C’est désormais officiel : l’insécurité à Mayotte, si on en doutait encore, s’aggrave. Vendredi soir, le préfet Seymour Morsy, le procureur de la République Joël Garrigue, le commissaire Miziniak, le colonel de gendarmerie Jean Gouvart, et le reste de l’état major de sécurité, avaient réuni la presse pour annoncer les chiffres de la délinquance 2015. Sans surprises, ils sont “Catastrophiques”, comme le reconnaît Joël Garrigue. Un constat partagé par tous. Sur tout le département, zone police et gendarmerie réunies, les hausses sont très marquées par rapport à 2014 : +19 % pour les atteintes aux biens, +50 % sur les atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes, et % 51 % sur les escroqueries. Une nuance à apporter toutefois, chaque délit pouvant se retrouver dans plusieurs de ces trois catégories, la délinquance a augmenté de 15,8 %. Des chiffres “Comparables avec ceux d’un département métropolitain de taille équivalente”, expliquait le préfet Seymour Morsy, “Mais avec des infractions beaucoup plus violentes chez nous.”
23 % de hausse à Mamoudzou
À Mamoudzou, l’ensemble des infractions a augmenté de 23 %. Un seul point positif : les cambriolages sont en baisse de 3 %, “Grâce à la réactivité de nos services”. Pour le reste, les chiffres sont eux aussi éloquents : les violences crapuleuses passent de 348 faits constatés en 2014, à 675 en 2015. Soit une hausse de 100 %. Le commissaire nuance toutefois : “Il s’agit essentiellement de vols à l’arraché de téléphones portables. Il faut réellement être méfiant en sortant son téléphone dans la rue”, reprenait alors le responsable de la police. Même constat dans le reste de l’île, où ces violences crapuleuses augmentent de 62 %. En cause notamment, selon le colonel de gendarmerie Jean Gouvart : “Les bagarres entre villages, que l’on a longtemps eu tendance à légitimer, mais qui sont de plus en plus courantes et de plus en plus violentes aujourd’hui.” D’une manière générale, le colonel concède qu’il est temps de comprendre les raisons sociologiques de ces violences : “Il est désormais temps d’avoir une réflexion de fond, pour comprendre la délinquance de l’île.”
La chimique en cause
Si les chiffres augmentent autant, une raison est particulièrement mise en avant : l’arrivée de la chimique. Comme l’explique le procureur Garrigue, “Les chiffres étaient stables jusqu’en 2013,et augmentent brutalement ensuite, au moment l’arrivée de la chimique dans l’île.” Pas encore considérée comme stupéfiant du fait de la méconnaissance de certaines de ces molécules, il est encore difficile de lutter efficacement contre cette drogue. Il faut alors utiliser une base juridique différente : “Produit dangereux” ou “Exercice illégal de la médecine”, par exemple, au lieu de “Trafic de stupéfiants.” Pourtant, “Il s’agit d’une vraie drogue dure, qui n’a rien à voir avec le cannabis par exemple, qui provoque effets de manque et les violences qui vont avec”, reprend Joël Garrigue. Cette drogue qui se répand sur l’île arrive le plus souvent par courrier postal, en provenance de Chine. Pour autant, sont régulièrement saisies de “Petites quantités, mais de manière régulière.”
Une mission dans les prochaines semaines
Enfin, les violences scolaires, nombreuses ces derniers temps, ont évidemment étaient abordées : “Elles sont le plus souvent importées de l’extérieur des établissements”, précisait Denis Couture, du vice-rectorat. Seuls moyens pour lutter contre, de fait : la création de 45 postes de surveillants supplémentaires dès la prochaine rentrée, des équipements de vidéosurveillance qui devraient continuer à se développer dans les établissements, et la mise en place de clôtures. Afin d’endiguer ces hausses, une mission de l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale et de la police devrait arriver à la fin du mois de février pour déterminer les moyens à mettre en oeuvre et la meilleure façon de lutter contre cette délinquance qui entache Mayotte jour après jour. Du côté des moyens humains, ce sont 42 gendarmes supplémentaires et l’arrivée du GIGN qui sont mis en avant : “On me demande souvent ce que le GIGN vient faire ici. C’est une unité d’élite qui adaptera ses missions au terrain Mahorais. C’est une chance”, justifiait le préfet Seymour Morsy. Pour finir, le procureur Joël Garrigue soulignait tout de même l’accroissement de l’activité judiciaire, “Grâce au fort engagement des forces de l’ordre et à une meilleure occupation du domaine public.”
Geoffroy Vauthier
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