Les Journées nationales d’action contre l’illettrisme (JNAI) auront lieu du 8 au 15 septembre prochains. À Mayotte, le taux de l’illettrisme est nettement supérieur à la moyenne dans l’hexagone. Dans un courrier en date de lundi, Ben Youssouf Chihabouddine, Président de la Commission de lutte contre l’illettrisme, a interpellé le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, en visite officielle sur l’île, pour dénoncer ces disparités.
Plus de cinq jeunes mahorais sur dix en grande difficulté à l’écrit. Selon les derniers résultats de l’enquête nationale de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques), en 2012, parmi les 109 000 personnes en âge de travailler, 58% des habitants de Mayotte ne maîtrisaient pas les compétences de base à l’écrit en langue française. Compte-tenu d’un accès à l’enseignement plus tardif, les femmes étaient davantage en difficulté avec 63% contre 53% pour les hommes. « Les langues véhiculaires parlées à Mayotte sont différentes de la langue de scolarisation, ce qui peut créer un fossé avec la métropole par exemple », a regretté Éric Nedelec, coordonnateur national de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI). Le Président de la Commission de lutte contre l’illettrisme, Ben Youssouf Chihabouddine, a profité de la visite à Mayotte du ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, pour l’interpeller sur ces chiffres inquiétants, dans un courrier datant de lundi. Il a notamment évoqué « un problème (illettrisme et analphabétisme ndlr) aigu qui s’aggrave » prenant exemple sur la Journée de la défense et de la citoyenneté en 2015. « Les enquêtes […] ont fait ressortir que 75% des jeunes ont des difficultés de lecture à Mayotte ». Une situation alarmante qui nécessite des efforts « immenses et urgents » pour le département. Le Président de la Commission a également demandé « que soit intégré dans le plan de construction de Mayotte, un vaste programme de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme orienté vers l’amélioration de l’employabilité de la population ». Enfin, il a rappelé la « volonté exprimée de Monsieur Le Président de la République de mieux accompagner Mayotte » pour « une amélioration rapide de la connaissance de la langue française et des savoirs de base de la population ».
Pauvreté et illettrisme, même combat
Le ministre a, quant à lui, assuré lundi que le gouvernement avait pris « toute la mesure » des problèmes récurrents à Mayotte et a souligné que les « évaluations diagnostiques » devaient permettre aux enseignants de vérifier, dès le CP, l’acquisition des savoirs fondamentaux. Ces difficultés face à l’écrit et à la lecture « s’expliquent notamment par l’environnement économique et culturel, le contexte et l’histoire de l’île », a indiqué Éric Nedelec avant d’ajouter : « la plupart du temps, nous pouvons superposer la carte de la grande pauvreté et la carte de l’illettrisme. Là où il y a des poches de pauvreté, il y a un taux d’illettrisme qui peut être important même s’il ne faut pas faire de généralité », a remarqué le coordonateur national de l’ANLCI. En 2017, une plateforme partenariale a été mise en place à Mayotte, « même si la volonté était de la créer en 2015 », pour fédérer tous les acteurs de ce combat. Regrouper tous les acteurs, c’est aussi la mission des Journées nationales d’action contre l’illettrisme (JNAI) qui se dérouleront, cette année, du 8 au 15 septembre prochains. « L’illettrisme est un phénomène invisible. C’est donc un travail incessant d’informations et d’échanges avec la population pour le faire connaître, surtout dans les Outre-mer et à Mayotte en particulier », a expliqué Virginie Lamontagne, chargé de mission à l’ANLCI. Et d’ajouter que « diffuser un message est au cœur de notre campagne : on peut apprendre à tout âge. L’estime de soi, il faut travailler sur cette dimension ».
Une entreprise sur deux concernée par l’illettrisme
Selon une enquête du CSA, publiée le 8 septembre dernier, seul un quart des employeurs est en mesure de déceler l’illettrisme, alors qu’il concerne une entreprise sur deux. Plus de 2.5 millions de personnes, soit 7% de la population âgée de 18 à 65 ans, étaient en situation d’illettrisme, en 2017, après avoir été scolarisées en France, selon l’ANLCI. Le pourcentage d’employeurs disposant des moyens nécessaires pour repérer ce phénomène, n’est que de 26%. Pourtant, 91% des entreprises assurent que la lutte contre l’illettrisme est un enjeu important.
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