Quatre condamnés dans l’affaire du « carré réunionnais »

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Les examens du centre de gestion de Mayotte étaient ciblés par des candidats réunionnais soucieux de faire « des petits arrangements ».

Grâce à l’aide d’un agent du centre de gestion de Mayotte, plusieurs postulants réunionnais aux concours de la fonction publique ont pu tricher lors de leurs examens. Le tribunal correctionnel de Mamoudzou a décidé, ce mardi 23 janvier, que deux d’entre eux, dont Léonus Thémot, lui-même ex-président du centre de gestion de La Réunion et ex-adjoint à la mairie de Saint-Louis, devront effectuer de la prison ferme.

Dans la salle d’examen du centre de gestion mahorais à Mamoudzou, une rangée de tables avait la particularité de n’être formée que de candidats originaires de La Réunion. Ce « carré réunionnais », comme il était appelé, avait pour but de réussir les examens de la fonction publique, quitte à tricher selon un rapport dressé par la Chambre régionale des comptes en 2019. Deux examens, en 2015 et 2018, ont particulièrement intéressé la justice et ont débouché sur le procès en octobre 2023 de quatre prévenus. Le tribunal correctionnel de Mamoudzou a fait connaître son délibéré, ce mardi matin. Léonus Thémot, ex-adjoint de la mairie de Saint-Louis et ancien président du centre de gestion de La Réunion, est condamné à deux ans de prison dont un an avec sursis, ainsi que 9.000 euros d’amende pour fraude dans un concours public. Dominique Mardaye, un ancien militant associatif devenu directeur de cabinet du maire de Saint-Louis, hérite d’une peine similaire de deux ans, mais avec six mois de sursis et également 9.000 euros d’amende.

Les deux hommes sont les principaux bénéficiaires du système, même si Léonus Thémot n’a jamais obtenu le titre espéré d’attaché territorial. En 2015, sa copie à l’écrit pourtant « plus que lacunaire » selon le correcteur avait été notée 15/20 (le 3/20 avait été modifié). En 2018, c’est une version envoyée depuis La Réunion les jours suivant l’examen qui avait été placée dans la pile par un agent mahorais du CDG avant correction. Pareil, malgré le corrigé, il n’avait pas réussi le concours. Lors de l’audience, maître Normane Omarjee avait regretté que son client passe pour « le Richard Virenque du concours d’attaché territorial », tandis que Dominique Mardaye, qui a bénéficié de la même technique, a été plus en réussite.

Parmi les deux complices, l’agent mahorais du centre de gestion (remercié depuis), Assani Djamali, a aussi été condamné à deux ans de prison dont un an avec sursis et 9.000 euros d’amende. Alors qu’il avait été le premier à passer aux aveux, il n’était pas présent le jour du procès. Le quatrième, un ami de Léonus Thémot, qui a transporté les copies de La Réunion à Mayotte en 2018, est le seul à ne prendre que du sursis (un an) dans l’affaire, il devra payer 2.000 euros d’amende. Maître Jean-Baptiste Kondé avait demandé sa relaxe, arguant que son client ne savait pas ce qu’il y avait dans l’enveloppe prise avec lui dans l’avion.

Des effets de manche qui ne prennent pas

Les conseils des deux candidats réunionnais, maîtres Omarjee et Philippe Creissen, avaient été très offensifs durant le procès du mois du 3 octobre 2023, « noyant » les trois juges sous des demandes de nullité (toutes refusées), pour reprendre l’expression du président du tribunal correctionnel, Bruno Fisselier. Le deuxième avocat avait même mis en doute la validité d’une signature du procureur de la République, Yann Le Bris (le faux en écriture n’a pas été retenu). L’effet de manche avait eu le don d’énerver le procureur, qui avait requis deux ans de prison contre les quatre prévenus, dont un an avec sursis. Il demandait également l’interdiction d’exercer dans la fonction publique.

Concernant le centre de gestion de Mayotte, le tribunal correctionnel de Mamoudzou accepte sa constitution de partie civile, mais le déboute de ses demandes.