Pour se familiariser avec les nouvelles règlementations régissant le métier de marin pêcheur à Mayotte, 26 professionnels de la mer ont suivi une formation, ce jeudi 9 février, à Dzaoudzi.
A l’origine de cette première session de formation, la communauté des communes du sud de Mayotte aide ses pêcheurs à aller vers la professionnalisation (au sens de l’administration publique) en leur permettant d’être en phase avec la réglementation en cours sur le territoire français et à l’international. Cette opération, qui a été officialisée jeudi matin à Dzaoudzi par le service des Affaires maritimes et la direction du centre de formation, concerne 26 pêcheurs désireux d’obtenir les brevets et qualifications requises pour ne pas souffrir, en mer, de tracasseries administratives et judiciaires dans l’exercice de leur profession. En effet, l’exercice de l’activité de pêche à Mayotte n’a cessé d’évolue au cours de ces dernières années avec, notamment, l’accession de l’île à la départementalisation et au statut de Région ultrapériphérique de l’Union européenne (RUP). Dans ce processus, les services de l’État à Mayotte se veulent intransigeants quant aux obligations imposées aux professionnels du secteur, les mêmes qu’en métropole et dans les autres territoires ultramarins. Pour François Garcia, du bureau des Affaires Maritimes de la nouvelle Dealm, « le métier de pêcheur est une activité dangereuse qui impose une formation préalable avant la qualification de marin pêcheur professionnel ». Les services de l’État espèrent que cette tentative de la structuration de la filière pêche à Mayotte fera tache d’huile dans les autres intercommunalités de Mayotte.
Ainsi, aucune dérogation n’est donc possible, l’objectif fixé étant de ne pas avoir des qualifications au rabais. La structuration du secteur pêche dans le 101e département français fera donc la part belle à la sécurité des équipages. Dans cette optique, la formation qui vient de démarrer à Dzaoudzi contiendra un module d’échanges entre les 26 pêcheurs concernés et les différentes structures et institutions qui entourent la filière sur l’île, en attendant d’y adjoindre un autre instrument important, la commission pêche qui ne tardera pas à être mise en place.
Une moyenne d’âge de 70 ans
Pour sa part, le directeur du Centre de formation maritime se veut rassurant sur la capacité des pêcheurs mahorais à se former pour réussir leur transition en professionnels reconnus à l’échelle nationale et à l’international. « Notre école est au service de tous les marins de l’île et nous sommes parfaitement en mesure de proposer une ingénierie de pédagogique qui s’adapte aux différents types de profils qui se présentent. L’acquisition des brevets peut se faire de la manière la plus simple possible sans avoir à déroger aux normes exigées », note Éric Bellais. En guise de preuve, il présente les 26 stagiaires concernés par cette première session de formation lesquels présentent une moyenne d’âge de 70 ans. Il a emboîté le pas au représentant des Affaires maritimes qui a salué tous les sacrifices consentis par les stagiaires pour devenir des pêcheurs professionnels. Un constat qui démontre, s’accordent les deux parties, une prise de conscience sur le fait que l’avenir de la filière pêche à Mayotte passe automatiquement par le respect des normes. Il est à retenir une différence non négligeable entre les différentes générations de pêcheurs mahorais, les anciens et les plus jeunes. Ces derniers n’ont rien à envier à leurs collègues métropolitains, n’hésitant pas à aller travailler dans l’Hexagone où le secteur connaît une crise de vocation avant de revenir travailler sur l’île. Sur les 26 seniors en formation actuellement, treize ont été ciblés comme étant aptes à essayer d’obtenir le certificat d’aptitude professionnelle à la petite pêche, huit pourront tenter d’obtenir le brevet de mécaniciens pour des moteurs de 250 kW (qualifications destinées à des pêcheurs non francophones ou ne disposant pas de la nationalité française) et les trois derniers à des fonctions de radio et sécurité.
Cette répartition théorique n’a pas été du goût de l’ensemble des candidats. Au regard de certains sujets pertinents soulevés par les stagiaires, les Affaires Maritimes comme le centre de formation se sont dit ouverts à toutes discussions sans tabous. Une inquiétude particulière a fait jour parmi les stagiaires, l’évolution irréversible vers l’acquisition et l’usage d’embarcations modernes répondant aux normes européennes. « Je ne me fais pas d’illusions, à 70 ans, aucune banque, aucune assurance-vie ne me couvrira pour acquérir une embarcation aussi coûteuse », lance l’un des anciens en formation. Réponse de l’État, un dispositif est prévu pour accompagner les futurs pêcheurs professionnels à acquérir ces embarcations avec des aides publiques, notamment de l’Union européenne qui n’ignore pas la situation exacte du secteur pêche à Mayotte. Cependant, un apport personnel des futurs acteurs professionnels de pêche ne saurait être dissocié du mécanisme qui sera mis en place dans cette perspective.