Alors qu’il juge que cette rentrée de septembre 2023 « s’est bien passée », Jacques Mikulovic n’a pas éludé les difficultés auxquelles l’académie mahoraise doit faire face, notamment la pénurie d’eau qui touche toute l’île. Devant les chefs d’établissements réunis à Dembéni, ce mardi après-midi, le recteur de Mayotte veut garder un cap, l’acquisition des savoirs fondamentaux « quoi qu’il en coûte ».
Crise de l’eau
C’était le premier sujet abordé et la fermeture temporaire du lycée Younoussa-Bamana, pendant deux jours, est venu rappeler que la rentrée 2023 n’est décidément pas comme les autres. Branché sur le mauvais conduit, l’établissement de Mamoudzou retrouve son réseau d’origine, ce mercredi matin. « Il nous faut rester sereins car ce n’est que le début. Si saison des pluies il y a, ça sera guère avant le mois de décembre. On a donc trois mois de gestion quotidienne difficile », lance Jacques Mikulovic, ce mardi, aux chefs d’établissement et à ses équipes réunis au CUFR de Dembéni. Il rappelle que seuls les collèges de Passamaïnty et M’gombani ne sont pas sur le chemin de l’eau parmi les établissements secondaires, une caractéristique qu’il espère voir disparaître « au 15 septembre » grâce à des travaux. Pour le premier degré, ce n’est pas encore ça. « On s’est aperçu qu’une quarantaine ne sont pas encore équipées de cuves », constate le recteur, rappelant qu’il s’agit d’une compétence communale. Concernant les établissements qui sont pourvus, « on va voir la capacité. Est-ce qu’elles pourront tenir 48 heures ? », s’interroge le représentant de l’Éducation nationale, n’excluant pas l’installation d’autres cuves ou de regrouper les cours sur une matinée s’il y avait de grandes difficultés.
Des enseignants qui répondent à l’appel
Il y avait une interrogation majeure pour cette rentrée 2023. Est-ce qu’il y aura du monde devant les élèves pour faire classe ? Le rectorat s’en sort pas trop mal avec 39 postes vacants sur les 3.476 qui existent à Mayotte dans le premier degré. Dans le secondaire, il n’y a pas à proprement parler de postes vacants, mais 105 BMP (blocs de moyens provisoires) qui ne sont pas encore fournis, dont 29 en lycée professionnel. Pour continuer à suivre la courbe démographique, il a été rappelé l’importance de « former localement ».
Violences à Mamoudzou
Il a été à peine évoquer, mais depuis la rentrée, les rixes entre le rond-point Baobab et le lycée Younoussa-Bamana empoisonnent la vie des lycéens et celle des collégiens se rendant au collège M’gombani. Les parents d’élèves de Doujani ont même bloqué leur collège, ce lundi matin, pour alerter sur le sort de leurs enfants. Jacques Mikulovic dit « en avoir ras-le-bol de cette violence ». Il les a même corrélés aux résultats de l’académie. Car si la réussite au baccalauréat général est de 72,7% à Mayotte, une autre statistique traduit les difficultés du territoire, l’automaticité de la lecture au cours de la Journée défense et citoyenneté. 74,4% des Mahorais de 18 ans qui y sont invités peinent dans cet exercice, alors que c’est le taux est entre 7% et 10% en métropole. « Les rapports sociaux tels qu’ils s’expriment aujourd’hui sont des mauvais indicateurs des compétences sociales qu’on a pu instruire », estime le recteur, qui n’est pas favorable à l’ouverture « d’un collège ou un lycée dans chaque quartier » pour résoudre les problèmes de violence. « Est-ce qu’on va apprendre à nos jeunes à vivre ensemble ? », s’inquiète-il.
« Académie expérimentale »
C’est le credo du recteur, il veut une amélioration de l’acquisition des savoirs fondamentaux « quoi qu’il en coûte », reprenant l’expression d’Emmanuel Macron. A ses côtés, graphique à l’appui, le directeur académique Thierry Denoyelle montre les courbes vertigineuses des évaluations en mathématiques et français dans les écoles mahoraises. Pour contrer cela, Jacques Mikulovic veut faire de Mayotte « une académie expérimentale ». « On est dans une académie d’opportunités, pour vous, toutes fonctions confondues. C’est un des rares lieux où les gamins ont une considération éducative. Comment on le transforme après en s’assurant qu’en sortant de chez nous ils ont acquis un minimum de compétences scolaires et sociales ? », insiste-il, se disant ouvert aux initiatives.