Suite à un appel à projets lancé il y a deux ans, le Réseau d’innovation et de transfert agricole dans les outre-mer (Rita) a organisé un séminaire cette semaine à Ouangani afin de présenter les sept qui ont été retenus et mis en place depuis. Parmi eux, Jéjé forêt, qui a notamment présenté une de ses actions : la mise en place d’un jeu de société pour sensibiliser le public à l’agroforesterie.
Se mettre dans la peau d’un agriculteur le temps d’une partie, c’est ce que propose le projet Jéjé forêt, qui a pour but de valoriser le Jardin Mahorais et les forêts depuis 2021. Pour sensibiliser le public agricole, mais pas que, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), Mayotte Nature Environnement (MNE) et la direction des ressources terrestres et maritimes (DRTM) ont créé un jeu de société.
« Comment passer de la sensibilisation au changement des comportements ? Il faut vraiment marquer le public intellectuellement pour que ça marche. Nous n’avons pas les moyens de rencontrer l’ensemble des élèves plusieurs fois. Donc comment les marquer ? Il faut qu’on propose des choses différentes, qui puissent vraiment les accrocher », explique Houlam Chamssidine, président de Mayotte Nature Environnement, afin de justifier cette approche ludique pour parler du Jardin Mahorais.
Un jeu collaboratif
« Le projet Jéjé forêt est parti du souci double qui est de protéger la forêt et d’intensifier de façon raisonnée la production de nourriture », pose comme cadre Joël Huat, ingénieur agronome au Cirad et chef du projet. C’est en se basant sur les actions menées et les connaissances acquises au cours de ce dernier que le jeu de plateau éponyme est né. Le séminaire de clôture des projets du Réseau d’innovation et de transfert agricole dans les outre-mer (Rita), qui s’est tenu du 14 au 16 novembre, était l’occasion de présenter Jéjé forêt et, pour la première fois, son jeu collaboratif, dans les locaux du lycée agricole de Coconi, à Ouangani.
Ce jeudi, les huit joueurs doivent se projeter dans la peau d’agriculteurs et cultiver sur le plateau de jeu, inspiré de M’tsamboro. Des cartes leur permettent de planter différentes cultures sur leur terrain, issues de trois strates végétales différentes, représentées par trois couleurs. La strate basse, avec des plantes comme la tomate, le piment ou la courge ; la strate moyenne, avec des agrumes ou du manioc par exemple, et enfin, la strate haute, avec des arbres comme le manguier ou le jacquier.
« C’est important de jouer collectif »
En variant ces cultures sur un même terrain, les joueurs imitent les techniques d’agroforesterie et vont créer ce qui est appelé dans le jeu un « maillon du corridor écologique ». « Pour gagner la partie, ils doivent réussir à connecter tous les maillons pour créer un corridor écologique, qui va favoriser la biodiversité et la retenue des eaux, comme le fait l’agroforesterie », explique David Lorieux, chargé de communication pour MNE, qui a grandement participé à l’élaboration des règles du jeu. Et ce tout en gérant également la ressource en eau. En témoigne les cartes « retenue collinaire » présentes sur le plateau.
Il faut donc mettre en place une stratégie et échanger avec ses voisins pour réussir à créer le corridor de manière efficace. La partie est guidée par un animateur, et est suivie d’une demi-heure de debriefing. « Ce qui est bien dans le jeu, c’est que ça montre que c’est important de jouer collectif, même si dans la réalité, les relations avec les voisins peuvent être plus compliquées », constate Églantine Cadena, agricultrice dans le jeu et dans la vraie vie à Ouangani, où elle cultive à peu près toutes les plantes présentes lors de la partie.
À terme, le jeu devrait évoluer vers un format un peu plus court. Ses créateurs aimeraient également pouvoir, après une partie, se rendre sur les parcelles des agriculteurs ayant participé à l’atelier pour les accompagner vers les bonnes pratiques présentes dans le jeu.
Sept projets pour innover dans le secteur agricole
Le projet Jéjé forêt fait partie des sept projets présentés au séminaire de clôture des projets du Réseau d’innovation et de transfert agricole dans les outre-mer (Rita), qui s’est tenu du 14 au 16 novembre. Développer la culture des agrumes, préserver la banane des bioagresseurs, développer la filière maraîchère, améliorer la gestion des risques de santé dans l’élevage, développer l’apiculture et préserver les races locales de ruminants étaient autant d’actions présentées lors de cet événement. Le Rita a en effet pour but de regrouper les différents acteurs de la recherche et de l’expérimentation pour développer le secteur agricole ultra-marin.