« Des agressions de plus en plus fréquentes sur les chantiers »

Ce mardi, la Fédération mahoraise du bâtiment et des travaux publics (FMBTP) a co-signé avec le Mouvement des entreprises de France (Medef), une lettre ouverte à l’intention de la Première ministre Élisabeth Borne, attendue à Mayotte ce vendredi. À travers cette missive, Julian Champiat, le président de la fédération, a souhaité interpeller la cheffe du gouvernement sur l’insécurité à Mayotte.

Flash Infos : Pourquoi était-il important pour vous d’écrire une lettre ouverte à la Première ministre sur l’insécurité ?

Julian Champiat : Au début, l’idée n’était pas forcément d’écrire une lettre ouverte. Mais nous nous sommes dit, dans un second temps, qu’associer la population de Mayotte à notre démarche nous semblait important. Car nous sommes tous touchés par l’insécurité, que ce soit dans le cadre du BTP (N.D.L.R. Bâtiments et Travaux Publics), des entreprises du Mouvement des entreprises de France (Medef), mais aussi de toute la population. Nous sommes tous concernés. Par exemple, un de mes collaborateurs s’est fait agresser à 4h du matin. Alors est-ce qu’il faut mettre un gendarme derrière chaque cocotier ? Je ne sais pas, et cela ne me semble pas réalisable. Je n’ai pas de solution en tête, c’est une demande générale que nous avons adressé dans cette lettre, celle de pouvoir vivre et travailler en toute sécurité. Avec le sentiment de ne pas avoir beaucoup de réactions localement, on a souhaité marquer l’instant en prévision de la venue de la Première ministre.

F. I. : Quelles sont les conséquences de l’insécurité spécifiques au secteur du bâtiment ?

J. C. : Je tiens à commencer par une évidence, il y a avant tout les conséquences sur la sécurité de nos collaborateurs. Que ce soit sur le chemin du travail ou dans le cadre des chantiers, il y a des agressions de plus en plus fréquentes pendant les heures de travail. Après, il y a aussi les conséquences sur l’intégrité de nos matériels. Nous avons eu, à plusieurs reprises, des engins de chantier qui coûtent plusieurs dizaines de milliers d’euros qui ont été incendiés. Ce sont des investissements, cela représente du temps, des impacts sur la cadence de nos chantiers. Ce sont les deux éléments qui me semblent primordiaux, encore une fois, la sécurité de nos collaborateurs, puis notre capacité de travail, nos moyens de travail et nos cadences de travail. On a déjà, on le sait tous, des difficultés à Mayotte, particulièrement avec l’eau. Si on rajoute des couches sur des couches, on n’arrivera plus à travailler.

F. I. : Dans cette lettre ouverte, vous demandez une rencontre avec la Première ministre. Quelles autres problématiques souhaiteriez-vous aborder avec elle ?

J. C. : Les problématiques sont nombreuses. Le premier enjeu qui me vient à l’esprit est celui de la formation. Nous avons pour objectif en 2024 de monter un CFA (N.D.L.R. Centre de formation et d’apprentis), spécifique au bâtiment. Et effectivement, nous avons demandé des aides et un accompagnement de l’État. En s’appuyant sur le développement de Mayotte, sur les travaux qu’il y a à réaliser, on souhaite pouvoir former localement du personnel qualifié. Puis, ce n’est pas la plus grosse problématique qu’on puisse rencontrer, mais, effectivement, on souhaiterait pouvoir s’approvisionner en matières premières dans des pays du canal du Mozambique, que ce soit l’Afrique du Sud ou éventuellement Madagascar. On se mobilise pour pouvoir faciliter les démarches administratives et douanières, sur lesquelles, en toute franchise, je ne me fais pas beaucoup d’illusions. Finalement, toutes ces questions entrent dans l’attractivité du territoire. Nous sommes tous avec des budgets, des engagements, des travaux qui sont là. Faire revenir des mahorais au pays pour travailler – alors je pense au BTP, mais quel que soit le métier – refaire venir les jeunes qui sortent d’étude, faire venir d’autres personnes qualifiées, c’est vraiment un besoin indispensable de Mayotte. Et je pense que pour en arriver là, il faut vraiment qu’on puisse sécuriser Mayotte et la rendre attractive.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1112

Le journal des jeunes

À la Une