Le président de la Fédération des entreprises des Outre-mer était en visite à Mayotte mercredi et jeudi. Il a multiplié les rencontres, pour connaître « les attentes des milieux économiques », avant que le gouvernement ne révise les aides à l’investissement et au fonctionnement des entreprises.
« Mon objectif premier était de faire le point avec les organisations professionnelles adhérentes à la Fedom » (Fédération des entreprises des Outre-mer). Le président de la structure, Jean-Pierre Philibert, a participé mercredi et jeudi à un « court séjour de 36 heures » à Mayotte, accompagné de la secrétaire générale de la Fedom, Françoise De Palmas. « La Fedom regroupe l’ensemble des organisations professionnelles des DOM » (Départements d’Outre-mer), rappelle son président. « Sont nos adhérents à Mayotte essentiellement le Medef, la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises), la CCI (Chambre de commerce et d’industrie) et demain va nous rejoindre la Fédération du bâtiment », poursuit-il.
→ Jean-Pierre Philibert président de la FEDOM et Françoise De Palmas secrétaire générale
Objectif premier de sa visite : « Faire le point sur les Assises des Outre-mer, savoir quelles étaient les attentes des milieux économiques. Fallait-il les hiérarchiser et comment ? », détaille Jean-Pierre Philibert, qui n’avait « pas encore vu beaucoup de remontées ».
« Ne pas enfermer Mayotte dans deux ou trois secteurs »
« J’ai posé la même question aux services de l’Etat », ajoute celui qui a notamment rencontré le secrétaire général de la préfecture. A l’issue de ces entretiens, « j’ai une certitude : tout est prioritaire à Mayotte. Ça veut dire que dans les dispositifs envisagés, je soutiendrai un dispositif permettant très largement, quel que soit le zonage retenu, zone franche globale ou zone franche d’activités, de reconnaître cette pluri-sectorialité, le fait qu’on ne doit pas enfermer Mayotte dans les années à venir avec deux ou trois secteurs qu’on aiderait et pas les autres, contrairement à ce qu’il se passe dans les autres DOM. » Le propos est signé dans un contexte particulier. « Le gouvernement va réviser les fameuses aides à la compensation du handicap, c’est-à-dire les aides à l’investissement et au fonctionnement », affirme Jean-Pierre Philibert.
Il faut « qu’on mette en place progressivement ce qui va permettre de dynamiser l’économie mahoraise […] Vous avez deux territoires, la Guyane et Mayotte, qui sont des territoires à construire. Vous ne pouvez pas leur appliquer par transposition des mesures nationales. On est tous d’accord pour dire qu’il faut qu’il y ait une différenciation. Ça n’aurait pas de sens de définir aujourd’hui deux ou trois secteurs sur lesquels il faut faire porter essentiellement de l’effort. Je pense que la bonne solution pour Mayotte serait une zone franche globale – je pense que c’est ce que va retenir le gouvernement – où l’ensemble des secteurs seraient considérés comme prioritaires. »
Concrètement, le tout prioritaire c’est « réserver le fléchage d’un certain nombre de moyens au titre de l’aide fiscale à l’investissement, le CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi), par exemple, à tous les secteurs. « Le tourisme, dans l’immédiat, n’est sûrement pas prioritaire et n’est pas le moteur du développement de Mayotte. Mais on ne vote pas des outils pour deux ans. Si on arrive à régler des problèmes extrêmement importants comme l’insécurité, qui peut dire que dans trois ou quatre ans, le tourisme ne sera pas un vecteur du développement de Mayotte ? Le numérique est un secteur qui est totalement en pointe à La Réunion, un peu à la Martinique. Ce n’est pas encore quelque chose qui, en termes de PIB (Produit intérieur brut), pèse ici. Mais demain, si Mayotte est un peu mieux connectée au monde par l’aérien, le maritime, la téléphonie, etc., je pense que ça va booster le numérique. »
« Un leadership économique à prendre »
« Il faut reconnaître au plus haut niveau l’exception mahoraise. Nos Outre-mer sont extrêmement hétérogènes. Aucun territoire n’a le même statut. Nous avons des territoires qui sont en décrochage en termes d’IDH (Indice de développement humain), de PIB, etc. – je pense à la Guyane – ou en décrochage démocratique sévère. La Martinique vient de perdre 25 000 habitants. »
« Je voudrais qu’on dise demain, on va à Mayotte parce que c’est un formidable terrain d’opportunités. Oui, il y a des difficultés à Mayotte, oui il y a de l’insécurité, oui c’est compliqué d’être entrepreneur, oui c’est enclavé. Mais c’est aussi un territoire où il y a beaucoup de choses à faire. Il faut renverser cette image en métropole et que les Mahorais ont eux-mêmes. »
Mayotte a des atouts, à commencer par son positionnement « dans le canal du Mozambique, dans une région où il y aura dans quelques années 40 millions de francophones, où il y a un leadership économique à prendre qui n’a pas encore été pris véritablement dans la zone. L’Afrique du sud ne joue pas son rôle, le Mozambique n’est pas encore une grande puissance. La France est dans le canal du Mozambique. Et la France, c’est Mayotte, et Mayotte, c’est la France. »
« Je considère que M. Galarme va disparaître de l’organigramme »
Thierry Galarme, le président du Medef local, non candidat à sa succession, « était le représentant du Medef local au sein de la Fedom », indique le président Jean-Pierre Philibert. « Mayotte a deux représentants territoriaux qui tournent au conseil [de la Fedom]. Nous avions Monsieur Galarme, qui n’est absolument pas le représentant de la Fedom à Mayotte. J’aurais souhaité le rencontrer. Je n’interviens pas dans les discussions au sein du Medef. Cette organisation se déterminera comme elle entend se déterminer. J’ai cru comprendre que M. Galarme ne serait plus président. J’en prends acte et je me réserve naturellement de faire la transposition de sa décision au sein de la Fedom. Je considère que M. Galarme […] va disparaître de l’organigramme de la Fedom. »
Mayotte peut-être éligible à des fonds européens d’envergure
A Mayotte, « on utilise un peu mieux les fonds européens que dans les autres territoires », se félicite Jean-Pierre Philibert. Selon lui, Mayotte pourrait être éligible au plan Juncker. L’île « a besoin d’équipements structurants lourds […] Il va falloir trouver de l’ingénierie, monter les dossiers. Le ticket d’entrée de Juncker, c’est 50 millions d’euros. Je ne suis pas sûr qu’il soit du même ordre à Mayotte. »
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