Le président Douchina s'attaque au dernier point du programme politique de la majorité. Après avoir définitivement lancé le processus de départementalisation, bien amorcé "le rayonnement politique et économique de Mayotte au plan régional" et esquissé les premières orientations d'un "développement économique global équilibré", M. Douchina veut voir son mandat consacrer l'avènement d'une nouvelle culture administrative.

"Il nous faut revoir notre organisation, élaborer une ligne directrice. Tout le monde doit produire le même effort, pour plus de résultats", a t-il lancé à l'assemblée de tous les responsables de l'administration de la Collectivité. A la tribune avec son vice-président Hadadi Andjilani, le DGS Jean-Claude Louchet et son directeur de cabinet Mohamed Abdourazak, le président a aussi insisté sur "les retards de paiement inacceptables" de la Collectivité envers ses fournisseurs (lire Mayotte Eco).

Une seule réunion rassemblant tous les responsables administratifs s'était tenue depuis sa prise de fonction, il y en aura désormais une par trimestre. "Il faut se voir, discuter, établir un dialogue. Il ne peut pas y avoir les élus d'un côté, très loin, et l'administration de l'autre côté, très loin".

Dans ce sens, l'élu du canton de Kani-Kéli a appelé les agents à inscrire davantage leurs travaux dans une logique de transparence et de visibilité, afin que "les élus puissent avoir une connaissance intégrale des dossiers". Le président a pour cela exigé que des comptes-rendus des dossiers en cours lui soient remis, par l'intermédiaire de fiches. "Il ne s'agit pas d'une mise en cause. Nous disposons des compétences, des ressources, mais on s'ignore. Il n'y a pas de dynamique commune pour un objectif commun. Il faut revoir notre manière de fonctionner. Je veux une ligne directrice", a précisé le président, désireux de motiver et mobiliser ses troupes, très pédagogue, mais avec une certaine fermeté.

"Les élus ont besoin de connaître les dossiers importants en cours"

"Je ne veux plus simplement apposer ma signature sur les documents que l'on me tend. J'ai besoin d'être certain des implications, des conséquences de mes choix, d'autant que j'engage l'argent de la Collectivité". Un souci d'efficacité d'autant plus impérieux que le président a rappelé la maigreur du budget 2009; une contrainte pour les agents de la CDM, que le président veut pourtant virtuoses, en les exhortant "à faire plus avec peu", selon son expression.

"On va voir service par service comment on va fonctionner. Nous, élus, on a quelques idées, mais pas de manière très précise. En revanche, les élus ont besoin de connaître les dossiers importants en cours. Il faut que vous nous informiez de l'existence de ces dossiers et qu'il y ait des fiches que le DGS pourra faire remonter (lire encadré). Les projets doivent être le fait des élus, mais vous pouvez suggérer des choses à faire, dans le social, l'économie", a ainsi exhorté le président en direction de ses troupes très attentives.

Après le discours politique, l'exposé technique a été laissé aux soins du directeur général des services, M. Louchet, qui a assuré ce qui pourrait être l'introduction générale d'un cours de gestion et management des administrations de première année universitaire. "Je trouve très intéressante cette réunion qui permet de rappeler les grands enjeux, les grandes orientations", a-t-il commencé, rappelant les 4 métiers que ses collaborateurs et lui-même doivent assurer : administrateur, gestionnaire, développeur et manager.

"S'il y a des problèmes, il faut les mettre sur la table"

"Il faut définir les règles, les respecter. Il faut assurer un bon éclairage des élus dans leurs prises de décision, de la rigueur dans la gestion, car nous sommes face à une situation financière difficile." Le DGS propose d'instituer, en plus des fiches sur chaque dossier en cours, des notes d'orientation. "Nous devons assurer une qualité du service public. Nous sommes face à des usagers, une population qui attend de nous que l'on comprenne et respecte leurs attentes. (…) S'il y a des problèmes, il faut les mettre sur la table. Il vaut mieux dire les choses. Ca ne veut pas dire se déshonorer, c'est les assumer collectivement et les résoudre. Il ne faut pas avoir peur d'exprimer où il y a des problèmes."

Le DGS a aussi insisté sur l'impératif de légalité et de régularité que doit revêtir chaque acte pris par la Collectivité, comme la rigueur financière à laquelle est désormais soumise la CDM. Il a aussi prêché pour plus de "transversalité" entre les services : "les directions sont très cloisonnées. Il faut plus de transversalité pour apporter une vraie valeur ajoutée, que les compétences réunies apportent plus. Il y a beaucoup de perte à cause de problèmes entre les directions fonctionnelles et opérationnelles. Les directions fonctionnelles (informatique, DRH, juridique, moyens et logistique…) sont d'abord des prestataires de services pour les autres services", a-t-il insisté, sans omettre de redire que les élus, eux non plus, n'ont pas encore assimilé toutes les bonnes pratiques et normes du processus institutionnel. "Il nous faudra travailler sur ce point aussi", a-t-il dit.

En tout état de cause, une nouvelle culture administrative, portée par plus de rigueur, de régularité, de concertation et animée du souci de l'estimation juste de la ressource, qu'elle soit humaine, financière ou technique, serait seule à même de permettre à la Collectivité de relever les multiples défis pour préparer l'avenir et sous-jacents à un éventuel changement de statut.

 

François Macone & Laurent Canavate

 


 

Des fiches pour suivre chaque dossier en cours

Le président Douchina a demandé à ce que chaque DGA se présente à travers une fiche, avec chacun de ses services, ses équipes, ses missions, et surtout les dossiers en cours. Pour chaque dossier, il faudra une fiche avec son état d'avancement (par exemple l'aéroport, "pour pouvoir parler de ces dossiers aisément"), préciser les échéances, signaler les problèmes rencontrés, proposer des solutions, les attentes par rapport aux élus (besoin d'une délibération, de foncier…).

"Chaque vice-président doit être destinataire de ces fiches. Il faut qu'elles soient simples, lisibles, informatives", a détaillé le président.