Ce n’est pas pour « se gargariser » selon les mots du procureur de la République que le préfet Dominique Sorain a réuni hier la presse mais pour partager une bonne nouvelle : la tendance à la baisse de la délinquance générale des deux premiers trimestres se confirme au troisième.
« On s’était engagés à faire régulièrement un point » sur les chiffres de la délinquance, annonce en préambule le préfet Dominique Sorain. Chose promise, chose due, il a convié la presse mardi afin de rendre compte de la situation en matière de délinquance à Mayotte au troisième trimestre 2018. En mettant en perspective ces chiffres avec ceux des deux premiers trimestres, le délégué du gouvernement a mis en exergue une « tendance lourde » de baisse de l’insécurité sur les neuf premiers mois de l’année en cours.
De manière générale, les faits de délinquance baissent de 12% au cours des neuf premiers mois et de 11,6% en particulier au troisième trimestre. « On est bien dans la confirmation, (…) on ne peut plus parler d’éléments conjoncturels », s’est réjoui Dominique Sorain. Dans le détail, au troisième trimestre, les agressions reculent de 9,8% par rapport à 2017, les atteintes aux biens de 18% avec une baisse notable des cambriolages de 38%. Le préfet note « une baisse sensible des violences intrafamiliales » même si ces dernières restent au-dessus des moyennes nationales à l’instar des autres départements d’outre-mer.
140 gendarmes par jour pour les élèves
« Il y a toujours trop de délinquance », concède Dominique Sorain qui constate toutefois que les effets dus aux moyens affectés à la lutte contre l’insécurité « se font ressentir ». Parmi ceux-ci, l’installation de 66 caméras de vidéo-surveillance à Mamoudzou mais aussi les mesures phares du Plan pour Mayotte acté par la ministre des Outre-mer Annick Girardin en mai dernier : la mise en place d’une compagnie départementale d’intervention, l’ouverture d’une nouvelle brigade à Koungou et prochainement à Dembéni, l’affectation de 150 policiers supplémentaires portant les effectifs totaux à 1.050 agents (police et gendarmerie), le renforcement des effectifs de réservistes, l’instauration de la police de sécurité du quotidien et de zones de sécurité prioritaire en Petite-Terre et à Kawéni, l’augmentation du fonds de prévention de la délinquance qui atteint désormais 685.000 euros, etc.
En présence du procureur de la République Camille Miansoni, le préfet a rappelé que la lutte contre les filières de passeurs, contre l’hébergement illégal et le travail dissimulé – tout « cet écosystème, (…) cet environnement qui crée un terreau propice à l’immigration clandestine » – a eu des effets positifs. Le préfet n’omet pas « le travail croisé » avec d’autres acteurs tels que les « gilets jaunes » même si cette mobilisation populaire « ne parviendrait pas à elle seule à expliquer ces chiffres (de la baisse de la délinquance générale, ndlr) ».
Le délégué du gouvernement a également souligné l’accalmie en matière de violences scolaires depuis la rentrée dernière, à mettre notamment au crédit du plan de sécurisation des établissements porté par la ministre des Outre-mer et qui mobilise chaque jour entre 100 et 140 gendarmes.
« Encore un combat à poursuivre »
Ainsi, le nombre de faits enregistrés pour 1.000 habitants se rapproche-t-il des taux nationaux notamment dans le cas des atteintes à l’intégrité physique : 2,62 faits pour 1.000 habitants à Mayotte contre 2,40 au national. Par ailleurs, sur l’île aux parfums, l’on enregistre au troisième trimestre 4,12 faits de délinquance générale pour 1.000 habitants contre 8,19 au national. Même les cambriolages sont proportionnellement moins importants : 0,79 fait à Mayotte contre 1,34 au national. « Nous sommes passés d’une situation avec peu de délinquance à une augmentation très brutale » dans les années 90 sur l’île hippocampe, tempère le préfet pour tenter d’expliquer pourquoi ressentis et chiffres diffèrent. Autour de la table dressée pour la conférence de presse, on ne « se gargarise pas de bons résultats », avertit Camille Miansoni : « Ce n’est pas un point d’arrivée (…), il y a encore un combat à poursuivre ». Et « quand ça n’ira pas bien, on le dira », promet-il, dans une logique « d’obligation de transparence et de pédagogie ».
Cependant, une situation en particulier interpelle le préfet : l’accidentologie routière. Avec « de plus en plus de voitures roulant dans des endroits pas adaptés », des « motos qui roulent vite », un état des routes qui ne permet pas la vitesse, les « ingrédients » sont réunis pour une augmentation de l’accidentologie. Et elle est importante : +84% d’accidents corporels et +50% de blessés légers au troisième trimestre. Une « attention importante » est ainsi portée au sujet, ce qui se traduira par une intensification prochaine des contrôles routiers, alerte le préfet. En trois mois, sur les 1.017 infractions au code de la route relevées, 116 concernent des conduites sans permis, note le colonel Philippe Leclercq pour qui « le vrai sujet, c’est celui-là ».
Pour le parquet, un des sujets actuels concerne la prostitution des mineurs. La première affaire de recours récurrent à des prostitués mineurs a été jugée récemment : le prévenu a été condamné à un an de prison ferme et un an avec sursis. « Il ne faut pas faire de Mayotte une terre de prostitution des mineurs, c’est ça le message », a fermement déclaré Camille Miansoni, faisant vraisemblablement référence aux îles voisines où ces pratiques ont cours.
Autant d’OQTF qu’en 2017
En matière de lutte contre l’immigration clandestine, il a été délivré en 2018, pour le moment, quasiment autant d’obligations de quitter le territoire français (OQTF) qu’en 2017 – 12.000 OQTF au 30 septembre 2018. En outre, 9.632 reconduites aux frontières ont été effectuées depuis le début de l’année « contre 14.231 en 2017 soit une baisse de près d’un tiers ». L’arrêt des reconduites aux frontières en raison du différend diplomatique avec les Comores qui perdure depuis mars « a eu des effets », reconnaît le préfet.
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