Avec l’Ohada, la CCI veut fluidifier le business dans la région

La Chambre de commerce et d’industrie de Mayotte (CCIM) présentait ce mercredi matin son « projet de coopération pour le climat des affaires dans le sud-ouest de l’océan Indien ». Des offres de formation au droit Ohada – qui vise à harmoniser le droit des affaires en Afrique – sont ainsi mises en place à Mayotte, mais aussi à Madagascar et aux Comores.

« Ohada ! Il va falloir vous imprégner de ce nom, que vous entendrez de plus en plus ! », clamait ce mercredi matin Mohamed Ali Hamid, le président de la Chambre de commerce et d’industrie de Mayotte (CCIM), en préambule du lancement du « projet de coopération pour le climat des affaires dans le sud-ouest de l’océan Indien » porté par son institution. « Pour coopérer, il faut trois conditions préalables : un marché commun, une connectivité des territoires et une sécurisation juridique… c’est là l’objet de notre présence aujourd’hui ! », introduit-il.

Rassurer les investisseurs internationaux

Ohada : le mot est sur toutes les lèvres dans la salle ; il est même placardé depuis quelques jours sur bon nombre de panneaux publicitaires, un peu partout sur l’île. Voilà donc l’outil qui doit permettre à nos acteurs économiques de prospérer sereinement dans la région et sur le continent africain. Mais qu’est-ce exactement ? Créé en 1993, le système juridique et judiciaire de l’Organisation de l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) vise à fluidifier la vie des affaires de ses états-membres dans dix domaines. Le droit Ohada est ainsi pratiqué par dix-sept pays d’Afrique, principalement de l’ouest mais également par les Comores… d’où l’intérêt qu’il peut susciter chez nous. « Concrètement, si vous décidez de constituer une entreprise au Togo ou aux Comores, le droit qui vous est applicable est harmonisé pour éviter les mauvaises surprises localement. C’est une vraie garantie de sécurité juridique », renseigne Nicolas Ligneul, maître de conférences, avocat à la cour de Paris et spécialiste de l’Ohada. « C’est un outil pour sécuriser et rassurer les investisseurs internationaux », résume Ali Hamid. « En s’intéressant à l’Ohada, on s’ouvre les vastes marchés du continent ! ».

Des formations gratuites

En pratique, le programme régional dont il est question ce mercredi consiste à former des praticiens du droit Ohada, par la mise en place de dispositifs de formation à Mayotte, Madagascar et aux Comores. Le projet est financé à hauteur d’environ 560.000€ par l’Union européenne (UE) via le programme de coopération Interreg, et de 100.000€ par l’Agence française de développement (AFD). Il s’est d’abord traduit par l’ouverture, en novembre dernier, d’un master spécialisé en droit Ohada à l’université de Fianarantsoa à Madagascar. Dans notre département, les forces jointes de la CCIM, du Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Dembeni et de l’organisation non gouvernementale ACP Légal Océan Indien permettront à 120 étudiants volontaires et à 90 professionnels de prétendre – gratuitement – à l’obtention d’un certificat professionnel en la matière, et à participer à des ateliers socio-professionnels. Les formations débuteront au mois d’avril.

« Vous allez être les ambassadeurs d’un projet très ambitieux. En tant que chef d’entreprise, je vous en suis reconnaissant ! », s’est exprimé le président de la CCIM à l’attention des étudiants du CUFR venus assister à la matinée de présentation. « Il y a parfois des choses qui sont un peu invisibles, mais qui sont fondamentales ! Je pense que c’est ce qui s’initie aujourd’hui avec le lancement d’Ohada à Mayotte », ajoute Yves Jégo, le représentant d’ACP Légal Océan Indien, qui vise à inclure le Mozambique, la Tanzanie ou encore le Kenya dans la boucle. « Nous avons des tas de raisons pour travailler conjointement avec les pays de la région ; nous avons des défis à relever en commun… Pourtant, en l’absence de stratégie collective, les échanges restent limités », enchaîne Thierry Suquet, le préfet de Mayotte. « L’environnement juridique est peu propice aux investissements partagés. Ces freins limitent aujourd’hui les échanges commerciaux et le développement des affaires à l’échelle régionale », constate-t-il pour mieux souligner la pertinence du projet Ohada. Dans l’assemblée, un entrepreneur témoigne effectivement de déconvenues vécues lors de voyages d’affaires au Mozambique ou en Tanzanie : « on se fait parfois racketter ! »

Mayotte, futur carrefour des affaires de l’océan Indien ?

« Le département français de Mayotte peut constituer un point d’appui pour le développement des affaires dans l’océan Indien », plaide enfin le préfet, qui imagine déjà la tenue de « colloques internationaux » ou la création d’un « centre d’arbitrage » sur l’île. Tout cela sera conditionné par la bonne formation de praticiens et par la sensibilisation des acteurs économiques de l’île. Un premier atelier socio-professionnel est prévu ce jeudi matin au siège de la CCIM, animé par plusieurs experts Ohada, dont Nael Abdou Hamidouni, juriste et… ancien étudiant du CUFR ! Les graines sont semées…

 

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