Les agents de la mairie de Koungou, en grève depuis le 8 novembre, sont désormais soutenus par le collectif des citoyens de Mayotte et les Femmes leaders. Ils réclament le départ du directeur général des services, accusé d’harcèlement. Ce dernier envisage de porter plainte après des dégradations et faits présumés de violence à l’encontre du personnel non-gréviste.
Le maire de Koungou souhaitait probablement « dégager le passage » coûte que coûte. Pour joindre le geste à la parole, il a fait retirer le portail vert à l’entrée de la mairie. Un pied de nez à l’action des grévistes qui bloquaient l’accès depuis le début du mois. « N’importe qui peut rentrer, il ne faut pas oublier qu’il y a les archives municipales juste derrière », tance l’un d’entre eux. L’image est là : les rapports ne sont pas au beau fixe entre les agents grévistes de la mairie et leurs supérieurs hiérarchiques. Depuis début novembre, une grève des agents municipaux fait l’actualité de la commune. Dans son noyau dur, « dix à douze agents », selon le directeur général des services, Alain Manteau. Sous un barnum, c’est effectivement, à la louche, le nombre de participants au mouvement qu’on pouvait recenser, ce lundi 27 novembre.
Le mouvement, qui visait dans ses balbutiements à dénoncer des pratiques managériales jugées compromettantes à la mairie, s’est mué en une véritable sédition. Pas plus tard que lundi dernier, des grévistes appuyés par le collectif des citoyens de Mayotte se sont introduits dans les bureaux délocalisés de la mairie, au quartier Manga (dans une résidence de la SIM). D’après Alain Manteau, s’en sont suivis des « actes de vandalisme, de violence, d’intrusion dans les services avec des menaces sur les agents en poste ». Le DGS, décrié par les grévistes qui en ont fait un des points d’achoppement à toute forme de négociation, envisage de porter plainte et prépare sa riposte. « Des dossiers sur les agents grévistes vont sortir », nous assurait-il, ce mardi. Ambiance.
Conflit dans les rangs de la police municipale
A Koungou, le bât blesse principalement dans les rangs de la police municipale. « Nous avons écrit des courriers attestant qu’on a des problèmes avec notre directeur Olivier Billy », témoigne un policier municipal sur le piquet de grève. « C’est même plus un management qu’on subit, c’est un commandement brutal. Même à l’armée, on n’a pas connu ça. » Les syndicats réclament la levée de blâmes visant trois policiers municipaux, dont deux en détachement. Une réunion a eu lieu le 3 novembre entre des agents grévistes et le directeur de la police municipale de Koungou. Faute d’un commun accord, le rendez-vous a été ajourné la semaine suivante.
« Malheureusement, sans avertissement, les syndicats ont bloqué le portail de la mairie la semaine suivante, et les serrures des bureaux à Manga ont été vandalisées, avec plus de 3.000 euros de réparation », estime Alain Manteau. Un nouvel échange aurait été proposé aux syndicats après le retour d’Assani Saindou Bamcolo du congrès des maires (du 21 au 23 novembre à Paris).
Il n’a jamais eu lieu. De leur côté les policiers municipaux grévistes rappellent qu’une « collègue ASVP » aurait récemment « fait une tentative de suicide ». « Le jour où elle a été réanimée, elle a demandé qu’Olivier Billy et son adjoint ne soient pas présents. Ça en dit long sur leur image. On a ensuite fait un courrier au maire, qui n’a jamais daigné nous recevoir. » se remémore un agent.
« En mode dégradé »
« Une de nos premières revendications, c’est le départ du DGS actuel » conclut Boulouhane Allaoui, agent de la commune de Koungou. La reprise des négociations serait conditionnée à cette requête. Pour preuve, les pancartes éloquentes à l’entrée de la mairie ne font pas dans la dentelle à l’égard de celui qui est directeur général des services de la mairie depuis 2019. « La fonction de DGS ne s’improvise pas », « Manteau Nalawe », « Dehors l’incapable » figurent parmi les inscriptions affichées sur les bouts de carton dressés devant le barnum.
Dans leur combat, les grévistes sont soutenus par le collectif des citoyens des Mayotte et les Femmes leaders. Les conséquences de leur mouvement longue durée (le préavis a été déposé le 16 octobre) sont « minimes », rapporte Alain Manteau. « On s’organise soit en télétravail soit en mode dégradé pour assurer les urgences, notamment au niveau de l’état-civil. Les administrés n’ont pas à pâtir de ce mouvement-là », abonde la DGS. Et si des tentatives de pourparlers ont bien été initiées, les participants à la grève se disent isolés. « On a essayé de discuter plusieurs fois avec les conseillers et représentants du maire, mais ils s’en foutent. Ils ne regardent que leurs intérêts personnels. » raconte Naouirdine Bacoco Attoumani, représentant CGT des agents de la commune de Koungou. Les deux parties parviendront-elles à trouver une issue favorable ?