Depuis lundi, plusieurs enseignants de Mayotte sont en grève pour réclamer la généralisation de l’aide exceptionnelle de 2.000 euros. Ils dénoncent aussi des conditions de travail qu’ils doivent subir dans des écoles partiellement détruites. Leur mouvement se poursuit, avec une nouvelle mobilisation prévue jeudi.
« Une rentrée bâclée » : c’est l’inscription écrite à la craie blanche, en contrebas de l’enceinte du rectorat de Mayotte. Ce mercredi 29 janvier, une centaine de professeurs grévistes se sont rassemblés au croisement de la rue Sarahangue et de l’avenue Zoubert Adinani. Une mobilisation débutée lundi, qui marque aussi la rentrée scolaire. Le cyclone Chido, survenu il y a six semaines sur l’île de Mayotte, a fait 39 morts selon le bilan provisoire officiel et a endommagé plusieursinfrastructures des établissements scolaires, à l’image du lycée Younoussa Bamana, situé à quelques mètres de là.
À la veille d’une possible rencontre avec Élisabeth Borne, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, les professeurs grévistes souhaitent rappeler leur revendication principale : la généralisation de l’aide exceptionnelle de 2.000 euros sans condition, qui a été versée peu après la tempête aux agents dont l’indice de rémunération était inférieur à 448.
Sur le trottoir, une enceinte et un micro ont été installés. Rivo Rakotondravelo harangue son public : « Nous voulons être traités sur un pied d’égalité, nous ne demandons pas plus, mais cette aide ! » Un discours apprécié par Hadidja Saindou, professeur des écoles à Labattoir : « Mayotte est déjà discriminée par rapport aux autres départements, et là, on effectue une discrimination entre les professeurs de Mayotte », remarque-t-elle.
La mobilisation continue ce jeudi
D’après les chiffres du Syndicat National Unitaire des Instituteurs, professeurs des Ecoles et éducateurs (SNUIPP) , environ 5.000 sur 9.000 enseignants auraient perçu cette aide exceptionnelle. « Il y en a qui n’exercent plus à Mayotte et qui ont perçu cette aide, d’autres, sans doute, sont décédés et ont perçu cette prime », s’amuse Rivo Rakotondravelo, porte-parole des grévistes du jour.
La seconde revendication porte sur les conditions de travail, après le cyclone. « Mon école a été vandalisée, mes affaires ont disparu et je dois accueillir mes élèves ? Et pour leur expliquer quoi ? Moi-même, je ne sais pas comment contenir ma frustration, mon désarroi et ma douleur. » Selon Said Anssiffoudine, secrétaire général du syndicat Snuipp Mayotte, « nous sommes d’accord pour que les enfants puissent reprendre les cours, mais pas dans n’importe quelles conditions. On ne va pas se mettre en danger, et l’école avec nous ». Les professeurs souhaitent aussi obtenir les rapports des commissions ayant permis la réouverture des établissements. Les professeurs grévistes se donnent à nouveau rendez-vous ce jeudi à 8h pour donner suite à leur mobilisation, alors que la ministre de l’Éducation nationale entamera une visite de deux jours sur l’île, dans le but de « faire le point sur la reprise des enseignements, l’acheminement des fournitures scolaires et d’identifier les prochaines étapes pour le plan ‘Mayotte Debout’ pour le champ de l’Éducation nationale », indique son cabinet.
La CGT Educ’action Mayotte écrit à Élisabeth Borne
Le syndicat CGT Educ’action Mayotte a rédigé une lettre à l’attention d’Élisabeth Borne, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qui visitera les établissements scolaires mahorais pour faire le point sur la rentrée ces jeudi et vendredi. Le syndicat demande notamment à ce que la reconstruction demandée par Chido n’efface pas les défaillances qui étaient déjà à combler avant le cyclone. Il demande par exemple que la caisse de retraite complémentaire Ircantec soit déployée à Mayotte pour les contractuels, comme dans le reste de la France, ainsi qu’une revalorisation de la grille indicaire pour les non titulaires. Concernant les titulaires, la CGT demande à « mettre fin aux nombreuses discriminations qui touchent principalement la population établie depuis longtemps sur l’île » en retirant par exemple les conditions de mobilité ou de changement de résidence administrative qui s’applique à l’octroi de bonus spécifiques. Le syndicat demande également à ce que les enseignants du 1er et 2nd degré soient traités de la même manière. Enfin, le syndicat demande un statut spécifique pour les établissements scolaires de l’île afin que les moyens soient mis pour que les enfants puissent bénéficier des meilleures conditions d’apprentissage.
Journaliste, aussi passionné par les paysages de Mayotte que par sa culture. J’ai toujours une musique de rap en tête.