« Ça peut faire peur, mais vous pouvez croire en vous »

Étudiante à Sciences Po Paris, Beverly Carpin était de retour, ce jeudi matin, au lycée des Lumières à Kawéni. Elle y a échangé avec les élèves de première et terminale de l’atelier sciences politiques de l’établissement pour leur faire partager son expérience et les encourager à deux mois des concours.

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Entre deux semestres, Beverly Carpin fait un passage par Mayotte où vivent sa famille et ses amis.

« J’étais terrifiée avant l’oral d’admission de Sciences Po », admet une Beverly Carpin pourtant pleine d’assurance aujourd’hui. Arrivée à Mayotte à l’âge de 4 ans, l’étudiante de 18 ans a fait toute sa scolarité sur l’île. Élève brillante, baccalauréat avec la mention très bien, elle a intégré Sciences Po Paris via son campus de Poitiers (Vienne) en 2023, avec la spécialisation Amérique latine, péninsule ibérique et Caraïbes. Un grand pas pour elle et surtout une entrée dans une filière dans l’excellence où les Mahorais se comptent sur les doigts de la main. C’est donc avec intérêt que quatorze élèves de l’atelier sciences politiques du lycée des Lumières de Kawéni (une première et treize terminales) ont pu échanger avec elle pendant presque deux heures, jeudi matin. L’échange est plutôt facile, il y a un an, c’est elle qui était à leur place. Contenu des cours, matières enseignées, rythme de travail, voire questions très pratiques, Beverly répond avec le sourire à ses interlocuteurs. Par exemple, quand une élève lui demande les objectifs à se fixer en arrivant à Sciences Po ou à l’université, celle-ci rétorque : « C’est un grand changement. Il n’y a personne qui vous suit derrière. Il suffit d’être organisé, à la fois dans le travail et la vie étudiante ».

Sur les concours ou Parcours sup aussi, elle prodigue de précieux conseils à ceux qui y sont confrontés. « N’hésitez pas à parler de Mayotte, ça intéresse. Lors de l’oral par exemple, on m’a posé des questions sur l’opération Wuambushu, j’ai pu expliquer l’histoire de l’île », raconte-elle. Interrogée sur le niveau au lycée de Mamoudzou et celui attendu dans sa formation, elle rassure. « J’avais peur au début. Finalement, je trouve que le retard n’est pas considérable », analyse celle qui a validé toutes ses matières au premier semestre. S’estimant bien aidée à Mayotte, elle rappelle qu’elle s’est entrainée en passant des oraux blancs avec Alix Jeu, professeure de lettres et responsable de l’atelier Sciences po, et a pu se rendre à Paris où le sénateur mahorais Thani Mohamed Soilihi avait emmené son groupe au Sénat. « Je mesure la chance aujourd’hui », estime l’ancienne élève en section européenne. Espérant la même réussite pour son auditoire, elle les motive avant les grandes échéances : « Ça peut faire peur, mais vous pouvez croire en vous ».

« On partage le fait d’être loin de chez nous »

Depuis la métropole, elle n’oublie pas l’île sur laquelle elle est revenue pour un mois de vacances entre ses deux semestres. Elle fait d’ailleurs partie d’une association culturelle, Sciences ô, qui promeut l’outremer sur le campus. « Je suis la seule de Mayotte, mais il y a une grande solidarité entre les ultramarins. On partage le fait d’être loin de chez nous et de nos familles », explique celle qui côtoie aussi des étudiants étrangers, nombreux sur le site. Elle dit vouloir promouvoir la culture mahoraise en métropole et compte d’ailleurs faire venir à Poitiers l’écrivaine mahoraise Yasmina Aouny pour une conférence sur les Chatouilleuses.

Concernant son avenir, la jeune femme veut faire un master en relations internationales et travailler « dans la diplomatie », avec comme objectif de pourquoi pas faire son retour dans l’océan Indien. « Je pense revenir à Mayotte. J’ai grandi ici », fait-elle remarquer. Alix Jeu regarde son ancienne élève avec un grand sourire. « C’est bien qu’elle revienne témoigner, ça va motiver les élèves », assure la responsable de l’atelier sciences politiques.

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