Une quarantaine d’étudiants du centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) et de l’école maritime de Mayotte ont embarqué ce samedi 9 juillet sur le Marion Dufresne II, le célèbre bateau des Terres Australes et Antarctiques françaises. Ils accompagnent la nouvelle édition de la mission scientifique MayObs chargée d’étudier le volcan sous-marin de l’île au lagon. Mais ce dernier point n’est qu’un détail aux yeux de ce projet initié par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer : l’objectif est surtout de créer la première « école flottante » de l’océan Indien.
Samedi 9 juillet, 13h. Une quarantaine d’étudiants et professeurs se préparent depuis le ponton de Mamoudzou à rejoindre le célèbre navire Marion Dufresne II, propriété des Terres Australes et Antarctiques françaises, amarré au large. À son bord, des scientifiques de MayObs ainsi que d’autres jeunes de la région embarqués à La Réunion. En tout, pas moins de 75 élèves font partie de cette aventure inédite qui se déroule du 9 au 22 juillet aux large des côtes mahoraises, dans la région du volcan sous-marin. Projet multi-collaboratif, mais initié par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, L’École Bleue a pour objectif de faire vivre une expérience unique d’échanges et d’apprentissage autour des enjeux de l’océan de demain. « Les jeunes ultramarins ont encore trop souvent le dos tourné à la mer », précise Sophie Brocas, la directrice générale des Outre-mer. « C’est pour leur permettre d’explorer ces mondes nouveaux que nous [les] avons invités à [y] participer. »
Parmi les 50 étudiants scientifiques, le centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Mayotte constitue le « noyau dur ». À ce contingent, il faut ajouter 14 élèves des écoles maritimes de La Réunion et du 101ème département, mais aussi 11 étudiants « artistes » chargés de réaliser un carnet de bord illustré d’aquarelles et de photos pour raconter l’incroyable aventure que tous vont vivre au cours des deux prochaines semaines. Sans oublier la présence plus incongrue de Taambati Moussa, la « gardienne des traditions mahoraises », invitée pour « faire découvrir la culture [locale] aux jeunes de l’océan Indien », souligne Jean-Louis Rose, le directeur du pôle culturel du CUFR. « Quand on m’a proposé cela, j’ai dit oui immédiatement. Je n’ai peur de rien, moi ! », lance la doyenne avec le mélange de candeur et d’humour qui la caractérise.
Un voyage multidisciplinaire de deux semaines
Vous l’aurez compris, cette immersion est totalement multidisciplinaire. Les étudiants auront la chance de côtoyer des scientifiques chevronnés, d’observer et de participer à leurs expériences. Pour le territoire, le référent de l’École Bleue est Emmanuel Corse, enseignant-chercheur en biologie, assisté par Matthieu Jeanson, enseignant-chercheur en géographie. « Ce voyage n’est que le premier du genre et il se déroule autour de Mayotte grâce à l’engouement de l’Ifremer pour le nouveau volcan sous-marin. Toutefois, il y en aura d’autres dans les années à venir, dans d’autres régions ultramarines », précise le géographe. Cette aventure se greffe sur l’expédition scientifique MayObs qui, depuis 2019, étudie le volcan apparu avec une rapidité impressionnante dans les eaux mahoraises en 2018. Un fait scientifique qui demeure quasi unique au monde. « Les étudiants participeront aux expériences des scientifiques, mais nous leur avons également prévu des travaux dirigés », souligne l’enseignant. Pas question de chômer donc…
Pour certains d’entre eux, comme Nayam Ben Maïmoun, il s’agit de leur première expédition en bateau. Une découverte que le jeune homme appréhende sereinement. « Je me sens bien et j’ai hâte de découvrir la vie en mer », déclare-t-il tandis qu’il attend l’embarquement sur le ponton avec ses camarades. Il fait partie des quatre étudiants « artistes » repérés par Jean-Louis Rose au cours des différents ateliers d’art dispensés par le pôle culturel du CUFR. « Il était important d’avoir également une vision artistique et pas uniquement scientifique de l’aventure », explique ce dernier. Pour les étudiants scientifiques, il s’agit d’une extraordinaire opportunité de découvrir les méthodes scientifiques actuelles. « Nous allons pouvoir découvrir les nouvelles instrumentations, la manière de faire des mesures en haute mer et dans les profondeurs. Nous allons également apprendre à gérer les roulements et les quarts. Autant d’éléments qu’on ne peut pas appréhender entre les murs d’une université », confient Sarah et Sophie, deux doctorantes en écologie et géographie.
Découverte totale pour certains, renforcement des connaissances pour d’autres, tous apprendront toutefois à connaître la culture des uns et des autres et le vivre-ensemble au sein d’un huis-clos détonnant. Véritable « école de la vie », l’École Bleue fera date dans l’histoire de Mayotte. « Sortir des murs de l’université et évoluer avec nos étudiants dans un cadre si particulier sera une expérience pédagogique nouvelle », estime Emmanuel Corse qui pense que « cela inspirera sans doute notre manière d’enseigner de retour à Mayotte ».