L’essaim de séismes se prolonge et avec lui l’inquiétude d’une partie de la population. L’Union départementale des associations familiales (Udaf) de Mayotte a organisé mardi après-midi une réunion avec des acteurs locaux et l’un des experts envoyés sur l’île, Olivier Galichet, pour obtenir et diffuser des informations fiables sur le phénomène en cours. De nouveaux outils de sensibilisation et de surveillance des habitations vont voir le jour.
« Nous sommes dans une psychose », s’alarme le président de l’Union départementale des associations familiales, Nizary Ali. Alors que les familles se tournent vers la structure pour signaler leurs inquiétudes face à l’épisode sismique en cours, l’Udaf a organisé mardi après-midi une réunion avec des associations, le service social du centre hospitalier de Mayotte, le vice-recteur ou encore une représentante de l’Agence régionale de santé. Le tout en présence du lieutenant-colonel Olivier Galichet de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. C’est l’un des trois experts arrivés vendredi à Mayotte pour notamment « mieux communiquer auprès de la population des informations scientifiques ». Objectif de la rencontre : permettre à l’Udaf et à ses partenaires d’obtenir des éléments fiables sur le phénomène afin de les relayer aux familles.
Depuis leur arrivée, les missionnaires ont notamment planché sur la mise à jour de la foire aux questions diffusée par la préfecture. Des schémas et vidéos « pour expliquer qu’il n’y aura pas de tremblement de terre catastrophique » à Mayotte devraient rapidement voir le jour, informe Olivier Galichet. L’île aux parfums est secouée en raison de l’activité d’une « faille qui fait environ 10 kilomètres de long. Sur les séismes [puissants] de type Japon, les failles font 200 kilomètres voire plus. » L’énergie libérée est bien plus importante et de facto le séisme atteint une magnitude beaucoup plus élevée. À Mayotte, « il n’y aura pas un séisme majeur qui va tout faire tomber ». Un agrandissement de la faille, s’il se produit, prendra des millions d’années.
Une fiche d’observation des fissures
Il n’empêche. Le 101ème département fait face à un « événement inédit. Ça n’est pas une grosse catastrophe mais c’est nouveau, même au niveau de la sécurité civile. Dire qu’il faut surveiller tous les jours les fissures, ça n’a jamais été fait nulle part dans le monde, je pense. » Une fiche d’observation des fissures devait être mise en ligne dès ce mardi sur le site internet de la préfecture. Ainsi, les particuliers pourront être acteurs de leur sécurité alors que « les services, quels qu’ils soient – mairies, État, associations – ne peuvent pas envoyer des gens partout » pour surveiller la solidité des habitations. « S’il n’y a aucune fissure dans la maison, il n’y a pas de raison qu’elle tombe. Si ça commence à s’écarter suffisamment, si je peux passer un crayon dedans, il faut que je prévienne les autorités », résume Olivier Galichet. D’autant qu’un tremblement de terre légèrement supérieur au record enregistré le 15 mai (5.8 de magnitude) n’est pas écarté. Les pompiers mahorais vont être « formés pour voir si une fissure est dangereuse ou pas », révèle Olivier Galichet.
L’essaim de séismes pouvant « durer quelques mois voire plus, il faut s’habituer à vivre avec ça. Il faut accompagner les gens, qu’ils se préparent chez eux », poursuit le lieutenant-colonel, lui-même réveillé par les tremblements de terre nocturnes. Depuis le début de l’épisode sismique, il y a près de quatre semaines, une quinzaine d’habitants a été transportée à l’hôpital pour des crises d’angoisse. L’Agence régionale de santé (ARS) a constaté qu’après chaque secousse d’ampleur, le Samu recevait une dizaine d’appels en lien avec l’événement.
L’Agence régionale de santé qui travaille à la mise en place d’une véritable cellule psychologique, avec « plusieurs niveaux proposés », développe Geneviève Dennetiere, médecin responsable de la cellule de veille et de gestion des alertes sanitaires à l’ARS. Le service de psychiatrie du centre hospitalier de Mayotte pourrait rapidement faire « une communication sur la gestion du stress ». Des interventions sont envisagées par l’ARS lors de réunions publiques dans les communes. Enfin, un numéro vert pourrait être mis en place, avec « une prise en charge psychologique » et la possibilité d’évoquer des « aspects techniques ».
Des années d’études scientifiques
La réunion de l’Udaf a également été l’occasion d’évoquer le volet hébergement d’urgence, même si une puissante secousse est écartée. La Croix-Rouge dispose en Petite-Terre de tentes et de shelters (des abris plus spacieux). L’association possède huit autres sites de stockage de matériels mobilisables dans l’océan Indien. La sécurité civile peut également dépêcher du matériel à Mayotte. En parallèle, les maires ne l’ayant pas encore fait sont invités à finaliser leur plan communal de sauvegarde, qui précise notamment les sites d’hébergement d’urgence.
Le lieutenant-colonel Olivier Galichet a tenu à rappeler qu’un tsunami n’est pas possible avec cet essaim de séismes, compte tenu du mouvement tectonique observé. De prétendus forages pétroliers, parfois envisagés comme une cause des secousses sur les réseaux sociaux, sont écartés pour expliquer l’essaim de séismes. Les sismologues, qui vont jusqu’à « surveiller la terre pour savoir s’il n’y a pas d’essais nucléaires qui se font » sont formels : les tremblements de terre sont liés au mouvement de plaques tectoniques. Un phénomène volcanique, à la marge, n’est pas exclu, précisaient toutefois les experts vendredi dernier lors d’une conférence de presse.
L’essaim de séismes « va faire l’objet d’études scientifiques pendant des années. Oui, les scientifiques vont envoyer un bateau sur place mais c’est une étude à long terme », expose Olivier Galichet. Les trois experts, quant à eux, regagneront la métropole jeudi. Ils continueront de suivre la situation à distance.
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