Huitième jour de manifestation contre l’insécurité. Le mouvement s’est à nouveau traduit par la mise en place de barrages routiers. Aucun incident n’a été constaté par les forces de l’ordre. Les barges ont fonctionné au ralenti. La grève générale se poursuit ce vendredi.
On prend les mêmes et on recommence. Les actions menées jeudi, au huitième jour de grève générale contre l’insécurité, s’apparentaient au mode opératoire de la veille. Cinq barrages étaient dressés dès l’aube à Chirongui, Chiconi, Coconi, Miréréni et Bouyouni, tenus par au moins 300 manifestants, selon la gendarmerie. Ceux érigés à Chirongui et Chiconi n’avaient d’ailleurs pas été levés dans la nuit de mercredi à jeudi. La circulation s’est révélée difficile hier entre Kahani et Combani, après que plusieurs arbres, principalement des manguiers, ont été coupés. La gendarmerie a envoyé « des patrouilles de contrôle » sur les barrages tout au long de la journée. Aucun incident n’a été relevé par les militaires, en fin d’après-midi.
La journée a aussi été marquée par plusieurs rumeurs insistantes : de jeunes coupeurs de route auraient mené des actions délictuelles dans la nuit de mercredi à jeudi entre Combani et Kahani et un homme aurait été agressé sur le même axe mercredi soir. La gendarmerie n’a pas constaté le premier point et n’avait reçu aucune plainte, hier, en fin d’après-midi, concernant le second volet.
Gérard Collomb sinon rien
Mamoudzou avait des allures de ville calme, jeudi. Comme la veille, de nombreux automobilistes n’avaient pas pu gagner le chef-lieu en raison des barrages. Cela a notamment été le cas des employés de la barge, qui a fonctionné « en mode dégradé », indique-t-on du côté de la police. Seul l’amphidrome était ouvert, sous protection des forces de l’ordre.
Fonctionnement ralenti aussi, du côté du service des migrations et de l’intégration de la préfecture, par manque de personnel. Le site était également placé sous protection policière. Les forces de l’ordre sont restées mobilisées, en zone police, même si le mouvement s’est déplacé depuis deux jours dans le reste de l’île. La plupart des congés des fonctionnaires ont été annulés, en raison de la grève générale.
Et le mouvement, reconduit aujourd’hui, pourrait durer. La grève générale se poursuivra jusqu’à un déplacement sur l’île du ministre de l’Intérieur, a rappelé jeudi soir Maoulida Momed, un des porte-parole du mouvement. Le Collectif des associations de Mayotte ne digère pas l’absence de Gérard Collomb. Il pourrait exiger un report de l’élection législative partielle, alors que l’exécutif respecte un devoir de réserve, à l’approche du vote.
Au barrage de Bandrélé, « on respecte les consignes », indique un représentant syndical CGT. Une vingtaine de manifestants étaient mobilisés, pour couper la route nationale 3, à l’aide de pneus, morceaux de bois, voiture et poubelles. Les piétons pouvaient franchir le barrage « tout le temps », selon un représentant syndical CGT. Une version nuancée par un automobiliste bloqué. « Ils laissent passer une partie [des piétons] toutes les 30 minutes. » L’homme a remarqué un ballet de taxis, derrière le barrage, « qui font une navette » pour transporter leurs clients. Les secouristes sont par ailleurs autorisés à franchir les obstacles.
« On va peut-être nous entendre »
Ici, des quêtes se mettent en place, pour financer le mouvement. « On se cotise et on mange ensemble à midi. Quand je suis arrivé, on m’a dit « Bon bah, aujourd’hui t’es puni parce que t’étais pas là hier. J’ai sorti la carte bleue », sourit le représentant syndical CGT.
Vers midi, ce jeudi, la forte pluie n’a pas eu raison de la motivation des manifestants de Bandrélé. Richard Ali, un habitant du village, pense qu’en fermant « un peu les routes de Mayotte […] on va peut-être nous entendre ». Cet agent administratif à l’Education nationale s’est « fait cambrioler trois fois […] Tous les jours, il y a des agressions et des intrusions » dans un magasin de Bandrélé, assure-t-il. « Ça suffit. Il faudrait que les Mahorais se sentent en sécurité chez eux ».
Les automobilistes à l’arrêt « comprennent parce que ça concerne tout le monde, toute la population, toutes les communautés de Mayotte, les blancs, les noirs, les Mahorais, les Anjouanais […] On est prêt à continuer jusqu’à ce que le gouvernement comprenne qu’on est des Français à part entière », ajoute-t-il.
Le mouvement social a des impacts sur la vie économique de l’île. Exemple concret avec ce chef de chantier, bloqué à hauteur du barrage de Bandrélé, jeudi midi. Venu de La Réunion, Pascal doit intervenir sur les travaux d’une station d’épuration, à Miréréni. Il a tenté de franchir l’axe routier vers 6h30, « avant qu’ils ferment. Ça n’a pas fonctionné […] C’est impossible [de négocier pour passer]. Ils ne veulent pas en entendre parler. » Et d’ajouter : « Il faut bloquer les personnes qu’il faut, pas nous, les petits travailleurs ».
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