Mayotte, un diamant qui reste brut

Etant l’un des six points primordiaux de la précédente mandature du Conseil départemental, l’attractivité du territoire aurait dû s’accroître ces dernières années. Mais, entre un manque criant de tourisme et des fonds publics dépensés en métropole, le 101ème département français devra attendre pour améliorer son image. Et son développement.

Venez découvrir Mayotte la magnifique ! Située à quelques kilomètres de l’île de La Réunion, l’île aux parfums possède l’un des plus beaux lagons du monde, d’exceptionnelles forêts verdoyantes, des plages de sable fin… Et aucun touriste. Si les élus locaux adorent déplorer la délinquance, empêchant les voyageurs de prendre leurs billets pour Mayotte, ou l’absence de piste longue, les privant d’y poser leurs valises, leur responsabilité existe bel et bien. Pour « accroître l’attractivité du territoire« , le Conseil départemental de 2015 prévoyait tout d’abord un énième schéma, abordant la « planification de la politique immobilière du département« , qui devait démarrer au premier semestre de l’année 2016. Les actions, elles, sont trop rares, laissant l’amère impression que les intercommunalités proposent plus d’initiatives en faveur du tourisme que le Département et son Comité du tourisme, trônant sur la place de la République de Mamoudzou.

Des projets de transport sur les rails

Les anciens élus du département de Mayotte pourront néanmoins se féliciter d’avoir participé à l’inscription du lagon mahorais au patrimoine mondial de l’UNESCO. Malheureusement, cette dernière n’a pas eu lieu, du moins pas encore. Peu de choses sont à reprocher au CD sur ce terrain, qui a défendu son lagon en tenant nombre de réunions et multipliant les soutiens, à l’image du député européen de La Réunion, Younous Omarjee. Rien n’y a fait. Rien, c’est aussi le résultat des six années du CD dans le domaine des transports. Suivant un « schéma régional des infrastructures et des transports » issu de la précédente mandature, l’équipe de 2015 ambitionnait de faire émerger un réseau de transports en commun. L’absence de ce dernier pourra être apprécié par les conducteurs bloqués chaque jour dans les embouteillages de Mamoudzou.

En dehors du chef-lieu, des liaisons maritimes avaient aussi été envisagées par le Conseil départemental. Trois gares maritimes devaient en fait être construites, afin de proposer des lignes de bateau Longoni – Mamoudzou et Mamoudzou – Iloni, ce qui aurait sans doute désengorgé les routes de la région. Tout comme la voie de contournement de Mamoudzou et le pont Grande Terre – Petite Terre, déjà évoqués au début de ce dossier. Il est difficile de ne pas associer à ces échecs ceux du pôle multimodal de Mamoudzou, demeurant au statut de projet, et du Caribus, porté par la Communauté d’agglomérations Dembéni – Mamoudzou, pour une population qui n’a comme alternative à la voiture… Les taxis.

L’illusion du treni bilé, quant à elle, est bien l’œuvre du Département. En consacrant des centaines d’heures à ce projet, jugé impossible par nombre d’observateurs, les élus décrédibilisés se sont attiré les railleries de leur population. Enfin, l’aéroport international de Dzaoudzi, que Soibahadine Ibrahim Ramadani voulait « plateforme régionale d’accueil des touristes européens et internationaux« , long est encore le chemin, pour ne pas dire la piste.

12 millions pour un bâtiment à Paris XVI

C’est un fait, Mayotte a du mal à rayonner, à l’international comme en métropole, où la plupart de nos compatriotes ne sauraient même pas situer l’île sur un planisphère. Ce n’est pourtant pas faute d’y avoir mis les moyens. Début 2019, le Conseil départemental déménage sa Délégation de Mayotte à Paris dans le luxueux 16ème arrondissement, achetant pour l’occasion un ancien hôtel pour la modique somme de 12 millions d’euros. Une dépense de fonds publics à 8000 kilomètres de Mayotte qui passe mal, y compris dans les rangs du Conseil départemental. « Depuis notre élection, notre investiture, il n’y a pas d’investissements en termes d’aménagement, zéro investissement, rien, nada… » enrageait à l’époque Bichara Bouhari Payet, élue de Dembéni. Il y aura au moins eu ce déménagement, dans un bâtiment plus prestigieux qu’aucun autre à Mayotte, ce qui peut en dire long sur les élus locaux.

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Le Conseil départemental veut aussi briller sur le plan international, et qui d’autre que les voisins de Mayotte dans la région pour nouer des liens ? Le Plan de mandature 2015-2021 évoque en effet une coopération avec le Mozambique, la Tanzanie, Madagascar et les Comores. Ces relations d’ordre économique, culturel, sportif et scientifique devaient être financées par les fonds du Programme Opérationnel de Coopération Territoriale (POCTE). Les résultats sont en revanche trop insignifiants pour affirmer que ces fonds furent bien utilisés. Quant à l’intégration de Mayotte à la Commission de l’Océan Indien, elle n’est toujours pas d’actualité, malgré le désir du président de l’époque de mener à bien cette mission. Mayotte la magnifique restera donc, pour le moment du moins, ce diamant brut que ses dirigeants ont bien du mal à polir.

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