Le soir du 8 novembre 2019, la jambe d’un plongeur s’est retrouvée coincée dans l’hélice d’un bateau, dans l’ouest de Mayotte, lui occasionnant 30 jours d’ITT. Ce mardi, au tribunal correctionnel de Mamoudzou, la victime rejette la faute sur le directeur de plongée qui a fait marche arrière sans s’assurer qu’il n’y ait personne derrière. De l’autre côté, le moniteur de 36 ans affirme que la consigne était de se rendre vers l’avant du bateau dès l’entrée dans l’eau et qu’il lui était impossible de voir le plongeur. Le délibéré sera connu la semaine prochaine.
L’animosité ne s’est pas manifestée au moment de l’accident, les deux protagonistes le reconnaissent. Elle est antérieure. Au début du mois de novembre 2019, un groupe participe à un stage de plusieurs jours dans un club de plongée du nord de Mayotte. La victime, originaire de l’ouest de la France et expérimentée, doit passer cinq jours avec le même directeur de plongée âgé à l’époque de 32 ans. « J’ai dû jouer les gendarmes. Ils n’écoutaient pas les consignes. Ils ont sans doute mal pris le fait d’être cadré par quelqu’un de plus jeune », estime celui qui est âgé maintenant de 36 ans. Le 8 novembre, trois plongées sont prévues, dont la dernière en nocturne. Selon le prévenu, la manœuvre consiste alors à s’approcher du tombant, pas trop près pour que l’embarcation ne s’échoue pas sur le platier ni trop éloigné pour ne pas désorienter ceux qui descendent. Ils sont alors huit à se préparer à se mettre à l’eau. Un duo et deux palanquées (groupes) de trois doivent se rejoignent devant le bateau. Le plongeur expérimenté se trouve sur le boudin du semi-rigide côté tribord quand il bascule, quelques secondes après les autres. « La consigne était qu’ils s’éloignent du bateau puisqu’ils se dirigent alors vers l’avant », explique le jeune homme de nouveau à la barre du tribunal correctionnel de Mamoudzou, ce mardi.
Sans prévenir et craignant de trop s’approcher du platier, le directeur de plongée qui était à la barre (du bateau cette fois) a voulu reculer un peu le bateau, sans qu’il ait possibilité de voir, dit-il, avec l’obscurité. Est-ce cette manœuvre qui a déséquilibré le mouvement du plongeur ? Ou ce dernier n’a pas fait l’effort de s’éloigner ? La finalité est que sa jambe s’est retrouvée dans l’hélice et que celle-ci lui a provoqué une large entaille à la cuisse. « Je n’ai jamais ressenti une telle douleur. J’ai vu ma mort arriver », raconte celui qui a dû être évasané vers La Réunion. Après sa convalescence sur l’île de La Réunion, son interruption temporaire de travail (ITT) étant estimée à trente jours, l’homme a entrepris de déposer plainte.
« Le pilote raconte n’importe quoi »
Plus de quatre ans plus tard et malgré une plainte au départ classée sans suite, les deux hommes se retrouvent donc dans la même salle d’audience. Ils y livrent toujours la même version. L’un accuse le directeur de plongée d’avoir fait une manœuvre périlleuse, provoquant « les blessures involontaires avec incapacité n’excédant pas trois mois par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence ». Son avocat, maître Bertrand Salquain, lui-même plongeur, émet l’hypothèse que « le pilote raconte n’importe quoi et continue aujourd’hui ». Il rappelle que celui-ci doit assurer la sécurité des clients « du début à la fin de la plongée ». Il demande qu’il soit condamné à payer solidairement avec l’assureur plus de 47.700 euros à son client, ainsi que 300 euros pour une expertise médicale a dû lui-même payée. La procureure adjointe, Françoise Toillon, fait remarquer que le prévenu « n’a pas pris la précaution, ne s’est pas assuré de la sécurité des plongeurs ». Pas opposé à ce qu’il continue son activité en raison d’une absence d’antécédents, elle requiert une peine d’un mois de prison avec sursis et de 3.000 euros d’amende. Pour maître Mélanie Trouvé, avocate du directeur de plongée, il est difficile de le condamner pour avoir enfreint une règle qui n’est pas clairement établie et avance que « personne ne sait comment c’est arrivé ». Demandant la relaxe, elle souhaite qu’il n’y ait pas de mention au B2 si une condamnation était finalement décidée.
Pour cela, il faudra attendre le mardi 23 avril, jour du délibéré.
Une sexagénaire relaxée dans une affaire de logements indignes
« L’enquête n’a pas établi que les gens que vous hébergez n’étaient pas de votre famille », annonce Aline Charron. La famille de l’habitante de Kani-Kéli jugé ce mardi pousse un soupir de soulagement. La coco de 61 ans échappe à la condamnation. En effet, elle devait répondre « d’une aide au séjour irrégulier d’étranger ayant pour effet de le soumettre à des conditions incompatibles avec la dignité humaine ». C’est d’abord le service éducation de la municipalité de Kani-Kéli qui a soulevé le problème avec une adresse citée régulièrement comme domicile de plusieurs enfants scolarisés dans la commune. Sur place, ce sont effectivement des bambins qui attendent gendarmes et policiers du GIR (Groupe interministériel de recherches), lors de la perquisition de logements déclarés insalubres, le 2 octobre 2023. Car les adultes, en bonne partie en situation irrégulière, ont pris la fuite. Ceux qui sont restés sur place (les forces de l’ordre ont compté 15 logements et 63 couchages) démentent le paiement d’un loyer, mais plutôt une participation aux factures d’eau, « entre 20 et 25 euros par mois ».
La propriétaire de la parcelle vit également à cet endroit. Arrivée à Mayotte en 1996, cette Anjouanaise était mariée avec un Mahorais aujourd’hui décédé. Elle partage le terrain avec l’une de ses filles aujourd’hui en métropole. Celle-ci se défend d’être une marchande de sommeil et avance l’argument qu’il s’agit que des gens issus de sa famille, ajoutant qu’elle ne touche pas de loyers. Un point que ne réfute pas Françoise Toillon (il n’y a pas de preuves ou de déclarations en ce sens), mais la représentante du Parquet indique que des services sont rendus comme la réalisation de menus travaux. Elle requiert quatre mois de prison avec sursis et la confiscation de la somme de 1.749 euros trouvés dans sa case en tôle. Pour maître Jean-Baptiste Kondé, il ne s’agit ni plus ni moins que de « solidarité familiale ». « Heureusement que Madame ne couvre pas la majorité des charges », plaide-t-il, à propos des sommes versées. Celui-ci obtient finalement la relaxe de sa cliente.