Le chef de l’État comorien, en réponse à un courrier que lui a envoyé l’opposition, s’est dit favorable à l’ouverture de discussions avec les forces politiques et acteurs économiques pour créer les conditions permettant de garantir une présidentielle transparente en 2024. Mais l’approche ne convient pas à ses opposants qui exigent avant toute chose la libération des détenus politiques, dont l’ex-président, Sambi.
Le Front commun élargi continue de maintenir la pression sur Azali Assoumani, le président de l’Union des Comores. Malgré l’empressement dont il a fait preuve pour répondre à la lettre de cette coalition d’opposants, celui-ci ne parvient toujours pas, selon des observateurs à donner des gages de sa bonne volonté. Vendredi, dans une déclaration faite à la mosquée de l’Assemblée nationale, il a exprimé sa disponibilité à ouvrir des pourparlers pour la tenue d’une élection apaisée. « Je voudrais ainsi renouveler mes sincères remerciements aux membres de l’opposition et leur réitérer mon entière disponibilité à les recevoir pour examiner avec eux et les responsables politiques, économiques et de la société civile de notre pays, toutes les voies possibles susceptibles de garantir des élections libres, transparentes et démocratiques dans notre pays pour l’année prochaine », déclarait-il, lors d’une brève adresse à la nation prononcée le 25 mars, à l’occasion du début du mois « sacré » de ramadan.
S’il pensait, par ces mots, rassurer ses opposants en leur faisant comprendre qu’il était lui aussi préoccupé par les échéances électorales à venir, le locataire de Beit-Salam aura donc raté son coup. En effet, cette déclaration n’a pas du tout été du goût de l’opposition qui a sorti un communiqué plutôt dur, le lendemain. « Le Front commun contre la dictature, organe politique reste inflexible, n’est, ne sera jamais disposé à participer à un énième dialogue quelconque qu’Azali entend organiser, ni répondre à une invitation de sa part », insiste, Ahmed Hassane El-Barwane, secrétaire exécutif signé de la déclaration.
« Fausse déclaration »
La coalition a avancé ses raisons. « Nous rappelons contrairement à sa fausse déclaration dans la maison d’Allah, le Tout puissant, que nous ne voyons en cet homme aucun acte tangible pouvant nous rapprocher en parlant de renforcement de la paix dans le pays qu’il a détruite contre le mieux vivre ensemble de notre société », précise le document publié samedi soir. Pour l’opposition comorienne, il n’est pas question de prendre part à des discussions sans la libération des prisonniers politiques, notamment l’ancien raïs, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, qui fêtera ses cinq ans d’emprisonnement d’ici trois mois. Condamné à la perpétuité, l’ex-président a aussi perdu ses droits civiques, dans l’affaire dite de la citoyenneté économique, dont le procès s’est tenu en novembre. A l’issue de cette même audience, Mohamed Ali Soilihi, actuel chef de l’opposition exilé en France a pris vingt ans de prison. Quant à Abdou Salami, ancien gouverneur de l’île d’Anjouan, il purge une peine de douze ans dans une autre affaire d’insurrection. Ces trois leaders ainsi que les autres détenus politiques jugés définitivement doivent d’abord être libérés exigent les opposants. Sans cela, aucun dialogue n’est envisageable clarifie-t-on du côté du Front commun, qui avait transmis le 16 mars à Azali Assoumani une série de propositions destinées à favoriser la tenue d’une élection transparente en 2024.
Invitation des économistes
Le 21 mars, le chef de l’État comorien accusait réception de ce courrier tout en assurant qu’il ne manquerait pas de diligenter une initiative allant dans ce sens. Le problème, c’est que les contours annoncés lors de son récent discours consistant à inviter des acteurs économiques dans les pourparlers sont déjà rejetés par l’opposition. « D’après le discours d’Assoumani, il apparaît clairement qu’il veut encore une fois créer un semblant de dialogue. Sinon comment se fait-il que dans un débat purement politique, l’on appelle des acteurs économiques, pour quoi faire. C’est juste une façon d’embobiner les gens et de noyer les problèmes », croit savoir le porte-parole du Front commun, Ibrahim Abdourazak Razida. Selon ce dernier, la seule démarche qui ouvrirait la voie à un début d’apaisement serait la suivante : « Il n’a qu’à libérer les prisonniers politiques point barre. Et nous nous s’assiérons ensuite pour discuter du comment organiser des élections transparentes et démocratiques », a tranché Razida, un des plus farouches opposants au président Azali Assoumani, qui depuis le 18 février, dirige l’Union Africaine. Un statut sur lequel, l’opposition semble vouloir en tirer profit pour obtenir des garanties.
Dans le même sillage, l’opposition réclame une médiation internationale si jamais un dialogue était organisé.