus tôt, se tient droite devant les deux entrées de l’école élémentaire de Passamaïnty Village. Derrière ses lunettes, la directrice scrute minutieusement les faits et gestes de ses 344 élèves, alignés dans la file d’attente correspondant à leur section respective. La course contre la montre peut alors débuter. Top chrono pour envoyer toutes les frimousses en classe. « Chaque groupe rentre un par un », précise-t-elle. « Les enfants sont disciplinés et rangés. » Dans la cour de récréation, la même rigueur s’impose. À l’image de la série de lignes tracées à la bombe sur le bitume brûlant.

Pas le temps de souffler que Rose-Marie Bloquet court encore à droite et à gauche. Cette fois-ci pour assurer une distribution d’un masque en tissu adapté, dont le port est obligatoire dès l’âge de 6 ans depuis lundi, à destination de tous ses protégés. « Je suis passée dans les 14 salles et en ai profité pour leur donner quelques consignes. » Avec deux protections, lavables 20 fois, en poche, les écoliers sont en capacité de se couvrir jusqu’aux prochaines vacances scolaires. Tout du moins en théorie… « Je milite pour qu’ils reçoivent tous un lot de 6, comme les adultes. Car certains d’entre eux se les font voler, les perdent ou bien ne les nettoient pas à cause des coupures d’eau. » Une crise dans la crise qui n’arrange décidement pas les affaires du milieu scolaire.

Le lavage des mains en chanson

Au loin, une femme de ménage s’active pour désinfecter les sanitaires, nettoyer les poignées de porte et remplir les bacs à savon. Des mesures strictes qui remontent déjà à la rentrée scolaire de fin août. « C’est un planning de dingue à mettre en place pour respecter toutes les consignes. Au niveau de la gestion administrative, c’est épuisant ! » À 9h, les premiers groupes d’élèves sortent pour prendre leur collation, histoire de « s’oxygéner ». Une nouvelle épreuve de force pour Rose-Marie Bloquet. Car c’est le moment d’aérer les classes mais aussi de contrôler le lavage des mains qui doit durer 30 secondes.

Et pour s’en assurer, la directrice peut s’appuyer sur sa recette magique proposée par l’équipe pédagogique : la lecture en choeur d’une comptine pour procéder aux huit étapes nécessaires dans le but d’avoir les minettes toutes propres. Sauf que tout ce protocole peut donner du fil à retordre, notamment en termes d’approvisionnement… « Avec un bidon de 5 litres, nous tenons deux jours », souffle-t-elle, la tête penchée vers ses réserves, avant de confier avoir dû faire preuve d’ingéniosité pour fabriquer son propre savon en période de pénurie, ou plutôt de livraison tardive. « Nous ne devrions pas avoir à réclamer pour [en] recevoir. »

Les bons et les mauvais élèves

À 11h, bis repetita avec la pause méridienne durant laquelle une grande majorité des enfants rentrent chez eux pour déjeuner. Installée une nouvelle fois à proximité du portail, Rose-Marie Bloquet alterne entre les rappels à l’ordre – « bon appétit, à tout à l’heure… n’oubliez pas de porter votre masque sur le nez ! » – et les félicitations – « c’est bien les CM2, vous avez tout compris ! ». L’occasion idoine d’adresser ses louanges aux parents, « réceptifs » et surtout « coopératifs » face à cette succession de contraintes. Mais aussi de saluer la prise en charge des quelques-uns restés sur place par la douzaine d’animateurs de la mairie de Mamoudzou le midi. Toujours à l’affût du bien-être de ses élèves, celle qui est directrice de l’école depuis maintenant 6 ans donne quelques conseils pour alléger les règles sanitaires. « N’hésitez pas à vous espacer d’un mètre pour enlever vos masques car il fait chaud. » Message reçu 5 sur 5. Ni une ni deux, toute le monde étire ses bras pour respecter la distanciation physique.

L’heure de souffler a enfin sonné pour Rose-Marie Bloquet, éreintée par cette journée démarrée sur les chapeaux de roue. « En tant que directrice, je ne fais qu’appliquer les consignes », admet-elle. Si « les élèves sont très dociles et respectueux sur le port du masque », cette nouvelle mesure s’avère plus contraignante pour les enseignants. « Ils ont plus de mal à l’accepter, car cela rajoute des difficultés pour le travail pédagogique, comme la phonologie, l’expression des sentiments et l’audition. Toutes ces tâches modifient la manière d’enseigner. » Toujours est-il qu’un objectif commun prime : éviter le confinement à tout prix et revivre l’expérience de l’école à distance ! « Nous mettons le paquet pour ne pas avoir de clusters. » Avec un tel capitaine à son bord et un équipage de vingt enseignants motivés, Passamaïnty Village fait assurément partie des exemples à suivre.

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