En plein cœur de M’Tsapéré, un barbershop s’est invité dans le paysage économique du quartier. À sa tête, un jeune étudiant en architecture de 24 ans qui s’est pris de passion pour ce milieu. Moins d’un mois après son ouverture, la nouvelle adresse cartonne déjà. Rencontre.
Tondeuse dans une main, spray dans l’autre, Négro, l’un des deux coiffeurs diplômés avec DT du Six Barbershop, s’évertue à tailler la barbe du client, affalé sur le siège, au millimètre près. Derrière son masque bleu, un large sourire se devine. Lunettes de soleil noires sur le nez, Nahed Saidali s’amuse à immortaliser la nouvelle coupe. En deux clics, le grand gaillard d’1m90 partage la vidéo sur les réseaux sociaux pour en faire profiter la communauté. La communication, c’est son dada. Lui-même le dit, il surfe sur cette vague pour « attirer une clientèle masculine et apporter ce côté soin du visage, un concept encore trop peu présent sur l’île ». Deux semaines après le lancement de son salon, le business tourne déjà à plein régime. « On a une clientèle très diversifiée entre les cheveux typés européens et afro », s’amuse-t-il, au détour d’un pas de danse. Et ce n’est pas l’inauguration de samedi dernier qui dira le contraire… « On a accueilli beaucoup de monde, ça a dépassé nos espérances », avoue le jeune homme de seulement 24 ans, qui a réussi à collaborer pour l’occasion avec Caresse Cream et DJ Madis pour rameuter les troupes. « Ça a créé l’engouement. Ça a coiffé, ça a mangé des glaces ! »
« Une culture très urbaine »
Toute cette folle aventure remonte pourtant seulement au mois dernier lors du retour de ce natif de M’Tsapéré à Mayotte. Avec cette idée bien en tête : ouvrir un barbershop. Un lieu que fréquente chaque semaine à Paris Nahed Saidali. Et surtout inconnu au bataillon sur l’île aux parfums. Banco, l’opportunité fait mouche ! Une fois le local trouvé, les travaux s’enchaînent en un temps record. En moins de trois semaines et demi, l’adresse à deux pas de la mosquée du vendredi et du plateau sportif fait peau neuve. « On a voulu mettre en lumière un concept bien identifié, avec des vrais sièges de barbier, des coiffeurs habillés d’un tablier en cuir et de gants noirs pour créer cette ambiance et s’y fondre. » L’environnement intérieur, lui, plonge les curieux dans un univers à la fois personnalisé et épuré, en attendant l’aménagement mobilier expédié depuis Dubaï, « qui restera minimaliste ». Sa marque de fabrique ! Tout comme la musique, qui relate « une culture très urbaine, avec du rap français et américain ».
Un quartier « au fort potentiel économique »
Si Nahed Saidali réalise un rêve de gosse, lui qui bichonne ses frères et ses cousins à la maison depuis belle lurette, il voit en cette activité une moyen de redynamiser un quartier « en plein boom » et « au fort potentiel économique ». Une manière aussi de montrer l’exemple à l’égard d’une jeunesse parfois désoeuvrée qui côtoie la zone. D’ailleurs, le gérant doit retourner en métropole incessamment sous peu pour débuter son master en architecture et ainsi suivre les traces de son défunt père, à l’origine de l’entreprise Concept Architecture. « Le dessin joue un rôle essentiel dans les deux milieux », explique-t-il avec une pointe de philosophie. Son éloignement de plus 8.000 kilomètres n’effraie en aucun cas l’entrepreneur, bien au contraire. « Je vais pouvoir envoyer du matériel beaucoup plus facilement et surtout concrétiser des projets en cours de finalisation, comme l’utilisation de serviettes chaudes et la coloration. » Et une fois son diplôme en poche, Nahed Saidali n’aspire pas à faire de vieux os en Hexagone et compte bien revenir aussi sec dans le 101ème département, pour poursuivre son expansion. Avec pourquoi pas, un développement « d’ici deux ou trois ans dans le centre de Mamoudzou, à Combani ».
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