Dans le nord de Mayotte, la commune de M’tsangamouji est plutôt bien évaluée dans le dernier rapport de la chambre régionale des comptes. Grâce à une maîtrise des dépenses et une bonne gestion de ses personnels, elle écope de seulement quelques conseils pour parvenir à une situation financière saine.
Dotée d’un faible dynamisme démographique, à rebours des autres communes mahoraises, M’Tsangamouji fait aujourd’hui figure de bon élève dans la gestion de ses personnels et de ses capacités de financement. C’est l’état des lieux sécurisant dressé par la Chambre régionale des comptes en novembre 2023. Souvent relevées dans le rouge, voire vertement critiquées par cette juridiction chargée de contrôler les comptes locaux, les finances des communes de l’île ont fait l’objet de nombreux rapport en 2023. Et, malgré les années qui passent, les recommandations du gendarme des finances locales ne sont pas toujours suivies.Ce n’est pas le cas à M’Tsangamouji. « La commune s’est appuyée sur les recommandations du précédent rapport d’observations de la chambre pour faire évoluer son organisation et ses pratiques », évalue la Chambre régionale des comptes. « Elle se distingue aujourd’hui d’autres communes mahoraises par une administration mieux structurée et encadrée, équipée d’outils de gestion moderne et dotée de procédures formalisées. Elle est une des rares collectivités à avoir mis en place l’annualisation* du temps de travail ».
Des conditions d’inscription à l’école « trop exigeantes »
Cela dit, M’Tsangamouji n’échappe pas à une liste de recommandations sur des points sensibles. Notamment en ce qui concerne la scolarisation des enfants résidant dans la commune. En effet, selon la CRC, les conditions d’inscription y sont « plus restrictives » qu’ailleurs, ce qui permettrait à la commune « de se satisfaire du capacitaire existant ». En plus des pièces exigées – un document d’identité de l’enfant, celui d’un responsable légal et un justificatif de domicile – M’Tsangamouji conditionne l’accès aux classes à la présentation d’un carnet de vaccination, d’une attestation de sécurité sociale ou encore d’un avis d’imposition des parents. « En outre, pour les enfants qui intègreraient une autre classe que la petite section, une radiation de l’école précédente doit être fournie », déplore la CRC, qui souligne que la commune agit « en toute connaissance de cause », empêchant « la scolarisation des publics les plus précaires ». Elle invite, en conséquent, la municipalité à « limiter les pièces exigées ».
Si les écoles de la commune ont un recrutement si drastique, c’est aussi parce que M’Tsangamouji ne recourt pas aux rotations. Ce système mis en place pour pallier l’insuffisance du bâti scolaire impose à deux divisions de se partager une même salle. Une volonté qui émanerait, selon la commune, du rectorat de Mayotte. Les effectifs augmentent pourtant sensiblement (1.239 élèves en 2018, contre 1.345 en 2022). Laissant sur le carreau, en moyenne, 80 élèves chaque année, faute de places en nombre suffisant dans les écoles.
Pas encore de transfert de foncier
Ce n’est pas directement de son ressort, mais des retards sont signalés au niveau du transfert de l’ensemble du bâti scolaire vers la commune. Depuis la dissolution du syndicat mixte d’investissement et d’aménagement de Mayotte (Smiam), la commune est devenue propriétaire du foncier pour seulement deux écoles, sur six. La CRC recommande donc de faire aboutir ces opérations de transfert « sans délai ». La commune tarderait également à dépenser les subventions accordées pour les travaux et les équipements des écoles. Seuls 4,7 M€ des 11,4 M€ accordés à cet effet ont été utilisés. La municipalité n’a cependant pas encore perçu l’intégralité de la somme. « Fin juin 2023, les subventions ont été perçues à hauteur de 50-70 % », relève la CRC. « Cette situation démontre un retard important de la commune à solliciter les soldes des subventions. En revanche, la commune sollicite périodiquement les avances prévues par les partenaires financiers ».
Un équilibre presque trouvé
Malgré une augmentation des effectifs (32%) et donc de la masse salariale, la commune et ses 140 agents (en 2022) tiennent le bon bout. En effet, la CRC rapporte que M’Tsangamouji a fait des « efforts considérables » en matière de recrutement de cadres. Ce qui limite, en partie, l’augmentation des charges de personnel, qui sont tout de même passées de 3,2 M€ en 2018 à 4,7 M€ en 2022. Le régime indemnitaire des agents titulaires (90) et non titulaires (14) est dans ce cadre bien équilibré.
Côté dépenses, les sorties d’argent sont aussi passées au crible. M’Tsangamouji dispose pour cela d’un tableau de bord annuel de suivi des marchés, détaillant la liste des marchés passés et en cours. Toutefois, le paiement de plusieurs subventions nécessaires pour finaliser ces marchés est excessivement long, relève la CRC. Il était de 292 jours en 2021, loin des 30 jours réglementaires. Une situation due à des retards de versement des subventions de la part des partenaires financiers. « Si la commune souhaite maintenir durablement un effort d’investissement élevé, elle devra reconstituer un autofinancement suffisant. Pour autant, les marges de manœuvre de la commune sont réduites » explique la chambre, recommandant à la commune d’élaborer un plan pluriannuel d’investissement* (PPI) en priorité. En guise de nouvelles ressources, la CRS aiguise une piste : l’identification des occupants sans titre des terrains communaux. Un travail de fourmis qui aurait permis à M’Tsangoumji d’éviter de débourser, à tort, 200.000 euros de taxes foncières et d’habitation entre 2018 et 2022. Dembéni a déjà pris ce sujet à bras le corps.
*Aménagement du temps de travail des salariés sur une année
**Outil de programmation et de pilotage financier