Face au manque de techniciens cycle à Mayotte, Cécile Perron, la fondatrice de Mob’helios, société de réparation et de locations de vélos, a décidé de former des jeunes Mahorais. Après un an de formation, c’est une réussite et une chance pour des locaux aux parcours parfois cabossés.
Dans l’atelier de Mob’helios, Andy Saïd règle le dérailleur arrière d’un vélo amené à réparer. Depuis un an, le jeune homme de 22 ans est employé par la société de réparations et de locations de bicyclettes située sur le parking de la barge à Petite-Terre. Comme lui, ils sont quatre Mahorais à être apprentis pour devenir technicien cycle dans la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). Cécile Perron a choisi de former des locaux « pour permettre à des jeunes de Mayotte de trouver un métier porteur » alors que la pratique du vélo se développe sur le territoire. La démarche n’est pas uniquement « altruiste », les former répond aussi à un besoin au vu des difficultés pour recruter des techniciens cycle sur le territoire. « Les personnes qui font ce métier sont déjà rares en métropole car la pratique du vélo a explosé depuis le Covid et les faire venir à Mayotte, c’est encore plus compliqué », raconte-t-elle. La société a déjà recruté cinq formateurs techniciens cycle venus de l’Hexagone en seulement un an d’existence. Toutefois, ils ont quitté l’île aux parfums pour des raisons personnes ou professionnelles.
Formés à Toulouse
Cécile Perron a donc lancé un appel à candidatures auprès d’associations et des centres communaux d’actions sociaux (CCAS). Finalement, quatre jeunes auparavant sans activité ont été retenus. « Une association allemande a permis de leur financer une formation pour devenir opérateur cycle dans une école spécialisée dans le vélo à Toulouse pendant un mois », rembobine la gérante. Des cours pour acquérir les fondamentaux de la mécanique cycle, une formation réussie pour les quatre jeunes. Accompagner le public est également l’une des missions de la SCIC qui a une « vocation d’insertion sociale », souligne la fondatrice. Les quatre sont formés pendant deux ans, à l’issue desquels ils auront validé un diplôme de technicien cycle grâce à la validation des acquis de l’expérience (VAE).
Benarzade Souf, 23 ans, originaire du quartier de Doujani à Mamoudzou est très content de cet apprentissage, « avant d’être employé ici, je bricolais sur les vélos, là, j’apprends plus en profondeur leur mécanisme, c’est très intéressant », décrit celui qui y voit des parallèles avec sa formation d’électricien. Tandis qu’il « galérait à trouver un emploi », cette formation est selon lui une véritable chance. Même constat pour El Fayez Assoumani, 23 ans. « Pendant mon adolescence à Labattoir, je réparais des vélos dans la rue avec un ami », évoque-t-il, aujourd’hui, il est heureux de pouvoir en faire à terme son métier.
« Une vraie opportunité »
Fayswal Ali, 25 ans, s’occupe cet après-midi-là de la caisse. « Je ne suis jamais allé à l’école, alors obtenir un diplôme de technicien cycle signifie beaucoup pour moi, » se réjouit celui qui habite à Kahani. Ses formateurs constatent « sa motivation de fou puisqu’il n’a jamais été scolarisé, cette expérience représente une vraie opportunité pour lui », observe Cécile Perron.
Tout n’est pas rose pour autant pendant l’apprentissage. Les apprentis doivent également savoir vendre des vélos et donner des conseils d’ordre mécanique. Une partie relationnelle et pédagogique avec les clients qui n’est pas forcément aisée. « Pour Fayswal qui n’est jamais allé à l’école, la partie calcul n’est pas facile », de même expliquer « comment marche un dérailleur n’est pas forcément évident », illustre l’ingénieure de formation. Mais après un an, la gérante ne regrette pas une seule seconde son choix de les avoir formés, eux qui sont presque autonomes pour l’ensemble des réparations.
A la fin, l’objectif est que ces apprentis forment à leur tour de nouveaux techniciens cycle. Car, aujourd’hui située à Petite-Terre, la société compte ouvrir un deuxième atelier d’ici peu à Mamoudzou, où deux des quatre apprentis travailleront.
Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.