Emblématique à Mayotte, le mbiwi est dorénavant inscrit à l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel. La reconnaissance pour cet art musical et chorégraphique féminin a été attribuée au mois de juin dernier par le comité du patrimoine ethnologique et immatériel, réuni à Paris.
Une fiche a été rédigée par Elena Bertuzzi, anthropologue et chorégraphe, qui a bénéficié de la participation et du témoignage de nombreuses pratiquantes du mbiwi. D’après cette fiche, il est reconnu comme « un art musical et chorégraphique féminin du patrimoine immatériel mahorais ». Selon la classification, ce patrimoine immatériel peut être classé dans les domaines des pratiques sociales, rituels et événements festifs, mais aussi dans les arts du spectacle et le savoir-faire lié à l’artisanat traditionnel.
Un instrument fabriqué à base de bambou
Le mbiwi représente deux bâtonnets en bambou, utilisés comme instruments de percussion en les faisant s’entrechoquer, qui ont alors donné leur nom à cette pratique. « Il anime par excellence les cérémonies de mariage. Le mbiwi en ponctue les différentes étapes : de la remise d’argent et de cadeaux, à l’accompagnement du marié vers sa nouvelle demeure familiale le dernier jour des festivités des noces », peut-on lire dans la fiche réalisée par Elena Bertuzzi. Afin de créer une belle mélodie, l’idée pour les adeptes de cet art, est de travailler collectivement pour créer un rythme agréable et exaltant.
Le terme désigne, certes, les bâtonnets, mais aussi la danse, la musique, la cérémonie et le cadre social à l’intérieur duquel « se déroulent ces performances musico-chorégraphiques », ajoute l’anthropologue. Connu pour agrémenter les cérémonies de mariage, il peut se dérouler pour d’autres occasions, comme des rencontres, des concours ou des manifestations d’intérêt public ou social. « De manière générale, les spectacles de mbiwi sont des moments de convivialité et d’échanges à travers des animations musicales et chorégraphiques. » Une quinzaine de personnes peut suffire, mais il existe aussi des groupes beaucoup plus importants, pouvant compter une soixantaine de membres, voire plus.
Une danse et du défi
La danse suit le déroulement du chant. Elle est effectuée par deux femmes, qui se tiennent debout et face à face. A travers cette danse, les femmes se mettent à l’épreuve. « Il y a toujours du défi, de l’effort, de la résistance à la fatigue, du dépassement de soi », relève la rédactrice de la fiche. C’est une danse qui mobilise principalement le bassin et les hanches dans un mouvement qui doit être aussi rapide que possible. Elle se déroule de façon bienveillante, et ne peut être réalisée individuellement. C’est l’aisance, la rapidité ou encore le charme que les femmes souhaitent démontrer.
Pour beaucoup, le mbiwi fait partie intégrante du patrimoine culturel mahorais. Cet art se transmet de génération en génération. Les femmes qui le pratiquent ont vu leurs mamans ou leurs grandes sœurs le pratiquer et elles continuent à entretenir cette tradition. « Ça vient tout seul, à force de regarder les autres. Pour danser, on écoute le rythme. Si le rythme n’est pas bon, on ne peut pas danser. Ce sont les mbiwis qui font danser », explique Anymati, pratiquante de mbiwi, dans la fiche d’inventaire. Observation et mimétisme sont alors le secret de l’apprentissage de la danse et des chants.
Emblématique à Mayotte, il est une réelle institution. Instrument très populaire sur l’île, il peut également être acheté comme souvenir touristique ou cadeau. Depuis quelque temps, ce dernier est également utilisé comme un objet de décoration. Une dynamique s’est récemment mise en place, visant à sensibiliser à l’importance de préserver la culture locale.