37 dossiers sont arrivés sur la table de la commission du surendettement en 2022, un chiffre largement inférieur aux autres départements d’outre-mer. Est-ce qu’il faut voir là une bonne santé financière chez les ménages mahorais ? Plutôt une méconnaissance du dispositif, reconnaissent les membres de la commission. Explications.
A quoi sert la commission de surendettement ?
Présidée par le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, et avec une vice-présidence assurée par le directeur régional des finances publiques, Christian Pichevin, la commission de surendettement se réunit tous les deux mois. Elle y examine les dossiers déposés auprès de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (Iedom), qui assure le secrétariat de la commission. « La commission a pour objectif d’éviter qu’un certain nombre de gens ne sombrent dans le surendettement. Ce sujet important peut souvent détruire des vies, des familles et créer des problèmes économiques sur l’île », explique le préfet de Mayotte. En 2022, 37 dossiers ont été traités. S’il y a une augmentation (il y en avait 24 l’année précédente), ça reste loin des standards métropolitains ou des autres départements d’outre-mer. Dans les DOM, la moyenne est de 106 dossiers pour 100.000 habitants.
Qu’est ce qui freine les particuliers ?
« Le dispositif est mal connu », reconnaît le préfet. « On a besoin de le faire connaître. Ça fait partie de l’accès aux droits de façon générale. C’est dans l’intérêt de tout le monde, y compris pour des propriétaires ou des organismes bancaires qui font face à des impayés. » La conférence de presse de ce mercredi fait d’ailleurs partie de cette stratégie de communiquer. Patrick Croissandeau, le directeur de l’Iedom, a noté que plusieurs dossiers étaient arrivés la semaine qui a suivi un procédé similaire, l’an dernier. Il rappelle que seuls les particuliers peuvent passer par la commission. Il souhaite également « renforcer l’accompagnement et les partenariats » pour encourager les surendettés à se faire connaître. Un geste qui n’est toujours facile dans la culture mahoraise.
Les montants sont-ils toujours évalués ?
La trentaine de dossiers traités laisse apparaître une dette totale d’un million d’euros. Toutefois, les dettes sur les biens immobiliers font vite monter les sommes à « 100.000 » ou « 200.000 » euros, constate le directeur de l’Iedom. La moyenne approche les 20.000 euros. Pour aider à éponger les dettes, la commission (qui inclut aussi des créanciers) donne des préconisations, voire efface partiellement ou totalement une dette. L’an dernier par exemple, six dossiers ont dû nécessiter cette dernière mesure, soient 25% (c’est 43% au niveau national) de ceux retenus.
Est-ce qu’il y a des spécificités mahoraises ?
Oui, l’Iedom s’est aperçu que les personnes déposant des dossiers auprès de la commission sont plutôt des salariés. C’est-à-dire que les personnes ont un revenu, mais croulent sous des impayés trop importants. Et alors que ce sont plutôt les charges courantes qui entrainent des problèmes de trésorerie en métropole, ce sont davantage les crédits à la consommation qui pénalisent les dossiers locaux.
Ça ne concerne que les particuliers ?
Normalement oui, les dettes liées à une activité professionnelle concernent davantage le tribunal de commerce. Toutefois, une circulaire ministérielle datant de janvier rebat un peu les cartes pour les entrepreneurs individuels « très nombreux sur l’île ». « Il y avait un vide. A la commission, on leur disait de s’adresser au tribunal de commerce. Et là-bas, on leur répondait que c’étaient des dettes personnelles », fait remarquer Patrick Croissandeau. Dorénavant, les professionnels, comme les artisans ou commerçants par exemple, peuvent passer par le tribunal commerce, qui peut ensuite les rediriger vers la commission. Mais le directeur de l’Iedom dit ne pas s’attendre à un doublement des dossiers avec cette nouvelle disposition.