Via un courrier daté du lundi 24 février, Anchya Bamana, la députée de la deuxième circonscription de Mayotte demande un prolongement des mesures sur l’importation des végétaux au risque d’une pénurie alimentaire pendant le mois de ramadan. Cette missive est la deuxième du genre à l’attention de Manuel Valls, le ministre de l’Outremer.
“Le cyclone Chido a plongé l’île dans une crise alimentaire profonde. Les produits de base tels que la banane verte, le manioc, les pommes de terre, la patate douce vont manquer au moins une année entière. J’ai déjà eu l’occasion de m’entretenir avec vous sur ce sujet vital. Après Chido, dès la visite du Premier ministre (François Bayrou) avec sa délégation ministérielle, les élus ont alerté le préfet (François-Xavier Bieuville) sur la nécessité de prolonger l’arrêté de 1995 d’au moins un an. Par courrier du 14 janvier 2025 (joint au deuxième), j’ai réitéré cette demande à votre niveau en prévision du mois de ramadan.
Deux mois après le cyclone, force est de constater que la population de Mayotte vit une insécurité alimentaire sans précédent. Les Mahorais passent de la résilience à la résignation. Comme en témoignent les dires des habitants, je cite : “nous nous habituons au manque Madame la députée !” Cette situation est inacceptable et révoltante !
La population, majoritairement musulmane, s’apprête à entrer en période de ramadan du 1er au 30 mars 2025. Aujourd’hui, chaque Mahorais se demande comment se nourrir pour son unique repas quotidien tout au long du mois de ce mois sacré pour les musulmans que nous sommes.
En effet, l’État, à travers le préfet, réquisitionne les containers d’eau et de nourriture des importateurs. L’eau et les produits de base de consommation sont distribués au compte goutte dans les magasins : les Mahorais sont rationnés comme en temps de guerre ! Mayotte n’est pas un camp de réfugiés Monsieur le ministre : Mayotte, c’est la France !
Face à l’abandon de l’État, les maires sont pris pour des boucs émissaires, les fautifs qui ont mal gérés des aides. Vous n’êtes pas sans savoir, Monsieur le ministre, que les aides déployées par l’État ont été complètement sous-estimées eu égard du nombre de population à couvrir.
“J’ai constaté le peu d’aides envoyées”
J’ai personnellement fait le tour de l’île pendant dix jours après Chido, j’ai bien constaté le peu d’aides envoyées par l’État dans les communes, sans parler de leur qualité ! Concernant l’eau, face aux habitants qui souffrent des coupures d’eau du réseau et de l’absence d’eau embouteillée dans les magasins, la seule réponse de l’État est de nous envoyer le Rotary Club nous distribuer des kits de potabilisation d’eau de rivière ou encore des pastilles de chloration d’eau. Monsieur el ministre, cette réponse nous conforte dans l’idée que le gouvernement traite les Mahorais comme étant des tiers-mondistes ! Si l’État traite Mayotte comme un bidonville géant, alors qu’il ait el courage de le dire clairement ! Les Mahorais ne sont pas des mendiants. Ils vivent aujourd’hui une situation d’abandon et d’humiliation de la part du gouvernement. Face à notre colère et à notre indignation qui n’a guère de limites, à l’approche du mois de ramadan, je vous demande de :
1) Prolonger l’arrêté n°2024-DAAF-1059 portant modification de l’arrêté du 10 avril 1995 de deux mois à un an, soit jusqu’au 31/12/2025.
2) Prolonger l’assouplissement de l’arrêté n°1092/DAAF/2015 permettant aux voyageurs d’importer des végétaux de deux mois à un an, soit jusqu’au 31 décembre 2025
3) Privilégier l’importation en urgence des denrées alimentaires de base dans les pays avoisinants tels que le Mozambique, l’Afrique du Sud, la Tanzanie, le Kenya qui sont à deux heures d’avion de Mayotte.
4) Faciliter l’importation d’eau embouteillée e quantité à Mayotte afin d’approvisionner suffisamment les magasins afin de répondre en urgence aux besoins en eau de la population.
Il s’avère que, depuis janvier 2025, les délais de transit maritime entre l’Asie et Mayotte se sont rallongés considérablement. En effet, la CMA-CGM a choisi de placer le port de Pointe des Galets à La Réunion comme hub, en remplacement de celui de Jebel Ali aux Émirats Arabes Unis. Tous les conteneurs à destination de Mayote passent désormais par La Réunion avant d’être acheminés vers Mayotte. Cette situation retarde considérablement l’acheminement des importations vers Mayotte. Compte tenu de cette situation, je demande au gouvernement de déployer les moyens logistiques de la nation pour répondre aux urgences vitales de Mayotte.
Enfin, je demande à l’État d’accentuer le contrôle des boutiques de proximité. Ces dernières explosent le prix des denrées alimentaires et l’eau revendues après achat auprès des grands distributeurs.”
Anchya Bamana, députée de la deuxième circonscription de Mayotte