Ce lundi, une conférence sur la non-scolarisation s’est tenue au rectorat à Mamoudzou, animée par des chercheurs de l’Université Paris Nanterre. Ils ont présenté leurs travaux sur le sujet et ceux qu’il reste encore à faire.
“À Mayotte, on arrive à un total de 5.379 enfants non scolarisés a minima”. C’est le chiffre que présente Tanguy Mathon Cécillon, un des chercheurs au centre de recherches Éducation et Formation (Cref) de l’Université Paris Nanterre, qui a contribué à l’étude « Non-scolarisation et déscolarisation à Mayotte : dénombrer et comprendre » parue en 2023. Avec Gilles Séraphin, professeur des universités et responsable scientifique de l’étude commandée par les associations Mlezi Maore, la Convention nationale des associations de protection de l’enfance (CNAPE), la Croix-Rouge et les Apprentis d’Auteuil, ils en ont présenté les résultats lors d’une conférence tenue au rectorat, à Mamoudzou, ce lundi matin. C’est, entre autres méthodes, en comparant le nombre de naissances d’une année donnée aux nombres d’inscrits à l’école quelques années après que les chercheurs arrivent à ce chiffre.
Le recteur de l’académie de Mayotte, Jacques Mikulovic, présent lors de la conférence, reconnaît qu’il “faut regarder la réalité en face” ajoutant qu’il est estimé que 6.000 enfants sont non scolarisés à la maternelle. “On a la prétention de croire qu’on scolarise tout le monde en CP”, ajoute-t-il. Blocages administratifs au moment de l’inscription faute de justificatifs, manque d’infrastructure, réseau de transport insuffisant… Plusieurs facteurs sont mis en avant par le rectorat et l’équipe de recherche pour expliquer les difficultés à scolariser les enfants. Mais pour les identifier et les comprendre davantage, une nouvelle étude va être menée par les chercheurs du Cref, renforcés par la présence d’une anthropologue, Alison Morano, et d’un doctorant, Jim Sermeth. “Cette fois-ci, on veut aussi un aspect qualitatif pour savoir ce que font ces enfants au quotidien, comment ils occupent leur journée, quel rapport ils ont avec les différentes institutions”, détaille Gilles Séraphin.
Des difficultés en plus avec Chido
Plusieurs associations financent cette nouvelle étude, dont Mlezi Maore et le Village d’Eva. “Il faut que la non-scolarisation soit visible et qu’on prenne le problème à bras le corps”, insiste Laëtitia Vazé, responsable administrative et financière du Village d’Eva, qui a accueilli 600 enfants non-scolarisés en 2024 dans ses quatre centres.
Cette fois-ci, l’impact du cyclone Chido va pouvoir être pris en compte. “Depuis Chido, l’hypothèse que la situation s’est dégradée et que de nouveaux enfants sont concernés n’est pas une hypothèse délirante”, affirme Gilles Séraphin. Le recteur ajoute que 2.000 élèves initialement inscrits sont en difficultés de scolarisation depuis le cyclone, s’ajoutant aux enfants non scolarisés initialement.
Toutes ces données récoltées doivent également poser les bases d’un Observatoire de la non-scolarisation à Mayotte. Pouvoirs publics, associations et chercheurs seront invités à le nourrir afin de mieux comprendre cette problématique et trouver des solutions. “Il faut qu’on puisse poser un diagnostic pour aider ces enfants à être scolarisés”, insiste Laëtitia Vazé.
Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.