Violences contre les femmes | « À Mayotte, les violences faites aux femmes touchent toutes les populations »

La journée internationale de l’élimination de la violence à l’égard des femmes se déroule tous les 25 novembre. Pour l’occasion, l’Association pour la Condition Féminine et Aide aux Victimes (ACFAV) de Mayotte organise chaque année un colloque sur cette thématique. Au programme de cette édition 2018 : les violences sexuelles, un problème ancré sur le territoire où la sensibilisation devient une priorité. 

Elles vivent dans des bangas ou dans des quartiers résidentiels. Elles sont mères de famille ou jeunes mineures. À Mayotte comme ailleurs, la violence touche toutes les femmes, sans distinction sociale ou ethnique. Beaucoup n’en parleront jamais, particulièrement sur un territoire où la tradition religieuse pousse à la discrétion. C’est pourquoi l’Association pour la Condition Féminine et Aide aux Victimes organisait, vendredi à Mamoudzou, un colloque adressé aux associations et aux professionnels  du milieu social et médico-juridique. « Nous devons leur fournir tous les outils pour qu’ils facilitent la prise en charge des femmes victimes de violences », défend Djamael Djalalane, directeur général de l’ACFAV. 

Ancrée sur le territoire mahorais depuis 1986, l’association propose quatre services d’accompagnement : un bureau d’aide aux victimes ; un accueil de jour ; un point info pour les familles et un hébergement provisoire. Depuis le mois d’octobre, 48 femmes, victimes de violences conjugales, ont sollicité l’accompagnement de la structure. Car c’est bien au sein du foyer qu’occurrent la majorité des agressions, qu’elles soient psychologiques, physiques ou sexuelles. 

Contre ce phénomène, « nous étudions la mise en place du Téléphone Grave Danger (TGV) à Mayotte », explique le procureur de la République Camille Miansoni. Ce dispositif, déjà appliqué en métropole, met à disposition des conjointes violentées un appareil géolocalisé qui, en actionnant un simple bouton, permet l’intervention rapide des forces de l’ordre. Autre mesure, déjà en vigueur dans le 101ème département, l’exclusion du mari violent du domicile conjugal, sur ordre du procureur. À ce jour à Mayotte, aucun suivi, médical notamment, des auteurs de violences n’est mis en place.   

Pour autant, « Les violences faites aux femmes touchent toutes les populations », déplore Noera Mohamed,  déléguée régionale aux droits des femmes. « Il y a eu même un cas, en école primaire, où une jeune mahoraise a subi une agression sexuelle de la part de ses camarades ». Contre cette banalisation de la violence, la brigade de prévention de la délinquance juvénile a mené des campagnes de prévention dans tous les établissements scolaires de l’île.  

Puis, il y a ces femmes en situation irrégulière, particulièrement vulnérables. Elles représentent à elles seules près de 10 % des victimes prises en charge par l’ACFAV. « Ici, on ne regarde pas la situation administrative », commente Djamael Djalalane, alors que beaucoup de clandestines refusent de porter plainte par peur d’être chassées du territoire. Alors, au sein de l’association où neutralité et confidentialité sont de mise, ces femmes, ainsi que les autres, peuvent prétendre à un logement provisoire pour une durée de deux semaines. 

Les travailleuses du sexe, elles aussi, prennent rarement la parole contre les violences qu’elles subissent, en dépit des opérations de sensibilisation menées par le planning familial. « Il s’agit de leur gagne-pain, et nous n’avons pas assez d’alternatives à leur proposer », regrette la déléguée régionale aux droits des femmes. Pis, « On observe de plus en plus un phénomène de prostitution juvénile ».  À ce sujet, Noera Mohamed entend mener rapidement une réflexion avec le vice-rectorat. En attendant, toute mineur victime de violence peut bénéficier de l’accueil de jour de l’ACFAV. 

Pour signaler toute forme de violence, appelez au 3919 Violences Femmes Info, un service gratuit et anonyme. 

 

 

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