Les avocats mobilisés pour dénoncer le manque de moyens à Mayotte

Ce lundi, les avocats du barreau de Mayotte ont organisé un mouvement d’humeur. Pour montrer leur mécontentement, ils ont refusé de défendre les justiciables lors d’un jugement de comparution immédiate. Ils réclament en particulier davantage de moyens humains.

“Le barreau est devant vous debout pour vous demander de renvoyer cette audience. Cet après-midi aucun avocat n’acceptera de défendre les justiciables devant notre juridiction.” Ce lundi après-midi, c’est ainsi que maître Yanis Souhaïli, bâtonnier de Mayotte, s’est adressé à la présidente du tribunal en préambule de la session de comparution immédiate, au tribunal judiciaire de Mamoudzou.

les-avocats-mobilises-pour-denoncer-le-manque-de-moyens-a-mayotte
Yanis Souhaïli, le bâtonnier de Mayotte a exprimé à la présidente du tribunal judiciaire les revendications de ses confrères et consœurs.

Réunis dans une salle d’audience, les avocats se sont réunis pour protester et dénoncer plusieurs dysfonctionnements. “Ce n’est pas un mouvement de grève mais un mouvement d’humeur”, insiste le bâtonnier. Principale revendication, disposer de moyens supplémentaires. La situation du greffe aux affaires familiales est celle qui illustre le mieux le manque de moyens selon eux. “Depuis plusieurs mois, on attend des décisions. Chido est passé, il a eu des conséquences mais aujourd’hui, on ne peut plus se cacher derrière le cyclone. Des clients attendent d’être divorcés, d’autres attendent des décisions sur les pensions alimentaires depuis plusieurs mois. Nous on est incapables de leur répondre. Et lorsqu’on vient au tribunal pour essayer d’en avoir, on n’en a même pas”, s’époumone Yanis Souhaïli.

Les avocats ont souhaité tirer la sonnette d’alarme car “cela commence à devenir insupportable pour les justiciables”, alerte le bâtonnier. Ce dernier précise que contrairement à plusieurs autres ministres, le Garde des Sceaux, Gérald Darmanin, “n’est toujours pas venu à Mayotte depuis le cyclone ”. L’objectif de la mobilisation est aussi d’être entendu au sein du ministère.

C’est un incident entre la directrice des greffes et un avocat qui est à l’origine du mouvement d’humeur. “En l’analysant, nous nous sommes rendu compte que c’était dû à un manque de moyens humains et matériels au sein du tribunal judiciaire”, explique Yanis Souhaïli. Le barreau de Mayotte revendique notamment plus de personnel de greffe. “Nous pouvons mettre autant de magistrats qu’on veut, si au niveau du greffe ça ne suit pas, ça ne va pas marcher”. Il y a un mois, c’était les greffiers et agents du tribunal qui avaient entamé une grève en ce sens.

“La semaine dernière, une audience s’est tenue dans un hall”

En parallèle des moyens humains, les avocats ont souhaité pointer du doigt les conditions de travail difficiles au sein du tribunal judiciaire depuis le cyclone. Les bâtiments ont été endommagés. Le 2e étage de la Bred qui est réservé au tribunal et qui compte le conseil des prud’hommes est désormais inutilisable. Dans un des bâtiments du tribunal judiciaire, seul le rez-de-chaussée est accessible. “La semaine dernière, une audience s’est tenue dans un hall”,  s’indigne le bâtonnier.  Au niveau de la chambre d’appel, les bureaux des magistrats sont également inaccessibles, des algecos sur le parking vont être installés temporairement comme alternative. Face à cette situation, il estime que c’est le moment de “mettre le coup d’accélérateur sur la cité judiciaire” évoquée depuis plusieurs années, un projet qui réunirait tous les tribunaux et les différents services.

En réponse au mouvement d’humeur, Sylvie Escrouzailles, la présidente du tribunal judiciaire, a noté que les avocats n’allaient pas défendre les prévenus ce jour, en indiquant que cela “les met dans des difficultés procédurales qui peuvent se rapporter sur d’autres audiences”.  Elle a aussi souligné “être consciente des difficultés que connaît le barreau et ce tribunal et surtout depuis Chido.”  Finalement, la séance a été suspendue, elle a ensuite repris pour décider si les prévenus qui devaient être jugés en comparution immédiate restaient en détention provisoire ou pas selon les cas.

Le bâtonnier et une délégation d’avocats se sont parallèlement entretenus avec la présidente du tribunal judiciaire et la direction des greffes. “Des réponses ont été apportées aux interrogations des avocats et des délais ont été fixés pour résoudre certaines problématiques”, souligne Yanis Souhaïli. Plutôt satisfaits de ces échanges, le barreau a mis fin à son mouvement d’humeur.

Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes

À la Une