Ancien préfet de Mayotte, Denis Robin est de retour sur l’île en tant secrétaire général de la Mer, une fonction servant à coordonner la politique maritime du gouvernement français. En compagnie d’acteurs locaux du secteur de la mer, ce mercredi, celui qui a oeuvré à la départementalisation a assisté à l’une des premières réunions de travail du cluster maritime mahorais (CMM).
Flash Infos : Quelle est la raison de ce retour à Mayotte cette semaine ?
Denis Robin : Il n’y avait qu’à Mayotte où il n’y avait pas de cluster maritime. C’est fait, depuis au moins un mois. Avec le président du cluster maritime français, nous avions promis au président de celui de Mayotte (N.D.L.R. Norbert Martinez, à la tête également de l’Union maritime) de venir rencontrer les entreprises. C’est ce que nous avons fait aujourd’hui.
FI : Qui peut intégrer ce CMM ?
D.R. : c’est un lieu où les entreprises se rencontrent, débattent et construisent ensemble des projets autour du maritime. Il y a plein de filières, le transport, les chantiers, la pêche, la plaisance, le tourisme. Elles ne peuvent se développer que si elles ont une vision commune. Deuxièmement, ces filières ont besoin d’aide, d’un accompagnement par les pouvoirs publics comme le conseil départemental et les services de l’État. Le cluster devient l’interlocuteur des filières de ces derniers pour fédérer les énergies.
FI : Quelle importance a le port de Longoni dans ce cluster ? Les relations compliquées entre Ida Nel (PDG de « Mayotte Channel Getaway » qui gère le port) et Norbert Martinez ont-elles une incidence ?
D.R. : Le port est l’outil dont nous avons besoin pour que les filières maritimes se développent de façon harmonieuse à Mayotte. Si celui-ci dysfonctionne ou si les relations ne sont pas bonnes entre le port et les acteurs économiques, ça ne peut pas marcher. Donc il faut régler cette question. Le port étant une compétence départementale, je m’en entretiendrai [jeudi] avec le président du CD. Nous avons un intérêt majeur à retrouver un fonctionnement harmonieux du port.
FI : Et sur la possibilité qu’un jour il obtienne le statut de grand port maritime ?
D.R. : Les acteurs économiques, le CMF et moi n’interviennent pas sur la forme que doit prendre la gestion du port. Qu’il soit géré par les services publics ou confié à un acteur économique par une délégation de service public, nos interlocuteurs ne se prononcent pas. Ils disent qu’après tout, c’est à l’autorité portuaire d’en décider. Tout ce que nous voulons, c’est que le port fonctionne. Et qu’il fonctionne à des coûts économiques convenables. Cette question de la forme n’a pas été beaucoup débattue.
FI : Sur quels autres sujets le CMM peut-il intervenir ?
D.R. : Le cluster maritime doit porter des ambitions collectives dans plein de domaines. Par exemple, il y a le sujet de la décarbonation de l’économie maritime, que ce soient les bateaux, les ports ou le transport maritime. Le cluster maritime, en relation avec les administrations de l’État, porte cette ambition et permet l’émergence de solutions un peu nouvelles, que chaque filière dans son coin n’aurait pas forcément trouvé.
FI : L’environnement a-t-il été abordé justement lors de la réunion ?
D.R. : Nous l’avons abordé, mais ce n’est pas une question traitée par les clusters maritimes. Ils sont avant tout économiques. Mais sur ce point, j’étais un peu triste en revenant à Mayotte, après quatorze ans d’absence, de voir qu’il y avait toujours autant de plastique sur les plages, dans les mangroves. Le problème avec cette pollution, c’est que quand elle arrive en mer, il est déjà trop tard. Il faut traiter le sujet en amont.
Le cluster mahorais, le petit-dernier de l’Outre-mer
Créée en 2006, le cluster maritime français se décline sur plusieurs territoires, notamment en Outre-mer. « La Réunion était le premier de mémoire. Mayotte est le petit-dernier », rappelle Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président du cluster maritime français (CMF). Il prévient toutefois que ce n’est pas lui qui décide de cette création. « Un cluster ne peut marcher que si les acteurs du territoire sont d’accord pour se regrouper. C’est d’autant plus difficile si le territoire est petit, car quand les gens se connaissent, c’est plus difficile de les faire travailler ensemble », continue le président. Concernant la réunion, il confirme que des sujets comme la pêche, la formation, l’attractivité des métiers, le tourisme et l’environnement ont été abordés. « Au bout d’un mois, on ne peut pas dire : « voilà, ce qu’on va faire ». Mais les gens commencent à se connaître et à prioriser leurs thèmes de travail », prévient-il.