Depuis quelques semaines, la population s’inquiète d’un retour des coupeurs de route, particulièrement actifs dans l’île les trois dernières années. Depuis le mois de janvier, quatre faits ont été recensés dans le département, indique la gendarmerie, dont deux au début du mois d’avril, contre 20 l’an passé. Les cibles et les méthodes semblent évoluer.
Après l’embuscade tendue à deux scootéristes le 2 avril entre Coconi et Ongojou, dans le centre de l’île, et une autre le lendemain soir à Tsingoni, le spectre des coupeurs de route ressurgit et avec lui les mauvais souvenirs des années passées. Ces deux attaques dont les victimes sont ressorties dépouillées dans le meilleur des cas et tabassées dans le pire, portent à quatre le nombre d’agressions de ce type recensées depuis le début de l’année, indique le chef d’escadron François Bisquert, en charge des unités territoriales à la gendarmerie de Mayotte, contre 20 sur l’ensemble de l’année 2018. Des agressions violentes et imprévisibles qui « sont restées très ancrées dans les esprits », selon le chef d’escadron. Encore faut-il savoir ce que l’on entend précisément par « coupeurs de route ».
« Nous faisons bien la différence avec les barrages qui sont érigés, par exemple, pour réclamer un abribus ou pour dénoncer des retards dans les tournées des bus scolaires* et ceux de nos coupeurs de route, l’équivalent des +brigands+ de grand chemin du Moyen-Âge, et qui ne représentent pas un phénomène à proprement parler », indique le militaire. Depuis le début de l’année, seuls des conducteurs de deux-roues ont été la cible de coupeurs de route (une moto et trois scooters), alors qu’en 2018, parmi les vingts faits recensés, six attaques visaient des scootéristes et quatorze des automobilistes. Et avec le profil des victimes, ce sont aussi les techniques d’embuscade qui semblent évoluer : les agresseurs, par petite équipe de 5 ou 6 personnes, font souvent usage de parpaings, bouts de bois ou autres projectiles pour déséquilibrer les conducteurs et les contraindre à s’arrêter, mais lors des deux dernières attaques, ils ont utilisé de puissantes lampes torches afin d’aveugler les conducteurs.
Alerter le plus tôt possible
Si de nombreux guet-apens ne peuvent pas être évités, certaines modifications dans le comportement de la population tendent à limiter les risques : « les gens font de plus en plus attention, ils évitent de s’arrêter en route, et ils évitent de plus en plus de sortir la nuit », relève ainsi le gendarme. Aussi n’y a-t-il pas eu depuis le début de l’année d’attaques de couples « illégitimes » dont l’agression aurait pu être facilitée parce qu’ils stationnaient dans un endroit isolé et mal éclairé. En outre, si certains coupeurs de route parmi les plus violents ont pu être interpellés, à l’instar du fugitif M’déré, au terme de deux ans de cavale en décembre dernier, les arrestations demeures complexes et nécessitent de longues investigations. D’autant plus dans la mesure où les victimes attendent souvent un certain temps avant de faire appel aux forces de l’ordre. Dépouillées de leur téléphone et laissées sur le bord de la route, elles ne peuvent souvent donner l’alerte que le lendemain ou le surlendemain des faits, ce qui laisse amplement le temps aux malfaiteurs d’aller se cacher. Il faut donc, dans la mesure du possible, appeler « au plus vite » la gendarmerie insiste François Bisquert, et ce, quelque soit l’heure du jour ou de la nuit, car « des équipes PAM (Premiers à marcher, désignés pour 24 heures, ndlr) sont toujours là pour intervenir ».
*En janvier dernier, une dizaine de lycéens avaient formé un barrage sur le rond-point de Tsararano pour réclamer un abribus. Ils dénonçaient notamment l’absence d’infrastructures en cette saison des pluies.
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