Le rectorat a présenté ce mardi sa feuille de route pour une nouvelle année qui s’annonce chargée. Entre la lutte contre les violences, la réussite et la scolarisation de tous les élèves ou encore la stabilisation de la jeune institution, les défis sont nombreux. Tour d’horizon.
Un mois presque jour pour jour après le retour des élèves en classe, le rectorat a lui aussi fait sa “rentrée” officielle ce mardi 21 septembre. L’occasion de dresser le bilan d’un début d’année scolaire une fois de plus émaillé par les violences et toujours sur fond de crise sanitaire, mais aussi et surtout de présenter les perspectives de l’académie de Mayotte pour 2021-2022. “Maintenant que nous avons un rectorat de plein exercice, nous déclinons localement la politique nationale. À Mayotte, nous avons vocation à développer comme ailleurs des formations qui répondent aux exigences nationales, au service de la réussite de tous”, introduit le recteur Gilles Halbout. Cinq mots résument la philosophie du ministère : “L’école de la République”.
Savoirs fondamentaux et filières d’excellence
Bien sûr, la déclinaison locale de la stratégie nationale n’empêche pas des “adaptations aux réalités du territoire”, comme le plurilinguisme, ou l’arrivée parfois tardive des élèves dans le cursus scolaire. En ce qui concerne les différences de niveau, le rectorat entend ainsi poursuivre sur la voie de l’excellence “sans laisser personne sur le carreau”. “Nous avons réussi à diviser par deux le taux de sortie des élèves entre la 3ème et la Seconde, et à le ramener autour de 6%”, évoque Gilles Halbout. Un chiffre rendu possible par l’ouverture de 1.400 places en deux ans dans des formations professionnelles de type CAP ou Bac pro. Sans oublier les apprentissages et BTS. “En deux ans, nous avons augmenté les capacités des formations professionnelles de 30%”, précise Dominique Gratianette, le secrétaire général de l’académie. De quoi répondre aussi aux enjeux de développement économique du territoire, en lien avec les entreprises et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI).
Et, pour que “ceux qui souhaitent aller plus vite, puissent briller plus vite”, le rectorat mise sur les pédagogies différenciées, les classes de compétence, ou encore les classes de niveau, avec des sections spécifiques. “Nous avons beaucoup insisté sur les sections sportive et musique, cette année nous voulons mettre l’accent sur les langues vivantes européennes”, explique le recteur. Objectif, avec ces filières d’excellence : combattre la méfiance des parents vis-à-vis du niveau scolaire. Et éviter la fuite de jeunes cerveaux vers la métropole… “Ce que nous voulons, c’est développer des filières d’excellence partout sur l’île pour ne pas reproduire les erreurs de l’Hexagone avec des lycées prestigieux versus des établissements ghettos.” Une troisième classe préparatoire doit aussi voir le jour.
Le périscolaire contre les pierres
Reste que jouer les Einstein entre deux jets de parpaing n’est pas à la portée de tous. “Sur la question des valeurs de la République et de la sécurité, l’académie de Mayotte ne connaît pas les mêmes problématiques que dans d’autres académies”, concède le recteur. Au sujet de ces violences, l’arlésienne du département, Gilles Halbout déplore que “le jeune qui caillasse à l’extérieur est le même que celui à l’intérieur de l’établissement qui ne pose pas de problème”. Et de citer “ceux qui ont sauvagement assassiné le jeune Miki Madi”, événement qui avait endeuillé toute l’île en avril dernier.
En réponse à ces caillassages et autres rivalités de bandes, le rectorat veut mettre le développement du périscolaire au cœur de cette nouvelle année scolaire. Une continuité éducative qui va de l’accompagnement des familles à l’école ouverte, en passant par les vacances apprenantes, le sport, ou encore la culture. “Là aussi, avec un siècle d’enregistrements d’associations, de clubs d’échecs, de grandes fédérations sportives, de pôles culturels, il y a globalement un maillage culturel en métropole que nous n’avons pas à Mayotte”, déroule Gille Halbout. L’arrivée du Pass culture, avec 200 euros pour chaque élève entre la 4ème et la Terminale, apportera sa pierre à l’édifice. Côté sport, “nous allons construire une dizaine de bases nautiques pour les sorties EPS, et rien n’empêche après de permettre aux associations d’utiliser le local, d’ailleurs nous sommes prêts à les subventionner”, évoque aussi le responsable de l’académie.
Deux ans de plein exercice
L’autre spécificité de l’île aux parfums ? La jeunesse de son rectorat de plein exercice, âgé d’à peine deux ans, et dont “nous devons stabiliser la mise en place”. Cette année scolaire 2021-2022 doit voir l’application de la feuille de route RH, déclinaison locale du Grenelle de l’Éducation, et que les syndicats attendent de pied ferme. Mobilité, sécurité des établissements, versement de l’indemnité de sujétion géographique (ISG) aux néo titulaires, accompagnement des contractuels, formations, font entre autres partie de la batterie de mesures listées dans ce document de 17 pages. Qui se résume par ce triple objectif du rectorat : attractivité, stabilisation et formation des personnels.
Des places pour tous ?
Dernier sujet et non des moindres, la scolarisation de tous sur un territoire en proie à une démographie galopante… Cette rentrée, 106.146 élèves ont pris le chemin de l’école, soit plus de 3.000 âmes supplémentaires par rapport à 2020. Particulièrement sous-tension : le premier degré, qui relève de la compétence des maires. Grâce à des financements du ministère des Outre-mer, 1.5 million d’euros vont être mis sur la table pendant deux ans et demi pour appuyer l’ingénierie dans les communes les plus peuplées. Que ce soit par le modulaire, l’utilisation d’autres locaux communaux comme les MJC, “les maires ont toute imagination pour répondre à cette pression démographique”, ajoute Dominique Gratianette. Et il faut agir vite, car à “3.000 ou 4.000 élèves de plus dans le premier degré, dans trois ans nous serons à 10.000, c’est énorme”, table-t-il. La course contre la montre est lancée…