Se loger, construire (produits et règlements adaptés au territoire), financer le logement (définition d’un modèle à renouveler) sont autant de défis à relever pour les acteurs du bâtiment mahorais. Sous la houlette du Medef, la FMBTP et de la Fedom, un séminaire autour de ces questions a réuni, ce lundi matin à Kawéni, entreprises, organisations professionnelles et pouvoirs publics.
Une première pour Mayotte, la Fedom (Fédération des entreprises d’outre-mer) la FMBTP (Fédération mahoraise du bâtiment et travaux publics) et le Medef (Mouvement des entreprises de France) avaient invité un parterre de représentants d’institutions diverses et des entrepreneurs à un séminaire consacré à la construction et au logement sur le territoire. Un événement qui s’est tenu dans l’une des salles du restaurant L’Orient express à Kawéni, ce lundi matin. Dans son introduction, Carla Baltus, la présidente du Medef Mayotte, s’est félicitée de pouvoir « parler des difficultés rencontrées par les entreprises locales du BTP, en présence d’autres acteurs socio-économiques de l’île, pour faire émerger toutes les solutions permettant de sortir un maximum de logements au profit de la population, et d’une manière plus générale, des salariés des entreprises locales, en cernant l’ensemble des difficultés rencontrées ». Elle constate qu’on ne peut pas refaire le passé et que le prix des échecs précédents sont supportés de manière collective. Ce lundi matin, la primauté était à la recherche des outils (certains étant encore au stade de balbutiements). « Nous essayons d’avoir les acteurs qu’il faut pour essayer d’avancer tout simplement », soutient-elle.
Sur les problèmes rencontrés justement, Julian Champiat, le président de la FMBTP, n’a pas exclu celui d’un foncier pas toujours simple à maîtriser et qui peut provoquer « d’importants retards ». « Encore une fois, l’objectif recherché est de pouvoir mettre tous ces gens autour d’une table afin de ne plus pouvoir faire semblant d’être surpris au moment de lancer les projets. » Ce dernier se félicite de la chance pour Mayotte de disposer d’un tissu économique très réactif. « On est capable de s’arrêter quand on est forcé et de repartir aussi vite. » Le chef d’entreprise estime qu’il revient au secteur du BTP de se restructurer le plus vite possible pour pouvoir répondre aux besoins du territoire en matière de construction. Selon lui, si le secteur arrive à s’affranchir des sujets ci-dessus énumérés, il sera en mesure d’assumer ses responsabilités pour pouvoir répondre à la demande. « Pour cela, nous avons besoin de pouvoir se projeter sous réserve de l’existence de programmations, avec le nombre de chantiers, de projets, que ce soient les logements sociaux qui représentent une très grosse part de l’activité à venir ou que ce soient des établissements scolaires, les projets structurants tels que la piste longue, le contournement de Mamoudzou par les hauts ou encore le Caribus qui est en cours. Il nous est indispensable de disposer de plannings précis afin que nous puissions nous adapter », fait-il remarquer.
Aller au bout de la démarche
Seule personnalité politique de l’île à avoir participé à cette rencontre, Hamidane Magoma, adjoint au maire de Mamoudzou en charge de l’aménagement, s’est réjoui de la tenue de ce séminaire qu’il n’a pas hésité de qualifier de bonne chose qui permettra à Mayotte de bien s’organiser. « La commune de Mamoudzou est sujette à tous les problèmes évoqués et il était important pour moi d’examiner les différentes possibilités de dépasser tous ces freins, en particulier les aspects régularisation foncière et la disponibilité du foncier support indispensable à tout développement », fait-il remarquer. Celui-ci s’est attardé sur les réglementations en vigueur, estimant que les outils actuellement à la disposition de Mayotte ne sont plus adaptés. Il pointe du doigt un panel de critères techniques qui n’ont pas lieu d’être car inapplicables au trois-quarts de la population mahoraise. « Au sein de la commune de Mamoudzou, nous avons initié un projet de reconquête foncière dans le but d’identifier les différents types de parcelles existant dans notre périmètre. Des propositions ont été émises par les différents intervenants à cette opération et la difficulté principale à laquelle nous faisons face actuellement réside dans la mise en œuvre des actions nous permettant d’aller jusqu’au bout de cette démarche », admet-il.
Animateur du premier atelier de travail de ce séminaire intitulé « Se loger à Mayotte, l’habitat au service de la population », Dominique Tessier, sociologue du logement et directeur du CAUE (conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement) 976, a relevé que la question du logement sur l’île constitue une pression co-existentielle du développement de l’île. Il a soulevé l’existence d’une population très largement en situation de précarité pour laquelle il convient d’apporter des réponses. « On constate que, depuis 2010, Mayotte produit des logements d’une certaine façon (béton banché, béton avec du parpaings), sans pour autant atteindre la performance nécessaire, en sachant que dans les années 1980 à 1990, l’île était capable de sortir un chiffre de 1.000 logements par an. Aujourd’hui, nous sommes encore très loin de ce niveau ce qui nous amène sur une réflexion visant à nous interroger sur qui produit le logement et comment il le produit ? Est-ce une chose réservée à de gros terrains et à de grandes entreprises ou est-ce une multitude de petits terrains et d’artisans qui vont développer ce logement et avec quel moyens de construction, béton, brique se terre compressée, bambous, bois, etc… ? », demande-t-il à son audience.
Choisi pour lancer cette matinée de réflexion sur la construction de logements à Mayotte (et dans les autres outre-mer), l’ancien ministre Hervé Mariton, actuellement président de la Fedom, a suivi par visioconférence avec beaucoup d’attention les différentes interventions au cours de ce séminaire. Son intervention a cependant été peu audible en raison de difficultés de connexion.