Cela fait huit mois que les travaux de construction de l’hôtel Ibis à Mayotte ont commencé. Avec ses 3.000 mètres carrés, ses 80 chambres et ses trois étoiles, l’hôtel marque un nouveau départ pour le développement du 101ème département de France. Mais pour la société Makinen Suisse, en charge du projet, il reste encore beaucoup à faire. L’entreprise signe son premier contrat sur le territoire et doit composer avec les difficultés qui sont liées à l’île. Luigi Chiantella le directeur général du groupe, de passage à Mayotte, et Remus Jitaru directeur de Makinen Mayotte nous ont ouvert en exclusivité les portes du chantier du prochain hôtel Ibis Style.
Flash Infos : Votre société Makinen Suisse fait ses premiers pas à Mayotte. Qu’avez-vous réalisé avant ?
Luigi Chiantella : La société existe depuis 1995. On est basés en Suisse mais on travaille principalement dans les pays d’Afrique. On a construit beaucoup d’hôtels, on travaille avec les chaînes hôtelières et c’est comme cela que nous avons développé l’entreprise. On a notamment construit un Sofitel. Le projet de Mayotte est le cinquième hôtel Ibis que nous faisons dans le monde, Ibis nous connaît !
Notre stratégie n’est pas de travailler en Europe parce qu’il y a beaucoup de concurrence. Nous avons les capacités de travailler loin, en Afrique ou dans les îles. On cherche des endroits en développement ou un peu compliqués, là où tout le monde ne peut pas venir. Nous avons fait le Tchad, le Rwanda, l’Ouganda, l’Ethiopie etc.
FI : Depuis peu, vous avez créé une branche de votre entreprise à Mayotte. Pensez-vous vous installer dans le département ?
L.C : Au départ, nous ne sommes venus que pour cet hôtel mais ensuite nous avons vu une possibilité de travailler sur place et nous avons créé une structure locale de droit français avec des employés mahorais et métropolitains. 50% sont de Mayotte et 50% viennent de l’Hexagone.
Remus Jitaru : Nous essayons d’embaucher le maximum de Mahorais mais la quantité de travail est conséquente et il n’y a pas assez de techniciens ici. Nous sommes obligés de les importer depuis la Métropole. Il nous manque des employés dans tous les domaines, il nous faut des gens qualifiés. Actuellement nous avons trente personnes sur le chanter mais il faudrait que nous soyons une quarantaine pour être plus efficaces. Un projet de cette envergure en Afrique aurait mobilisé 80 à 120 personnes.
FI : Faire venir les employés depuis la Métropole est-il rentable pour vous ?
L.C : Les employés que nous faisons venir nous coûtent plus cher parce que nous devons leur payer le billet d’avion, la nourriture et le loyer pour certains, mais c’est normal.
R.J : Ils nous coûtent plus cher, mais leur déplacement est rentable parce qu’ils travaillent plus rapidement et nous font gagner du temps. Ils sont plus productifs et cela nous permet de respecter nos délais.
FI : Est-ce réellement la solution la plus pérenne ?
L.C : Non, mais pour l’instant nous n’avons pas le choix. Il faut former les jeunes d’ici aux métiers du BTP. Ce ne sont pas des métiers moins satisfaisants, moins payés ou moins intelligents que les autres. Si nous voulons tous rester dans les bureaux, qui va construire ? Les gens ne savent pas qu’un électricien, un plombier, un maçon, est parfois mieux payé que quelqu’un qui travaille dans un bureau.
FI : Comment se passe la réalisation des travaux depuis la pose de la première pierre en octobre 2020 ?
L.C : Les travaux ont réellement démarré en février 2021. Pour l’instant nous sommes dans les délais et nous pourrons livrer le chantier à temps, c’est-à-dire en juin 2022. Nous devons donner un produit presque prêt à être utilisé. La seule chose que nous ne faisons pas c’est l’achat du mobilier, mais nous nous occupons de tout jusqu’à la décoration.
FI : A quels types de difficultés faites-vous face ?
R.J : La première difficulté c’est le transport. Mais c’est surtout lié à la crise qui touche le monde entier. Cependant nous ne sommes qu’à notre premier essai et nous savons prévoir les difficultés, anticiper les choses. Presque tout notre matériel est sur place.
FI : Quelle sera la suite pour vous, une fois que ce projet de l’hôtel Ibis sera fini ?
L.C : Nous en avons déjà d’autres à Mayotte. Il n’y a pas beaucoup d’entreprises de BTP sur l’île. Il y a certes Colas mais c’est une entreprise énorme et nous ne rivalisons pas parce que nous ne pouvons pas faire ce qu’ils font et ils ne peuvent pas faire ce que nous faisons. On se place entre les grands et les petits, nous faisons des chantiers entre 5 et 40 millions d’euros. Colas s’intéresse aux marchés de 100 millions. Nous avons aussi créé une société à La Réunion et pour l’instant, nous n’avons pas l’intention de partir. Nous sommes là et nous allons rester.
FI : Lorsque vous avez gagné l’appel d’offre de l’hôtel Ibis, cela a fait grincer des dents. Selon vous, qu’est-ce qui a fait la différence entre vous et les autres entreprises qui se sont manifestées ?
L.C : Nous avions des prix compétitifs, ce n’est pas négligeable. Mais je pense surtout que c’est parce que nous avions une offre qui couvrait tous les aspects de la construction. C’est une solution plus facile et plus sûre pour le client (Eden Island).
R.J : L’avantage avec nous, c’est que nous sommes le seul interlocuteur de notre client. Ici c’est courant de voir dans un chantier plusieurs entreprises qui travaillent et c’est un vrai casse-tête. Avoir un seul interlocuteur coûte moins cher pour le client. Et puis je pense que l’avenir de Mayotte c’est permettre à d’autres entreprises de travailler aussi sur l’île. Le territoire ne peut pas se renfermer sur soi-même. La concurrence est bénéfique !