Depuis le début de la semaine dernière, une trentaine d’architectes s’activent de façon bénévole pour analyser les risques sur les bâtiments des centres d’hébergement d’urgence et faire remonter les informations aux pouvoirs publics.
La routine est désormais bien établie. Ce samedi, à 9h, comme chaque matin, les architectes se retrouvent à la direction de la rénovation urbaine de la municipalité de Mamoudzou, place Mariage, à Mamoudzou. C’est ici qu’ils ont installé leur cellule de crise. Ici, s’organisent les missions du jour. « Nous, on va à Tsoundzou, deux voitures partent maintenant, une va à l’école élémentaire, une autre à la maternelle », détaille Camille Panaye, architecte. Une trentaine de ses confrères de Mayotte ont créé un groupe pour réaliser des études de diagnostic du bâti des écoles de Mamoudzou où sont réfugiés des victimes du cyclone Chido. « À la Ville, on m’a parlé du besoin de diagnostiquer le bâti, je me suis dit que ça rentrait dans mes cordes et que je pouvais réunir une équipe autour de moi », contextualise Kévan Fatih, directeur adjoint de la rénovation urbaine de Mamoudzou et architecte.
Carte des établissements à la main, grilles d’analyse, l’équipe du jour prépare la prochaine visite. Le lieu où ils se regroupent n’a lui même pas été diagnostiqué comme l’atteste le plafond qui tombe et menace de s’effondrer par endroit. « On regarde les conditions de couchage des personnes hébergées , les risques sur les structures auquel ils sont exposés, mais aussi les risques sanitaires », présente Camille Panaye.
Gilets jaunes sur le dos, trois architectes se rendent à l’école élémentaire de Tsoundzou. Ici, la toiture a bien tenu. Entre 120 et 150 personnes y vivent dont une centaine d’enfants. Le trio d’architectes se renseignent sur les conditions de vie. « Les enfants ont le droit à plusieurs collations par jour, compotes, pain au chocolat, sardines », explique Moinouroi Abdouraquib, personne ressource du centre, agente de la mairie, normalement rattachée au service des finances. Une à deux grandes bouteilles d’eau par jour sont distribuées par famille. « Les toilettes sont bouchées. Les gens vont à la rivière pour faire leurs besoins. La crainte c’est les prochaines épidémies. » « On va demander à faire livrer un bac à eau pour la récupérer et l’utiliser pour les toilettes », leur fait savoir Rémi Noulin, architecte. La communauté d’agglomération Dembéni-Mamoudzou (Cadema) donne aux écoles des cuves d’un mètre-cube. « Cette école a bien tenu, ce n’est pas représentatif des centres. Les autres qu’on a visité, il y a bien plus de dégâts », poursuit le professionnel.
Transmettre les besoins
En plus de diagnostiquer les bâtiments, les architectes font remonter les besoins en termes de santé à l’Agenre régionale de santé (l’ARS) et la Croix Rouge.« Si une personne a une maladie chronique, par exemple une maman diabétique, mais qu’elle n’a plus son traitement, on transmet l’information. » Les architectes aident les associations de santé, ces dernières n’ont pas assez de personnel pour aller maintenant dans tous les centres. Dans l’école élémentaire, une petite fille a mal au ventre, « on va faire remonter l’information. Nous n’avons pas le droit de donner des médicaments », précise Kévan Fatih.
Alors que l’équipe a pour l’instant visité onze centres d’hébergement, celui de Tsoundzou 2 est le mieux tenu. «Parce qu’il y a moins de gens, la toiture est restée et c’est propre », détaille Camille Panaye. Sur d’autres sites qui peuvent accueillir jusqu’à 2.000 personnes, des familles ont le droit qu’à une bouteille d’eau par jour et par famille. En même temps que de notifier « le poteau tombé là », les vérifications serviront aussi au rectorat de savoir les moyens à mettre en œuvre pour les travaux.
Une fois le tour du bâtiment terminé, les architectes reviennent dans les locaux de la direction urbaine pour faire la synthèse de leur évaluation. « Nous l’envoyons ensuite au rectorat, à l’ARS, à La Croix Rouge. »
Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.