La loi du 9 avril entérine un changement capital pour la problématique foncière à Mayotte. Le délai de prescription, qui ouvre le droit aux occupants d’un terrain d’acquérir un titre de propriété, passe de trente à dix ans. Des milliers de potentiels propriétaires pourraient faire aboutir leurs démarches à Mayotte. Explications avec la commission d’urgence foncière (CUF).
Quel est était le problème ?
Chargée de faire du titrement de propriété depuis 2022 (loi 3DS), le GIP-Commission d’urgence foncière (CUF) suit les dossiers de centaines de Mahorais souhaitant régulariser leur situation. Cela reste évidement un vaste chantier sur un territoire où droit local ou tradition orale ont permis à des milliers de gens de s’installer sur des terrains sans titre en bonne et due forme. Pour y remédier, il est possible de faire valoir auprès de la CUF qu’on est propriétaire du même terrain sur une période donnée, à savoir trente ans. « C’est très difficile de trouver des preuves de possession sur trente ans. II y a beaucoup d’irrecevabilité. On avait souvent des éléments plus récents que trente ans », reconnaît la présidente de la CUF depuis janvier 2024, Nadia Bergouniou. Pour faire valoir l’occupation ininterrompue, il est possible de fournir plusieurs types de documents (permis de construire, abonnement à EDM, factures de la SMAE, factures d’achat de matériaux, avis d’imposition sur le revenu à l’adresse du bien possédé, carte d’électeur, ou témoignages…).
Qu’est-ce qui change avec la nouvelle loi ?
La loi du 9 avril appelée « loi visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement » ne vise pas qu’à lutter contre l’habitat insalubre. Par son article 51, elle modifie aussi « dans les collectivités régies par l’article 73 de la constitution (dont Mayotte), le délai pour acquérir la propriété immobilière est de dix ans, à compter du 10 avril 2024 et jusqu’au 31 décembre 2038 ». Ce délai est donc passé à dix ans depuis le 10 avril. « Le but est de titrer un maximum de gens pour régulariser, mais aussi permettre des transactions, des échanges ou des opérations d’aménagement », fait remarquer l’ancienne présidente de la chambre d’appel de Mayotte.
La nouvelle période de prescription nécessaire est toutefois limitée dans le temps. Comme indiqué, ce dispositif s’arrêtera fin 2038. À cette date, la loi permettant ce type de régularisation à Mayotte aura elle-même 30 ans.
Combien de personnes pourraient être concernées ?
« Plein. Plusieurs milliers de Mahorais », affirme Yannick Somauroo, responsable des opérations de titrement. Avec les équipes de la CUF, il doit assurer le travail d’inventaire en parallèle des demandes. Ce sont lors des commissions (il y en a trois ou quatre par an) que les titrements sont acceptés ou non.
Est-ce que les dossiers déclarés irrecevables ont de meilleures chances ?
« Oui, tout à fait. Ceux qui ont eu une notification d’irrecevabilité ont eu une note les informant que la loi allait changer », indique la présidente de la CUF. Elle prend comme exemple la dernière commission du jeudi 23 mai où certains dossiers étaient ajournés parce qu’ils sont davantage concernés par une prescription de dix ans, plus facile à prouver.
La CUF en sous-effectif cette année
Comme d’autres administrations, la commission d’urgence foncière (CUF) est touchée par un sous-effectif aggravé par la crise de l’eau et le mouvement social. Plusieurs juristes et magistrats-instructeurs n’ont pas pu être remplacés ces derniers mois. La structure est en recherche active pour assurer ces remplacements, mais également trouver un nouveau directeur après le départ de Ségolène de Bretagne. Il est donc conseillé de prendre attache avec la CUF par mail (contact@cuf.yt) ou téléphone (02 69 66 30 44), plutôt que de se rendre au siège de la CUF, place Mariage, à Mamoudzou. Ou d’envoyer sa demande au GIP- CUF, BP 177, 97600-Mamoudzou.
Rédacteur en chef de Flash Infos depuis 2022. Passionné de politique, sport et par l'actualité mahoraise, ainsi que champion de saleg en 2024. Passé un long moment par l'ouest de la France, avant d'atterrir dans l'océan Indien au début de l'année 2022. Vous me trouverez davantage à la plage quand je ne suis pas à la rédaction.