Djaouria Attoumani : « J’ai refusé l’affectation et me voilà sans salaire depuis seize mois »

Fonctionnaire du Sivom (syndicat intercommunal à vocations multiples), puis au Sidevam (syndicat intercommunal d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte), Djaouria Attoumani travaillait dans des locaux de Petite-Terre depuis plusieurs années. La mère de famille de 42 ans se retrouve dans une impasse après avoir refusé son affectation à Dzoumogné et sans salaire suite à un abandon de poste. Son employeur assure avoir essayé d’arranger les choses, mais qu’aucune offre n’a convenue à la salariée.

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La mère de famille a toujours travaillé dans les locaux du Sidevam en Petite-Terre.

Flash Infos : Depuis combien de temps travaillez-vous pour le syndicat de collecte des déchets ? Quel poste occupez-vous ?

Djaouria Attoumani : Au début, je travaillais pour Sivom. Ensuite, avec les fusions, c’est devenu le Sidevam. Du coup, au 1er mars 2023, ça va faire vingt ans que je travaille ici. J’étais coordinatrice de la collecte de ramassage ici en Petite-Terre.

F.I. : Depuis quand la situation a-t-elle changé ?

D.A : Ça a commencé depuis un bon moment déjà. J’étais partie en vacances en métropole pour faire des traitements. A mon retour, mes collègues m’ont dit qu’il y’avait eu quelques changements et qu’ils avaient passé des entretiens. Il y avait aussi un nouveau coordinateur qui avait demandé à être transféré en Petite-Terre. Le directeur a accepté sans penser au fait qu’il y’avait déjà deux coordinatrices car on était deux femmes. Le directeur général des services m’a convoqué et m’a dit que mon poste n’existait plus, ils nous ont donc proposé deux postes et j’ai choisi l’un d’eux. Quelques mois après, je suis repartie en traitement et une de mes collègues m’a prévenu qu’il y avait un arrêté et que j’allais être transféré à Dzoumogné. J’ai refusé l’affectation et me voilà donc dans cette situation, sans salaire depuis seize mois.

F.I : Pour quelles raisons vous n’avez pas accepté votre transfert à Dzoumogné ?

D.A : J’avais un enfant en bas âge, donc ça allait être compliqué pour moi de partir à 5h30. Qui serait resté avec lui ? Et qui allait préparer mon autre enfant pour l’école ? En plus, ça allait être un grand changement pour moi car Dzoumogné, ce n’est pas la porte à côté. J’avais déjà mes habitudes ici et c’est plus simple car je suis d’ici. Sans oublier le trajet et le coût du taxi tous les jours.

F.I : Avez-vous eu des échanges avec vos supérieurs à propos de votre cas ?

D.A : Oui, j’ai eu la direction des ressources humaines (DRH), nous avons discuté, mais ça n’a abouti à rien.

F.I : Est-ce qu’il y’a des solutions qui vous ont été proposées ?

D.A : Non, on ne m’a jamais appelé pour me dire quoi que ce soit (voir encadré).

F.I : Avez-vous tenté de trouver un arrangement avec vos supérieurs ?

D.A : Oui, mais ça n’a servi à rien parce que quand je suis allé voir le président, il a refusé que je reste en Petite-Terre. Mon avocat leur a écrit. Ils ont refusé de le voir. Même la déléguée syndicale qui est partie à leur rencontre n’a rien pu faire. J’ai aussi un ami au conseil départemental qui a tenté de plaider la cause, mais ils ont rejeté sa proposition.

F.I: Pourquoi continuez-vous à vous rendre à votre travail si vous n’êtes pas rémunéré ? Pourquoi vous ne démissionnez pas ?

D.A : Je suis obligée de venir parce que je ne suis pas licenciée. Et si je démissionne, je risque de perdre beaucoup.

F.I. : À quoi ressemble votre quotidien au travail ?

D.A : Je viens, mais je ne fais rien, car aucun appareil électronique ne fonctionne ici. Que ce soit l’ordinateur, la climatisation ou même le téléphone. Je reste assise. Puis, quand c’est l’heure de la pause, je la prends. Et quand c’est l’heure de partir, je pointe et je rentre chez moi comme si c’était une journée ordinaire de travail.

F.I : Comment subvenez vous à vos besoins étant donné que cela fait plus d’un an que le Sidevam ne vous rémunère plus ?

D.A : Il y a mon mari à la maison qui m’aide et qui me soutient.

F.I : Est-ce que vous allez passer par la justice ?

D.A : Je m’étais renseignée sur les démarches et procédures pour ce genre de situation et j’avais pris un premier avocat. Mais avec lui, l’affaire traînait énormément, donc j’ai changé et j’en ai engagé un autre en métropole.

Le Sidevam dit avoir cherché des solutions mais sans succès

De son côté, le Sidevam dit avoir tout tenté pour arranger les choses mais que toutes les offres faites ont été rejetées. En effet, le syndicat a changé de gouvernance en 2020 et a procédé à une grande réorganisation de ses effectifs. De nombreux employés ont dû alors changer de services. Petite-Terre, qui avait trois coordinateurs, a désormais un chef de secteur et un coordinateur. Pour que Djaouria Attoumani garde un poste dans l’organisation, des postes lui ont été proposés à Combani et à Dzoumogné. Le dernier étant celui d’assistant du chef mécanicien. Face à un temps de réflexion trop long de la part de la salariée, son employeur était dans l’obligation de la mettre en abandon de poste. « On a même cherché à la muter dans une collectivité de Petite-Terre », fait remarquer Chanoor Cassam, directeur général des services du Sidevam, décrivant « un cas extrême » dans la réorganisation du syndicat. Concernant la climatisation, l’ordinateur et le téléphone qui ne marchent pas, le DGS explique qu’il ne peut pas remplacer du matériel pour un poste qui n’existe plus.

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