Un jugement du Conseil d’État publié le 17 juin dévoile le recrutement litigieux d’un professeur du Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Mayotte, devenu aujourd’hui l’Université de Mayotte. Un professeur avait porté le dossier à la juridiction après avoir vu sa candidature rejetée au poste de professeur d’université.
Les méthodes de recrutement d’un professeur de l’Université de Mayotte sont pointées du doigt par une décision du Conseil d’État rendue publique le17 juin. Un professeur, Monsieur A, demandait à l’instance « d’annuler pour excès de pouvoir […] une délibération du 9 septembre 2022 » pour laquelle il avait vu sa candidature rejetée pour un poste de professeur des universités en littératures françaises et francophones.
Monsieur A, maître de conférences en Lettres modernes au Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Mayotte devenu aujourd’hui l’Université de Mayotte, avait présenté sa candidature au poste de professeur des universités en littératures française et francophone. Par une délibération du 9 septembre 2022, le comité de sélection du CUFR « a décidé de ne pas l’auditionner et a rejeté sa candidature puis par une délibération ultérieure, a arrêté une liste de candidats et classé Monsieur D… maître de conférences au sein du même centre, en première position », relate le jugement.
« Rupture d’égalité entre les candidats »
Le juge a souligné que « la fiche de poste établie pour le poste […] correspond de manière particulièrement étroite, du fait de la combinaison très précise et ciblée des compétences et thèmes d’enseignement attendus, aux matières enseignées par M. C… et aux domaines de recherche dont il est spécialiste ». Le jugement estime que « la procédure de recrutement qui a été mise en œuvre est entachée d’une rupture d’égalité entre les candidats. »
Après la décision de l’institution, Monsieur A a souhaité la commenter, il fait savoir qu’il s’agit là d’un exemple de « méthode de recrutement indigne, mais qui a déjà été plusieurs fois mise en place au CUFR*, consistant à rédiger une fiche de poste si précise qu’elle ne correspond qu’à une seule personne (souvent proche de la direction) dont on veut s’adjoindre les services », considère-t-il.
Plus largement, M.A … estime que les recrutements au sein de l’Université de Mayotte sont « souvent endogamiques ou de copinage de certains enseignants-chercheurs ou agents du CUFR, acquis ensuite à l’équipe directoriale et que cela pose un véritable problème démocratique et en particulier à la veille d’élections universitaires qui auront lieu en décembre 2024 ».
Le jugement du Conseil d’État conclut que « Monsieur A… est fondé à demander l’annulation des délibérations qu’il attaque ainsi que du décret du 14 juin 2023 en tant qu’il nomme M. D… professeur des universités et l’affecte au centre universitaire de formation et de recherche de Mayotte ». La délibération qui a rejeté la candidature de Monsieur A a été ainsi annulée, ainsi que celle qui établissait le classement des candidats retenus. Est aussi annulé le décret qui nommait M. D… professeur des universités et l’affectait au CUFR. En dédommagement, l’Université de Mayotte doit verser une somme de 2.000 euros à Monsieur A, tandis que l’État devra lui verser une somme de 1.000 euros.
*Contactée, la direction de l’Université de Mayotte n’a pas souhaité faire de commentaires.
Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.