La brique de terre dans le grand boom de la construction

Association défendant la brique de terre compressée, Art.terre organisait son assemblée générale dans les locaux de la Cadéma, à Mamoudzou, le jeudi 11 mai. Une occasion de faire le bilan des activités réalisées durant l’année écoulée, faire le point sur les difficultés rencontrées et divers projets auxquels elle est associée.

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Comme souvent avec l’association Art.terre, à l’assemblée générale, ce jeudi, les discussions ont une fois de plus porté sur l’utilisation à grande échelle de la brique de terre compressée (BTC) sur le territoire. Un intervenant a fait part de son scepticisme sur la solidité de ce matériau et sa capacité à pouvoir séduire à nouveau la population mahoraise. Des professionnels lui ont répondu qu’il faut se méfier de cette logique de fragilité de la BTC, qu’il a scientifiquement été prouvé qu’elle pouvait supporter un poids de vingt tonnes et que son usage peut aller jusqu’à un bâtiment de R+5. A son tour, le président d’Art.terre, Mustoihi Mari, a attiré l’attention des différents professionnels présents sur la nécessité de respecter les règles professionnelles : « il faut éviter de porter atteinte à la BTC en tant que matériel ». Une allusion faite aux dosage de la quantité de ciment par certains artisans lors de la fabrication de la BTC (5 % seulement suffirait là où d’autres s’évertuent à mettre 10 %) .

De son côté, Vincent Liétar a souligné le fait l’arrêt de la production de ce matériau (au profit du parpaing) à Mayotte pendant plusieurs années n’est pas dû à un désamour de la population locale, mais plutôt à la fin des programmes de la case SIM (Société Immobilière de Mayotte). Il a également précisé que son retour en force est dicté par des besoins de confort énergétique, de coût de production, de durabilité et de baisse des besoins en climatisation. Mayotte et la Guyane qui sont les deux territoires français aux besoins élevés en logements conduisent différentes expériences dans le domaine de la performance énergétique et l’isolation thermique à travers le projet Toma (terre d’outre-mer améliorée). La Guyane fabrique des panneaux en recourant à la bagasse (résidu issu de la canne à sucre) et Mayotte utilise la fibre de coco. Objectif, parvenir à doubler la baisse de la consommation en climatisation jusqu’à dépasser les 30%.

Des projets innovants

Partant du constat que le secteur privé constitue le plus gros constructeur sur le territoire du fait de la possession du foncier, une réflexion s’est engagée sur comment faire pour l’associer à l’accélération de la construction de logements de qualité sur plusieurs niveaux en favorisant la production de BTC. Un projet pilote est en cours sur un terrain sise à M’tsapéré, avec le concours de Cratère qui veille aux détails constructifs et le respect absolu des règles professionnels. Tenant compte des caractéristiques propres à Mayotte, ce projet a été imaginé sur un modèle (à généraliser dans le futur) de construction sur un terrain en pente. Il prévoit la récupération et le stockage des eaux de pluies pour les besoins sanitaires (chasse d’eau) ainsi que des panneaux solaires sur les toitures. Dans ce concept, les familles (qui ont du mal à se faire financer par les banques pour des projets dépassant R+2) resteraient propriétaires de leurs fonciers, tandis que Art.terre apporterait son concours dans le montage des dossiers de recherche de financement (défiscalisation, programmes d’aides européens). Ce projet pilote pourrait commencer à prendre forme à partir de septembre, la phase études de sol étant déjà terminé, les appels d’offres en cours, la procédure choisie étant de type public. D’autres projets sur lesquels l’association envisage d’œuvrer en association avec Cratère ont été cités comme des logements sur six parcelles de 200 m2  à Chiconi (financement de 100.000 euros pour les études), la création d’un laboratoire de recherches (suivi et qualité) sur la BTC au sein du futur technopole de Dembéni, la concertation avec le rectorat et les lycées professionnels sur la mise en place de plusieurs filières de formation notamment la mise en œuvre, l’inscription de la BTC mahoraise au patrimoine culturel immatériel national (savoir-faire, valorisation et transmission), un projet Amatelo (Atelier mahorais des terres à construire), envoi aux collectivités publiques d’une note juridique (cadre d’inspiration) destinée à l’introduction de critères environnementaux dans les appels d’offres. Autres travaux importants, l’association compte rééditer trois ouvrages fondamentaux sur la fondation d’une politique insulaire d’habitat social à Mayotte en 45 ans. Ils n’existent plus qu’en exemplaires uniques et méritent d’être à nouveau vulgariser en faveur des générations futures. Ils seront portés par un seul éditeur pour une large diffusion interne au département.

Pour se faire connaître également, les membres d’Art.terre compte sur l’exposition Terra Fibra Architecture qui pourrait être accueillie sur l’île. Itinérante et internationale, elle devrait être agrémentée des panneaux spécifiques à Mayotte traitant du torchis et de la BTC. L’association est à la recherche de financement pour cette grande exposition prévue pour s’étaler sur plusieurs mois, sans doute sur les murs d’une barge, dans différents établissements scolaires et des lieux publics afin de toucher un maximum de public.

La certification de la BTC, une victoire de l’association

En ouverture de séance, le président d’Art.terre, Mustoihi Mari, a rendu hommage à l’ensemble des membres du bureau, en particulier Vincent Liétar, pour le travail qu’il a fourni en préparation de cette assemblée générale. Il a émis le vœu de voir d’autres membres de l’association prendre le relais dans la poursuite des actions de l’association. À l’ordre du jour de cette réunion, il y avait l’examen des bilans financier et moral, le renouvellement des membres du conseil d’administration ainsi que divers projets en cours ou à venir. Il est constaté un équilibre financier entre les recettes (supérieur à 100.000 euros) et les dépenses de l’association (72.009 euros), avec un solde supérieur à 47.000 euros. Le bilan ayant été adopté à l’unanimité des membres présents, les débats se sont orientés sur la certification de la brique de terre compressée (BTC) qui retrouve pleinement sa place dans la construction à Mayotte. S’agissant du développement des actions d’Art.terre, il a été mis en exergue l’adoption d’une réglementation professionnelle en juillet 2022, validée par la commission de présentation, un document conséquent de 165 pages qui jette les bases de l’utilisation de la brique de terre compressée et qui permettra aux assurances d’intervenir en cas de besoin dans les constructions en cas de nécessité.

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