Loi programme : le conseil départemental de Mayotte émet un avis réservé

Ce jeudi, les élus du conseil départemental ont émis un avis réservé quant au projet de loi de programmation sur la refondation de Mayotte. Convergence, immigration et expropriation sont au cœur de leurs doutes sur l’efficacité du projet.

C’était le dernier jour pour que les élus rendent leur avis sur le texte du projet de loi de programmation sur la refondation de Mayotte. Ce jeudi, les conseillers départementaux ont émis un avis réservé, qui deviendra favorable si les revendications mahoraises sont entendues. Et elles sont nombreuses, en témoigne la matinée mouvementée qui a accompagné la session plénière du conseil départemental. Plusieurs syndicats et associations étaient présents pour faire entendre leurs voix avant même qu’elle ne débute dans l’hémicycle Bamana, à Mamoudzou. “Tout ce qui est volet social ne nous convient pas, car on parle de convergence pour 2031. Les derniers engagements parlaient de 2025, on y est”, revendique le co-secrétaire départemental du syndicat FSU-SNUipp, Rivomalala Rakotondravelo. En 2015, Manuel Valls, alors Premier ministre, avait pris l’engagement dans le document stratégique “Mayotte 2025” d’accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales pour se rapprocher, dès 2021 des montants en vigueur au niveau national. “On ne peut pas laisser passer cette loi discriminatoire”, appuie de son côté Haoussi Boinahedja, secrétaire départemental de la CGT, qui ne supporte plus les différences de minima sociaux avec le reste du territoire national.

Les élus ont bien statué en ce sens, en émettant de nombreuses réserves. “Nous demandons l’alignement global des minima sociaux dès 2026. […] Nos évaluations démontrent que l’alignement des minimas sociaux coûterait moins que 5 millions d’euros par an à l’État”, défend le président du conseil départemental, Ben Issa Ousseni, donnant comme exemple le coût inférieur à 1,3 million d’euros que demanderait d’aligner le RSA (Revenu de solidarité active). Les élus ont d’ailleurs suggéré d’avoir recours à la caisse de sécurité sociale de Mayotte excédentaire pour financer une partie de cet alignement.

La fin du titre de séjour territorialisée absente du projet

Concernant l’immigration, les élus ont également voulu rappeler au gouvernement sa promesse faite en 2024, à l’issue des barrages : “La demande mahoraise c’est d’abord la fin du titre de séjour territorialisé. […] Il n’y a aucune disposition qui est prise, aucune perspective qui démontre qu’on va supprimer le titre de séjour territorialisé. […] Il est important à ce niveau-là qu’il y ait de vrais engagements”, développe le président du conseil départemental. Quant à l’article 20 portant sur la facilitation des expropriations en cas de déclaration d’utilité publique, “nous demandons sa suppression pure et simple”, affirme Ben Issa Ousseni, exception faite pour l’aéroport, la prison, l’hôpital et la maison de détention pour mineur, selon le rapport relatif à l’avis de Département, consulté par Flash Infos.

Si de nombreux points ont été soulevés, les élus n’ont pas souhaité émettre un avis défavorable pour autant. “Il faut construire Mayotte. Après Chido, on ne peut pas tergiverser”, admet le président du conseil départemental, qui se rappelle de l’avis défavorable du conseil à la Loi Mayotte de 2022, qui avait entraîné l’abandon du projet par le gouvernement. Puisqu’il ne s’agit d’un avis que consultatif, il soutient que le travail parlementaire doit désormais être entamé, et enjoint les chefs de groupe politiques de Mayotte de contacter les parlementaires pour appuyer la démarche des Mahorais : “Les vraies décisions se prennent à Paris, pas à Mayotte”.

Le Collectif citoyen 2018 fait irruption au sujet de la piste longue

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Safina Soula, présidente du Collectif citoyen 2018, a manifesté sa colère à la fin de la session plénière.

Alors que Ben Issa Ousseni levait la séance plénière, une vingtaine de membres du Collectif citoyen 2018 a fait irruption dans l’hémicycle Bamana, guidé par sa présidente, Safina Soula. “La piste longue sera à Pamandzi. Les élus vous avez eu assez de temps pour discuter, alors maintenant on décide”, hurle-t-elle à l’assemblée. Dans une ambiance tendue, le collectif a voulu bloquer la salle tant qu’une décision ne serait pas prise quant au lieu de la piste longue. Initialement promise à Pamandzi par le président de la République Emmanuel Macron en 2019, les études ont finalement désigné le site de Bouyouni-M’tsangamouji. Après plusieurs minutes d’échanges animés, Ben Issa Ousseni a fixé la date d’une session plénière extraordinaire d’urgence le 17 avril, qui sera pleinement consacrée au sujet.

Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.

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