La délégation sénatoriale aux outre-mer et la délégation aux droits des femmes vont mener, dans les prochains mois, un travail commun portant sur le rapport d’information de la parentalité en outre-mer. C’est dans ce cadre que, ce jeudi matin, les deux délégations ont entendu des représentants du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), ainsi que de l’Institut nationale d’études démographiques (INED).
La thématique de la parentalité dans les outre-mer aborde différents sujets comme les spécificités des structures familiales, la répartition des rôles parentaux ou encore les politiques familiales et sociales menées. Les cinq départements et régions d’outre-mer (DROM), que sont la Guyane, la Martinique, la Guadeloupe, La Réunion et Mayotte, connaissent un certain nombre de réalités communes sur ces sujets, ce qui les distingue de la métropole. C’est donc dans l’objectif de mieux comprendre les sujets liés à la parentalité dans les outre-mer qu’a eu lieu cette audition. Pour la présidente de la délégation aux droits de la femme, Annick Billon, « faire converger nos approches, croiser nos regards et nos analyses constituera une grande richesse ».
« Ce sont les enfants de Mayotte »
Un rapport mené par le HCFEA, publié en mars 2022, met en évidence les spécificités des structures familiales. « L’ambition est de sortir de cette vision uniformisante des DROM et faire sortir des aménagements spécifiques de chaque territoire », explique Claude-Valentin Marie. Cette étude montre que les Antilles font état d’une décroissance rapide des populations. « A l’inverse, en Guyane et à Mayotte, nous sommes dans un processus totalement inversé, avec une croissance exceptionnelle des populations », concède le conseiller.
Dans le 101e département, l’enjeu majeur est la recomposition interne de la population, « qui combine des dynamiques migratoires très intenses et une natalité particulièrement vive ». D’après le rapport du HCFEA, 75 % des naissances sont issues de mères étrangères, principalement comorienne (70 %) et pour une petite minorité, de mères malgaches (4 %). « Ce sont les enfants de Mayotte, que deviendront-ils dans les 10 à 15 ans ? », s’interroge Claude-Valentin Marie. L’une des conséquences du nombre grandissant d’enfants nés sur le territoire est une scolarisation moins précoce, ce qui conduit à une part importante de jeunes étant en difficulté de lecture voire d’illettrisme. En réponse à cette problématique, l’INED, qui publiera au printemps sa deuxième édition de l’enquête « migration, famille et vieillissement dans les DROM », préconise lors de son exposé, d’appliquer la scolarisation dès 3 ans à Mayotte.
Un écart de vie médian très important
Outre la problématique de la recomposition de la population, la diversité des contextes et la précarité sont des défis pour les développements ultramarins. « A Mayotte, le niveau de vie représente un sixième de celui de l’Hexagone », affirme Michel Villac, président de l’INED. Un écart de niveau de vie médian très important et pourtant, « seul un tiers de la population est couverte par les prestations sociales », ajoute-t-il. Pour lui, il « reste beaucoup de chemin à faire ». Au cours de la présentation a également été abordé le sujet de la scolarité, avec un développement prioritaire des écoles, qui nécessiterait un investissement des collectivités.
Pour l’INED, il faudrait verser les mêmes prestations familiales sociales aux familles, quel que soit le territoire où elles habitent, mais aussi développer des programmes d’accompagnement de la parentalité, notamment sur la prévention des grossesses précoces et non-désirées. En conclusion de cette étude en ressort un impératif, « investir fortement pour réduire les écarts avec la métropole », affirme le président de l’institut. « Les territoires ultramarins sont les plus inégalitaires de la France », lance Nassimah Dindar, sénatrice de La Réunion en fin de présentation et ajoute, « vous nous donnez la réalité que les territoires vivent actuellement ».