Pour l’ouverture de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, un séminaire était organisé, ce lundi, au pôle culturel de Chirongui. Une table-ronde était dédiée à la question de l’accès au logement adapté et à l’autonomie. Une véritable galère pour les demandeurs alors que les domiciles adaptés manquent sur le territoire et les aides existantes ne sont pas connues.
Aujourd’hui en fauteuil roulant, Abdallah se sent profondément démuni. « J’habite dans une maison qui n’est pas adaptée, je ne peux pas aller seul aux toilettes », raconte-t-il. Il souhaite savoir quelles sont les démarches à suivre pour obtenir un logement fonctionnel. Cet habitant s’est rendu au séminaire de lancement de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées au pôle culturel de Chirongui, ce lundi 18 novembre. Une table ronde était organisée sur l’accès au logement adapté et à l’autonomie. Première observation ; les domiciles à Mayotte ne sont pas du tout adaptés, « dans les maisons, il y a des marches même quand il n’y en a pas besoin », ironise Zakia Siaka, directrice de l’aménagement à la communauté de communes du sud (CCSud). « Aujourd’hui, la communauté de communes ne dispose pas de viviers de logements neufs », convient-elle. « Le retard sur les habitations est important à Mayotte, il y a besoin d’en construire 7.000 dans le sud. L’enjeu est colossal alors qu’il est difficile pour la Société immobilière de Mayotte de sortir 500 logements par an », diagnostique-t-elle.
Partant de ce constat, à court terme, la collectivité a pris le parti de soutenir plutôt « l’amélioration du bâti et d’adapter le domicile existant ». Des aménagements peuvent par exemple être réalisés avec une mise aux normes électrique, de plomberie, d’isolation. Il est aussi possible de rapprocher les sanitaires alors qu’il est encore fréquent qu’ils soient à l’extérieur notamment dans les premières habitations de la Société immobilière de Mayotte (SIM), ou encore d’aménager une douche à l’italienne ou une barre pour s’agripper pour éviter les chutes.
« Les moyens financiers sont insuffisants »
La principale difficulté reste le financement. Abdallah a besoin de trouver une solution en urgence par exemple. « J’ai loué un logement parce que je ne pouvais pas vivre chez moi, du coup, je paie une fortune avec mon loyer, comment faire ? ». Il a fait une demande à la SIM, restée sans réponse. Des dispositifs existent néanmoins, notamment Ma prim adapt’, qui offre une prime plafonnée à 22.000 euros pour financer les travaux d’adaptation. Une somme calculée selon les revenus. La demande doit être faite auprès de la direction à l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer (Dealm), avec par contre, un parcours administratif long pour en bénéficier. Il y a aussi possibilité de faire une demande auprès d’Action logement, installé place Mariage à Mamoudzou.
« Les besoins sont là, mais les moyens sont insuffisants », déplore la cadre de la CCSud. Aujourd’hui, il faut additionner les financements en allant chercher les subventions de l’Etat, du conseil départemental de Mayotte, etc. « Il faut augmenter les taux pour éviter de combiner les financements recueillis ici et là », estime la directrice de l’aménagement, qui plaide pour la création d’un guichet unique.
« L’urgence » de rendre les bâtiments publics accessibles
La semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH) est organisé par l’État via la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Deets), mais aussi avec les acteurs locaux et la communauté de communes du Sud (CCSud). Pour lancer la 28ème édition de cet événement, Laurent Alaton, le sous-préfet chargé de la cohésion sociale et référent handicap, a fait un état des lieux de la situation sur le territoire. « Après avoir travaillé à Mayotte entre 2006 et 2009, et en étant revenu en 2024, quel bond a été fait. Il y a quinze ans, les personnes en situation de handicap étaient cachées. Aujourd’hui, elles revendiquent leur place dans la société, dans les transports, dans l’emploi », s’exclame-t-il. Il a aussi développé les axes d’amélioration. « Mayotte manque d’un cap emploi pour faciliter le recrutement de cette partie de la population ». Le sous-préfet considère qu’avant de parler du monde du travail, une réflexion doit être menée sur toute la chaîne, au domicile mais aussi dans les transports. « Une urgence demeure », selon lui, celle d’améliorer l’accessibilité des locaux. En 2023, un fonds dédié a été ouvert par l’État doté de 300 millions d’euros pour accompagner d’ici 2028 les commerces, restaurants, cabinets médicaux, hôtels dans leur mise en accessibilité. Sur l’île, le compte n’y est pas du tout, ce qui conduit Laurent Alaton a poussé « un cri de colère », ce lundi. Si ce n’est pas fait, « des amendes seront mises en place », glisse-t-il.
Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.