Les artistes et intermittents du spectacle ne peuvent, à Mayotte, prétendre au statut juridique spécifique pourtant de vigueur en métropole, du fait de l’application tardive du droit du travail dans le 101ème département. Une situation qui complique encore un peu plus l’avenir de ces professionnels, souvent écartés des décisions politiques.
Une fois encore, ils ont été oubliés. La semaine dernière, le gouvernement annonçait déployer un arsenal de mesures économiques pour les entreprises et associations métropolitaines et ultramarines qui pâtiraient du confinement. Un ouf de soulagement pour certains, un regain d’inquiétude pour une poignée d’autres, et plus particulièrement pour les intermittents du spectacles et artistes du 101ème département, le seul de France où aucun statut juridique dédié n’existe encore à ce jour. En d’autres termes, à Mayotte, les professionnels de la scène ne pourront pas prétendre aux dispositifs exceptionnels de l’État, alors même que toute leur activité économique est laissée en suspens, puisque tous les événements prévus doivent être reportés à une date encore inconnue.
En réaction, le collectif des Arts Confondus – créé il y a un an et demi pour défendre à l’échelon local et national les droits des professionnels des arts vivants – a décidé de recenser un maximum d’acteurs du milieu et leur impact économique, dans l’espoir d’obtenir plus de soutien. Pour l’heure, dix-sept structures pour une soixantaine d’emplois permanents se sont déjà manifestées. “On commence à avoir quelques retours de l’État, qui nous a promis que les subventions seraient maintenues coûte que coûte”, témoigne Sophie Huvet, directrice de Hip-Hop Évolution et instigatrice de l’initiative. “Mais rien concernant le Département, et encore moins le secteur privé, dont dépendent plusieurs structures culturelles”. Et pour l’heure, la collectivité n’a pas donné réponse concernant les nouvelles demandes de financement.
Un manque à gagner dans tous les domaines
“Clairement, les associations culturelles ont été négligées”, s’inquiète Sophie Huvet, toutefois reconnaissante envers la Cress qui s’est proposé de participer au versement du chômage partiel des professionnels du milieu. “Et qu’on parle de dix ou de cent emplois, les personnes qui vivent [du spectacle] ne toucheront pas leur rémunération.” Sans compter les contrats à durée déterminée, recrutés pour l’accueil et la billetterie notamment, lors d’événements ponctuels tous reportés du fait du confinement. Un manque à gagner également pour les entreprises de la restauration, du transport ou de la location de matériels. “Il y a aussi les ingénieurs du son, les techniciens, les costumiers, etc.”, égraine encore la directrice de l’association Hip-Hop Évolotuion. “Et puis il y a les petites associations qui fonctionnent essentiellement sur le bénévolat…” Un bénévolat mis entre parenthèses à l’heure où chacun doit rester chez soi.
Aux origines de cet imbroglio, l’application du droit commun à Mayotte et surtout, ses limites. En métropole, tout artiste ou technicien des arts de la scène peut prétendre au statut d’intermittent du spectacle et par conséquent, accéder à des droits et des régimes sociaux conçus selon les spécificités du métier. Un dispositif qui encadre également l’accès à la formation ou à des congés spécifiques selon une convention nationale, décidée avant que l’île ne bascule sous le régime de la départementalisation. Depuis plusieurs années, les professionnels des arts vivants à Mayotte militent pour qu’enfin, le territoire soit intégré dans ces textes. Problème : “Pour ça, il faut rouvrir des négociations avec les syndicats nationaux,”, résume Sophie Huvet. Une démarche qui pourrait potentiellement permettre au gouvernement de se rétracter concernant certains acquis. “Nous, ce
qu’on propose, c’est de simplement rajouter Mayotte sans nouvelle négociation, mais même si on le faisait, notre accès à la Sécurité sociale ou à Pôle Emploi ne serait pas le même”, ces structures étant localement à leurs balbutiements.
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