La commune de Koungou épinglée pour ses ressources humaines et ses écoles

La Chambre régionale des comptes (CRC) de La Réunion-Mayotte a rendu fin juin son rapport d’observations sur la commune de Koungou. Les principaux axes étudiés par la CRC concernent l’éducation, les finances et les ressources humaines de la commune. Malgré quelques bons points dont la restructuration des dettes, de gros manquements et irrégularités ont été notifiés. Le rapport d’une trentaine de pages a reçu une réponse détaillée du maire de la commune, Assani Saindou Bamcolo, qui affirme prendre note des recommandations de la Chambre.

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Assani Saindou Bamcolo, le maire de Koungou depuis 2014.

Deuxième commune la plus peuplée de l’île avec 32 752 habitants, Koungou dispose d’un budget annuel de 66,2 millions d’euros, une somme conséquente mais essentielle pour entretenir ses services et ses bâtiments. Contrairement à certaines communes de Mayotte, Koungou est relativement équilibrée d’un point de vue financier. D’après le rapport de la CRC, « elle a disposé d’un autofinancement suffisant pour financer ses faibles investissements, sans recourir à l’emprunt, tout en se désendettant ». Seulement voilà, l’enquête réalisée entre 2018 et 2020 dresse un bilan inquiétant sur d’autres points. Elle épluche en long et en large les secteurs de l’éducation, la gestion des finances ainsi que l’organisation de ses ressources humaines.

Des finances suffisantes mais volatilisées

 Forte de sa situation avec le port de Longoni, unique port maritime de Mayotte, et de ses ressources fiscales propres (impôts) à hauteur de onze millions d’euros, la commune de Koungou tire un bilan positif de sa trésorerie en 2021. Mais si les finances de la commune sont suffisantes et investies dans diverses structures et services, la mairie peine cependant à justifier certaines dépenses. La CRC pointe du doigt le manque de fiabilité dans les comptes de la mairie, notamment les justificatifs relatifs aux effectifs. Ces justificatifs avaient d’ailleurs déjà été demandés à la mairie lors d’une précédente enquête de l’instance, quatre ans auparavant. Outre ces preuves manquantes, les investissements pour la création ou la rénovation de structures restent faibles voire inexistants. « A l’exception de la construction de l’école de Koungou Maraicher, la commune n’a pas réalisé d’autres projets structurants sur la période ». Enfin, l’un des points marquants du rapport concerne les subventions versées aux associations de la commune dont la majorité des rapports d’activité manquent ou sont insuffisants : « En 2021, 126 associations ont bénéficié de subventions ; seuls 22 rapports d’activités, au demeurant tous incomplets, ont été transmis ». Afin de remédier aux problèmes financiers de Koungou, la CRC est revenue sur la nécessité de fournir des justificatifs pour la comptabilité des dépenses effectuées ainsi que sur l’obligation de contrôler les subventions allouées aux associations dès 2023.

Une gestion du personnel de la commune qui reste floue

Alors que le personnel représente le premier poste de fonctionnement de Koungou, plusieurs failles ont été pointées du doigt par la CRC à ce sujet. En 2018, les charges de personnels de la commune représentaient quelque 7,8 millions d’euros, elles représentent en 2021 10,2 millions d’euros. La Chambre a relevé une organisation du personnel qui est insuffisamment structurée (pas de règlement intérieur, par de règles de sécurité au travail, absence de bilan social, fiches de postes approximatives…). Outre ce manque de règles, une mauvaise maîtrise des effectifs et de la masse salariale est à noter. La commune n’a pas de suivi du personnel, le recrutement de ses agents est flou, les primes de l’État sont versées sans le respect des critères d’obtention et plusieurs agents ont effectué des heures supplémentaires au-dessus de la limite légale (spécifiquement les agents de police municipale). Face à ces manquements, la CRC a émis plusieurs recommandations dont la mise en place d’un système de contrôle automatisé du temps de travail des salariés (l’équivalent de « badgeuses »), ainsi que la réorganisation interne des services et l’individualisation du travail clairement mentionnée sur les fiches de postes. Enfin, le rapport insiste sur la mise au clair du processus de recrutement des agents de la commune à travers une gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (CPEC).

L’éducation, principal talon d’Achille de Koungou

Comment fournir un rapport sur l’éducation alors que les chiffres ne coïncident pas ? C’est le problème souligné par la Chambre régionale des comptes. Si le rectorat de Mayotte estime que 20 écoles sont réparties dans l’ensemble des villages de la commune, la mairie en compte elle 21. L’écart est d’autant plus considérable lorsque l’on sait que le rectorat affirme que 8.739 enfants sont scolarisés dans les écoles de la commune contre 9.216 d’après la mairie. Ce problème s’explique en partie par une difficulté générale de recensement au sein du département. Mais l’une des raisons principales reste la mauvaise gestion administrative des écoles (le lieu d’habitation des élèves n’est pas toujours demandé et/ou indiqué, ce qui rend le recensement d’autant plus compliqué). Outre la question des effectifs, la situation des établissements scolaires de la commune est préoccupante. La CRC affirme que « 13 des 21 établissements inspectés ont reçu un avis défavorable ». Ces avis ont surtout été émis à la suite de plusieurs manquements répétitifs aux règles de sécurité (pas d’alarme incendie, ni d’exercices incendies dans certaines écoles, absence d’extincteur, issues de secours inexistantes ou non conformes…).  Sans oublier que tous les établissements de la commune dépassent la capacité maximale d’accueil d’élèves et sont laissés dans des états très vétustes. L’éducation étant l’un des chantiers prioritaires de l’île, l’instance a imposé plusieurs recommandations à la commune. Tout d’abord, elle demande à ce qu’un traitement des données personnelles et administratives de chaque élève soit mis en place dans chaque école. Elle a également précisé qu’une fiabilisation des effectifs devrait être faite des 2023 – en relation avec le rectorat. Enfin, les investissements dans les bâtiments et le personnel scolaire restent un des chantiers essentiels d’après la Chambre.

Si la crise sanitaire a perturbé la gestion globale de la commune de Koungou dès 2020, elle ne peut excuser l’ensemble des problèmes pointés du doigt par la CRC car l’enquête a débuté en 2018. De plus, le précédent rapport de la CRC, couvrant la période 2013-2017, avait émis quatorze recommandations dont quatre avaient été examinées par la mairie. Le maire actuel, Assani Saindou Bamcolo, était déjà en poste à ce moment. Il a été réélu en 2020 et devra donc s’appliquer à mettre en œuvre les recommandations qui ont été émises par la Chambre régionale des comptes. C’est justement ce qu’il a affirmé dans sa réponse au président de la CRC : « mes services prendront en considération toutes les recommandations de ce cahier, dans les délais impartis, un retour vous sera adressé au plus tard en janvier 2024 pour vous informer de l’avancement de la mise en œuvre effective ».

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