Mayotte a une carte à jouer pour se positionner sur ce méga-projet estimé à plus de 50 milliards de dollars. Mais le département va devoir s’adapter pour séduire les industriels qui auront bientôt besoin d’une base arrière pour exploiter les gisements de gaz. Et vite.
L’heure tourne et Mayotte a encore du pain sur la planche pour devenir cette fameuse “base arrière” que tout le monde appelle ici de ses voeux. C’est en substance le message qu’ont souhaité faire passer les intervenants pour la conférence sur le projet gazier du Mozambique à l’occasion du deuxième jour du Forum économique, ce jeudi. “Cela fait maintenant plusieurs années que nous sommes sur le dossier : ce n’est pas encore gagné, il reste du travail à faire, mais nous avançons”, a ainsi retracé Ben Issa Ousséni, président de l’ADIM, en donnant le coup d’envoi de ce nouveau tour de table.
Pour rappel, ces gisements gaziers découverts au large des côtes du Mozambique ont subitement attiré les convoitises sur l’un des pays les plus pauvres de la planète. La concurrence promet d’être féroce pour se partager ce gâteau estimé à 50 milliards de dollars. Et il y a donc de quoi remporter une jolie mise, à condition de savoir faire ses jeux… Trois compagnis d’extraction, Total, Exxon et ENI, ont déjà avancé leurs pions.
“Tirer son épingle du jeu”
Or, ces géants industriels auront besoin de tout un tas de fonctions supports pour développer leurs activités : acheminement des équipements, déplacements des personnes, évacuations sanitaires… Le 101e département, idéalement situé à l’entrée du canal du Mozambique, espère donc bien “tirer son épingle du jeu”, pour reprendre l’expression de Christophe Remoué, directeur général d’Evolen, une association qui entend promouvoir l’excellence française dans l’’industrie des hydrocarbures. Mais le compte à rebours a commencé.
“Nous devons nous préparer à mettre à jour nos structures portuaires et aéroportuaires d’ici un ou deux ans, mais aussi nos administrations qui vont devoir s’habituer à ces va-et-vient par Mayotte”, a évoqué Ben Issa Ousséni. Un voeux pieu quand on sait qu’à Mayotte, les volcans poussent plus vite qu’une piste longue ou une retenue collinaire… Le Département a en effet tout intérêt à développer la logistique dans la zone portuaire, et aéroportuaire, mais aussi à prendre en considération les besoins en hébergement, pour les personnes qui travailleront sur les projets. Et donc aussi à développer son offre touristique.
Créer un cluster d’entreprises
La bonne nouvelle ? C’est que depuis un an, et la dernière édition du forum, des premiers jalons ont déjà été posés. Sous l’impulsion de la préfecture, un cabinet de conseil a par exemple permis d’apporter des idées pour permettre à Mayotte de se positionner. “Je relève une piste intéressante, c’est un cluster d’entreprises pour représenter Mayotte et coordonner les efforts”, développe Christophe Remoué. “Ce qui est important, c’est de vous regrouper, de définir votre offre, et de parler à ces acteurs internationaux.”
Adaptations en vitesse
“On parle de projets qui ont une durée de vie longue, donc il y a un peu de temps pour s’adapter. Mais certaines adaptations doivent quand même être menées en vitesse”, a rappelé François Kerdoncuff, dirigeant de la société de conseil et d’assistance technique Cayambe. Parmi les priorités : des aménagements au port, et des adaptations institutionnelles, en premier lieu desquelles la fiscalité et les droits de douanes. Du côté du port, le quai 2 d’une longueur de 230 mètres sera en mesure d’accueillir les grands navires, et des réhabilitations sont prévues d’ici septembre 2021 pour permettre le stockage indispensable aux équipementiers, a assuré Ida Nel, la présidente de MCG.
Proposer une offre compétitive
Et parmi eux, justement, l’entreprise TechnipFMC, l’un des sous-traitants sélectionnés par Total pour les installations sous-marines sur son projet Golfinho. Venues tâter le terrain fin septembre, ses équipes ont été séduites par les atouts qu’offrait le territoire. “Nous avons besoin d’une zone avec de bonnes conditions douanières, d’une baie abritée pour nos navires, d’entreprises pour traiter nos déchets, de transport local et d’hébergement pour nos personnels…”, a listé Denis Hattet, chef d’opérations chez TechnipFMC. Qui a toutefois conclu sa prise de parole par une mise en garde : “Nous ne venons pas en investisseur mais en client : il nous faut une offre attractive et compétitive, celle qui nous proposera le meilleur rapport qualité/prix.” L’industriel se laisse jusqu’à la fin de l’année pour décider d’arrêter ou non son choix sur l’île au lagon. Tic tac.
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