Pas de chambardement au niveau du quai Issoufali à Dzaoudzi, ce lundi matin. Pourtant annoncées, les navettes de bus pour faire face à la forte circulation tôt le matin et en fin de journée n’étaient pas au rendez-vous. Il faudra attendre encore une semaine avant qu’elles ne soient opérationnelles. Un mécontentement des chauffeurs de taxis s’était fait ressentir, mais la mesure ne concerne que les automobilistes exerçant une activité professionnelle quotidienne en Grande-Terre.
Du chahut, les chauffeurs de taxis de Petite-Terre en font depuis vendredi après-midi pour manifester leur mécontentement contre la mise en place de navettes gratuites sur le boulevard des crabes, entre le rocher de Dzaoudzi et les deux villes de Labattoir et Pamandzi, et inversement. Des navettes destinées à transporter les automobilistes empruntant ce tronçon de route nationale pour se rendre au travail en Grande-Terre.
En effet, le département a annoncé d’importants travaux d’aménagements des infrastructures maritimes, aux quais Ballou et Issoufali. Un chantier qui devrait durer un an et qui va lourdement impacter la circulation sur le boulevard des crabes. Pour éviter une accumulation de véhicules aux abords des deux futurs chantiers, le département interdit l’accès aux parkings et autres espaces le long de la route et du front de mer de Dzaoudzi. Bien que cette information soit connue du grand public depuis des mois au travers d’information implantés à la sortie du « grand parking du bouilleur », nombreux ont été les automobilistes ayant choisi de braver cette interdiction, bien qu’il ne s’agisse que d’un tiers environ des véhicules habituellement stationnés à cet endroit. Il faut dire que la réaction des conducteurs de taxis en fin de semaine dernière a fait penser à tous que la mise en place des navettes gratuites était une opération huilée qui allait démarrer sans encombre ce lundi. Point n’en a été le cas ! Presque jamais auparavant la circulation n’a été aussi fluide un lundi matin comme ce fut le cas ce lundi. Nul besoin de rouler à tombeau ouvert sur le boulevard des crabes pour rallier les quais Issoufali à Dzaoudzi, à l’aéroport de Pamandzi. Mieux encore, les chauffeurs de taxis d’ordinaire avaient inhabituellement changé de comportement à l’égard de leurs usagers.
Changement réel d’attitude ou simple opération de communication ?
Très avenants, ils ont été nombreux sur la route à demander aux passants le long des trottoirs s’ils désiraient un taxi. Certains poussant l’opération de séduction jusqu’à proposer une course gratuite. Cette histoire de navettes gratuites n’est absolument pas à leur goût. Elle préfigure, selon eux, une future concurrence déloyale. « Vous savez les autorités ne font jamais rien au hasard. Aujourd’hui, on nous dit que ces bus sont là juste pour un an et que nous ne les verrons plus à la fin des travaux. Nous, notre crainte c’est qu’elles ne finissent définitivement par faire partie du paysage sur cette route. Nous sommes des entrepreneurs et devons remplir des obligations légales. Qui va compenser notre manque à gagner durant ces 12 prochains mois ? », interroge Darouèche H de Labattoir.
Une question qui peut sembler légitime mais que d’autres n’hésitent pas à balayer d’un revers de la main. A commencer par deux agents du Département de Mayotte installés sur le parking du bouilleur. « C’est archi faux ce que raconte les chauffeurs de taxi. Absolument rien ne va changer pour eux dans leur activité quotidienne. Ces navettes sont exclusivement destinées aux personnes disposant d’un véhicule pour se rendre à leur travail en Grande Terre ou inversement. Leur clientèle habituelle va continuer à recourir à leurs services, sans que cela n’impacte en rien leur chiffre d’affaires ». Peine perdue, pour l’institution, il n’est plus question que d’une enveloppe de 24.000 euros, qui aurait été attribuée par les pouvoirs publics en guise de compensation pour un manque à gagner au cours du premier mois de travaux d’aménagement. L’unique questionnement porte sur la manière par laquelle cette enveloppe va être répartie entre les différents chauffeurs de taxi.
Des usagers peu tolérants à l’égard des chauffeurs de taxis
Du côté du public, le sujet divise, certains usagers trouvent cette mesure choquante et non méritée pour une profession accusée d’être « peu consciencieuse » à l’égard de sa clientèle. « Pourquoi refuser la mise en place de ces navettes de bus ? Cela fait partie de l’évolution du territoire, ils n’ont qu’à l’accepter au lieu de tergiverser » assène Fatima Hamidou, un agent de la CDM résidante à Pamandzi. Pour Abdelhamid, employé au port de Longoni qui prend la barge tous les jours, « si cela est bien organisé ce serait franchement une bonne chose. Ces chauffeurs de taxis qui essaient de faire bonne figure aujourd’hui se comportent très mal en temps ordinaire. Vous pouvez passer des heures sur la route ou à un arrêt dédié sans qu’ils ne daignent vous regarder. Ils affichent éternellement complets, même lorsqu’ils sont vides, parce qu’ils ne travaillent que sur la ligne Dzaoudzi/aéroport de Pamandzi. Et pourtant cette ligne traverse obligatoirement Labattoir et Pamandzi. Allez comprendre quelque chose ». Halidina Abdelkader travaille dans un commerce dans la zone industrielle de Kawéni, pour elle « s’endetter pour acheter une voiture n’est absolument pas un luxe, surtout si c’est pour se retrouver quotidiennement coincée dans d’infernaux bouchons à l’entrée du rocher de Dzaoudzi pour prendre la barge. Mais c’est la seule garantie que j’avais d’espérer arriver à l’heure au travail. Comment vais-je faire maintenant pendant un an » ? Ce genre de questions ont fusé de partout tout au long de la journée d’hier en Petite-Terre, sans réponse véritable.
Côté pratique, il convient de savoir que tous les usagers remplissant les critères exigés (habiter en Petite-Terre et travailler tous les jours en Grande-Terre) doivent retirer une fiche de renseignement à remplir et à restituer avant la fin de la semaine, (avec éléments complémentaires à fournir) à un stand préposé à cet effet, à coté du camion pizza sur le grand parking adjacent au quai Issoufali. Un ticket provisoire leur sera attribué pour prendre le bus, en attendant l’attribution d’une carte définitive.