Edito. Ce que j’en pense… La France doit retrouver sa joie de vivre

 

Il ne fallait pas choquer, il a fallu accepter beaucoup de compromis(sions). Il y a eu la real polititik, puis le pragmatisme érigé en mode de gestion politique et diplomatique. Il y a eu la crise, qui a obligé à baisser la culotte pour quelques contrats d’exportations… Puis certains y ont pris goût, ne se sont plus aperçus des dégâts que cela engendrait ou engendrerait. Et ainsi allait le monde.

On commerçait avec des dictatures, on pillait des pays, on vendait des armes à des ennemis potentiels, on acceptait des zones de non-droit aux portes de nos villes, on communautarisait sans gêne, on oubliait nos principes, nos valeurs. Et plutôt que de résoudre les problèmes à la source, on essayait, tels des pompiers pyromanes, de mater des soulèvements ponctuels dans les banlieues, des colères trop longtemps contenues d’altermondialistes ou d’écologistes, des manifestations d’agriculteurs excédés, de routiers, de taximen…

Par manque de courage, on a accepté beaucoup trop de dérapages, d’excès, de dérives. Par manque de vision, d’ambitions, on a accepté trop souvent de suivre aveuglément des “alliés” dans des combats qui n’étaient pas les nôtres, ni dans nos valeurs.

Le lobby des vendeurs d’armes américains est très puissant. Il maintient, entretient ou provoque des zones de tension, de guerre loin de ses frontières, pour vendre ses armes. Il provoque des révolutions aux portes de l’Europe et les abandonne, soutient des régimes extrémistes, des dictatures, pour des raisons financières, pétrolières, ou pour maintenir des “points chauds” et semble se complaire dans cette ambiance de guerre permanente, larvée. Une fois les destructions télévisées terminées, les équipes de bâtisseurs arrivent. Une fois le chaos installé, les groupes de sécurité privée se mettent en place, chèrement, longtemps.

Ce n’est pas notre façon de faire, de concevoir la vie sur terre, avec nos voisins. Nous n’avons pas osé souvent le dire, sinon une fois à l’Onu. Nous sommes espionnés, nos grandes entreprises pillées par des réseaux à l’échelon mondial. Alors oui, il faut se défendre, se protéger, mais pas au prix du renoncement à notre liberté, comme d’autres l’acceptent.

Au nom de l’ultra-libéralisme, nous avons accepté d’importer beaucoup de ce qui nous entoure de Chine, sans imposer de normes sociales ou environnementales, qui auraient pu améliorer le sort de notre planète. Nous aurions pu, du le faire. L’Europe aurait pu n’accepter les importations que de pays, ou d’entreprises labellisés, et inciter les autres à le faire, contribuant à améliorer la situation sur la planète.

Au nom de l’amitié transatlantique, nous avons suivi les Américains dans des guerres, loin de chez eux, mais à nos portes, contre des peuples amis, ou tout au moins qui n’étaient pas ennemis. Les révolutions arabes ont été soutenues parfois, combattues violemment ailleurs, suivant des intérêts qui ne correspondaient pas à nos valeurs. Seule la Tunisie, prix Nobel de la Paix, s’en sort comme elle peut, et elle a besoin de nos soutiens.

La politique africaine de la France, la politique arabe de la France pouvaient s’appuyer sur des relations étroites, historiques, sincères. Les valeurs universalistes de notre pays, de fraternité, de paix, de tolérance, de liberté, étaient reconnues, appréciées, respectées. Nous sommes désormais un pays guerrier, interventionniste. Nous avons privilégié les vendeurs d’armes va-t-en-guerre, plutôt que les diplomates et autres spécialistes reconnus. Nous avons quasiment cessé la coopération technique, dans l’éducation, la culture, au profit d’interventions belliqueuses bien plus dangereuses, et coûteuses. Et surtout cela nous positionne comme des cibles privilégiées de ces extrémistes, qui naissent et grandissent dans la misère de pays ruinés, sans éducation, dans des zones en guerre. Ils sont des cibles faciles de propagandistes djihadistes qui leur parlent d’héroïsme, de vierges et de paradis.

La position géographique de la France, son histoire, au croisement des peuples d’Europe, de Méditerranée, d’Afrique, l’accueil de réfugiés vietnamiens, chiliens, iraniens, qui ont forgé notre population, notre métissage, nous avaient placé naturellement dans cette posture, dans cette situation de négociateur, de faiseur de paix. La France est et doit rester un pays ouvert, de tolérance, de liberté, de vie. Nous basculons dans la guerre et on devrait s’en satisfaire, s’en accommoder ?…

Je ne souhaite pas laisser à nos enfants une planète au bord de l’asphyxie, polluée, réchauffée, et en guerre. Nous devons faire taire les fusils, par la raison, par l’éducation, par la laïcité, par les échanges. Nous en sortirons grandis. Si nous répondons aux armes par les armes, nous entrons dans le jeu des terroristes, des extrémistes et nous risquons de devoir pleurer encore et encore la mort d’innocents.

La France doit retrouver sa place, ses valeurs, sa liberté de parole, son courage, sa joie de vivre.

 

Laurent Canavate

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